Les syndicalistes menacent d'une grève générale dans le secteur public. L'entêtement de Noureddine Taboubi risque de faire tomber le pays dans le chaos Entre l'Ugtt et le gouvernement Youssef Chahed, les relations vont, de plus en plus, vers la rupture définitive à la lumière de la décision de l'organisation syndicale ouvrière d'observer dans les prochains jours une grève générale dans le secteur public. La décision de la grève qui sera officialisée le 13 septembre à l'occasion de la tenue de la commission administrative nationale de l'Ugtt, constitue une réponse au «programme gouvernemental relatif à la privatisation de quelque 104 entreprises publiques, sans prendre en considération l'avis de l'Ugtt» qui considère que la cession des entreprises publiques est une ligne rouge à ne pas dépasser. Et mardi dernier, Noureddine Taboubi, secrétaire général de l'Ugtt, a dit tout ce qu'il avait sur le cœur à l'encontre du gouvernement en ouvrant la conférence nationale organisée par l'Ugtt sur le projet du gouvernement relatif à la gouvernance des entreprises publiques. Le secrétaire général de l'Ugtt considère, en effet, que «la politique de cession du secteur public ne passera pas et que la politique de privatisation instaurée dans les années 90 du siècle précédent ne se renouvellera pas». Il ajoute : «Il n'est pas question d'ouvrir des négociations avec un gouvernement déterminé à céder les entreprises publiques au plus offrant». Le point de non-retour La question qui se pose maintenant est la suivante : face à la position ferme de certains syndicalistes qui assurent que l'Ugtt ne reculera pas et est déterminée à remporter le bras de fer qui l'oppose au gouvernement, l'on est en droit de se demander si les relations Ugtt-gouvernement Youssef Chahed ont atteint le point de non-retour, les déclarations faites par Taboubi, mercredi dernier, à l'issue de son entretien avec le président de la République annonçant une année sociale très chaude font craindre le pire. Et même si «les syndicalistes révolutionnaires» font miroiter une insurrection probable et essaient de comparer la situation actuelle à celle qu'a connue la Tunisie fin janvier 1978 quand l'Ugtt a décrété la grève générale pour le jeudi 26 du même mois, il est toujours possible d'agir dans le but d'éviter le chaos et l'affrontement qui menacent le pays au cas où la grève générale annoncée par l'Ugtt serait officialisée. Hier, le président de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) est allé à la rencontre du président de la République pour souligner «l'urgence de solutions à même de rassurer les Tunisiens et rétablir leur confiance en les institutions de l'Etat dans un contexte de solidarité nationale et de dialogue responsable». Et quand on revient aux journées qui ont précédé la journée du jeudi noir un certain 26 janvier 1978, on se rappelle des efforts déployés par les responsables de l'opposition à l'époque (Ahmed Mestiri, Béji Caïd Essebsi, Hassib Ben Ammar) pour calmer les esprits et éviter la confrontation. Malheureusement, les partis qui dominent la scène politique actuellement, qu'ils soient dans l'opposition ou qu'ils soutiennent même conditionnellement Youssef Chahed, observent une attitude le moins qu'on puisse dire inadmissible dans la mesure où ils laissent entendre par leur silence troublant que le conflit Ugtt-gouvernement ne les concerne pas et qu'une grève générale du secteur public est une affaire purement syndicale alors que ses répercussions et ses retombées menacent sérieusement la stabilité du pays. On a beau répéter que nos élites politiques ne pensent qu'à leurs propres ambitions et intérêts personnels, sauf que cette fois, c'est la stabilité du pays qui est en cause d'où la nécessité d'une prise de conscience générale pour imposer une solution consensuelle qui épargne à la Tunisie un drame dont personne ne veut.