Avant le démarrage de la saison touristique, plusieurs acteurs du secteur de l'hôtellerie et de la restauration ont annoncé pouvoir embaucher facilement des travailleurs émigrés, plutôt que des locaux. Une affirmation scandaleuse, alors que le taux de chômage dépasse toujours les 15%. Un problème qui toucherait tous les secteurs d'activité à la recherche de petite main-d'œuvre. Salon d'esthétique, agriculture, ménages... les travailleurs africains acceptent un job partout et n'importe quand, parfois même, à n'importe quel salaire. Il est vrai que le recours à ces nouveaux profils est épisodiquement obligatoire. Les employeurs se trouvent confrontés au manque de candidatures tunisiennes, et sont obligés de recruter de la main-œuvre étrangère. Sans surprise, les secteurs les plus touchés sont la restauration et l'hôtellerie. «La pénurie affectant la restauration concerne principalement les plongeurs et les serveurs. Certains employeurs sont, ainsi, contraints de fermer leur établissement pour pallier le manque de rotation de la main-d'œuvre » déclare Kahlil, propriétaire une crêperie à l'Aouina. Pour lui, « cela a pour conséquence de ralentir cruellement notre croissance potentielle, car moins de jours travaillés signifie évidemment moins de couverts et donc de rentrées d'argent ». Ce jeune affirme qu'il n'a pas droit à l'erreur car son projet est, non seulement au stade du démarrage mais offre aux clients une nouvelle conception qui consiste à choisir, parmi une liste d'ingrédients, la composition de sa crêpe. «Cette nouvelle conception demande, à la fois, un bon plan marketing et un service irréprochable», souligne notre interlocuteur. Il ajoute qu'une main-d'œuvre sérieuse, présente et dynamique représente plus de 50 % de la réussite pour n'importe quel projet. Si les acteurs du domaine de la restauration ont annoncé de nouveaux profils à recruter, afin de redorer l'image de leurs professions, le problème est, certes, plus profond. La formation est, sans doute, l'un des facteurs les plus importants dans la pénurie de salariés, cette fois générale, qui touche le pays, en particulier vis-à-vis des chômeurs les plus proches de l'âge de départ à la retraite. Un manque de formation qui touche cependant très peu les emplois saisonniers. Dans la grande majorité des cas, ceux-ci demandent pour seule qualification un peu de motivation. Autre problème : l'inadéquation géographique entre l'offre et la demande, avec des travailleurs pour lesquels la mobilité est devenue un luxe. On commence sans doute à mettre le doigt sur le problème. En effet, la nécessaire mobilité est contrebalancée par l'inadéquation des salaires proposés et des impératifs de déplacements. Durant la saison estivale, toutes les offres d'emploi se concentrent dans les zones côtières, alors que les demandes d'emploi proviennent des régions intérieures, le plus souvent à fort taux de chômage. En termes de calcul rationnel, rester au chômage chez-soi est donc, malheureusement, plus profitable que de toucher le revenu minimum loin de son domicile. Une triste réalité qui a nécessairement un impact sur la croissance et, par conséquence, sur l'emploi.