L'action du gouvernement pour contrecarrer le mouvement de grève est une tentative pour limiter les dégâts. Le ferry «Carthage» ne cesse de cumuler les retards, depuis plusieurs mois A la surprise générale, les syndicats de la Compagnie tunisienne de navigation décident d'observer une grève, dimanche dernier, en pleine période de retour des vacanciers et tunisiens résidant à l'étranger. "Pour moi, cette grève restera une énigme, je dirai même que c'est un vrai scandale qui touche carrément l'Etat tunisien", nous confie un cadre expérimenté au sein de la compagnie. Lorsqu'on lui parle de "revendications syndicales", ce cadre nous explique gentiment que dans toutes les entreprises, il existe des négociations syndicales en continue. "A chaque fois, il y a des points de convergence et des points de divergence, mais c'est le but des négociations, explique-t-il. Sauf que rien, absolument rien, ne peut justifier une grève de deux jours". Les négociations se sont soudainement rompues et les syndicats ont finalement décidé que le temps du dialogue était révolu et que seule une "clé de main" à l'administration pouvait faire plier les négociateurs et les obliger à appliquer les revendications. "Depuis 2011, indique notre interlocuteur, les demandes ont explosé, mais je peux vous assurer qu'à chaque fois, nous avons trouvé des terrains d'entente. C'est pour cela que cette grève m'étonne plus qu'autre chose". Sans vraiment aller jusqu'à l'admettre, ce cadre semble dire que les raisons de la grève sont à chercher ailleurs que dans les "revendications légitimes". Toujours est-il que le bateau de la compagnie "Carthage" continue à cumuler du retard sur son planning de navigation, au grand dam des clients de la compagnie, otages d'un conflit qui ne les concerne pas. "J'ai l'impression d'être dans un camp de réfugiés", s'écrie, en pleur, une passagère. Intervention de la marine nationale Avec 9 heures de retard (prévu dimanche à 18h), le navire a finalement bougé hier, lundi à 3h37 du matin, à destination de Gênes. Un voyage rendu possible grâce à l'intervention du ministère de la Défense, la marine nationale en l'occurrence, sur ordre express du chef du gouvernement, Youssef Chahed. La marine nationale a en effet mobilisé 10 techniciens afin d'assurer la desserte. "La mobilisation a été possible suite à un ordre de réquisition émis par le ministre du Transport sur ordre du chef du gouvernement", explique Mohamed Zekri, porte-parole du ministère de l'Intérieur. Mais cette version des autorités a été contestée par l'Ugtt, qui dans un communiqué rendu public affirme: "Malgré la légalité de notre mouvement de grève à la CTN, le secrétaire général n'a pas toléré que les voyageurs restent bloqués au port de La Goulette. Il est intervenu personnellement pour que le navire Carthage puisse partir". Dans un statut Facebook, le secrétaire général du syndicat, Hattab Dridi, n'hésite pas à insulter les médias et tente d'expliquer que l'armée n'a fait que sécuriser l'opération d'embarquement des passagers. Mise en place d'une cellule de crise L'action du gouvernement pour contrecarrer le mouvement gréviste est une tentative pour limiter les dégâts. Le navire Carthage ne cesse de cumuler du retard, depuis plusieurs mois. Conséquence directe de cette grève inattendue, la traversée du "Carthage" programmée initialement pour aujourd'hui, et en partance pour Gênes, est repoussée à demain 5 septembre à 11 heures du matin. Par ailleurs, c'est une cellule de crise, créée dimanche "pour évaluer la gestion de cette crise par le ministère du Transport et les différents services y afférents, et pour identifier les mesures et les solutions à entreprendre", qui suit actuellement le développement de la situation. Présidée par le ministre du transport, la cellule de crise peut compter sur l'appui du directeur général du transport maritime et des ports et des représentants de l'Office de la marine marchande et des ports (Ommp), outre la Compagnie tunisienne de navigation (CTN) ainsi qu'un certain nombre de cadres du département du transport. Ce dernier épisode a causé beaucoup de tort à la Compagnie tunisienne de navigation, un fleuron de la Tunisie indépendante, créée en mars 1959 avec pour ambition « de faire de sa flotte un outil, efficace, d'appui au développement économique du pays ». Le voyage demain à 11h00 La Compagnie tunisienne de navigation (CTN) a annoncé hier que le voyage Tunis-Gênes, à bord du Car-ferry Carthage, prévu aujourd'ui, mardi 4 septembre 2018, a été reporté à mercredi 5 septembre 2018, à 11 heures du matin. Les voyageurs partant vers le port de Gênes sont appelés à se présenter, mercredi 5 septembre 2018, à partir de 7h00, au port de La Goulette pour accomplir les formalités de voyage, a indiqué la CTN, dans un communiqué. Un numéro vert, le 71 120 201, est mis en service pour d'amples informations.