C'est Monsieur touche-à-tout. Il a pratiqué bon nombre de disciplines sportives dont le football, avant de devenir l'un des meilleurs handballeurs du pays. Si sa carrière a connu plus de hauts que de bas, ce qu'il endure aujourd'hui le préoccupe encore plus. Faouzi Sbabti ne cache pas son amertume. Pour ceux qui ne le connaissent pas et qui ne l'ont pas vu à l'œuvre, les jeunes d'aujourd'hui notamment, Faouzi Sbabti fait partie de la lignée des grands. «Sabata», comme on le surnommait en ce temps-là, volait dans les airs surplombant ses adversaires pour marquer les buts les plus difficiles. Cela grâce à une double détente dont seul il en connaît le secret. Pourtant, le meilleur buteur tunisien aux Jeux olympiques de Munich en 1972 et 5e buteur mondial n'était pas destiné à faire une carrière de handballeur. «J'ai débuté en 1959 en tant que gymnaste à l'Etoile Goulettoise. En parallèle, je pratiquais la natation. Ce n'est qu'en 5e et 6e années primaires que j'ai commencé à pratiquer le handball à l'école à La Goulette, avant de signer ma première licence à l'Etoile Goulettoise en 1964», affirme Faouzi Sbabti. Il faut dire qu'en ce temps-là, les jeunes touchaient à tous les sports. D'ailleurs, notre interlocuteur affirme avoir été athlète et détenir le record scolaire du relais 4x100 mètres. Il sait aussi manier un ballon de basket. C'est en 1966 que Faouzi Sbabti opte définitivement pour la petite sphère. «C'est M. Denis, le directeur du collège de la Goulette, qui me dirige vers l'Avenir Sportif de la Marsa dont il était un fervent supporter. Il était aussi l'ami de feu Taïeb Mhiri, alors président d'honneur du club du Safsaf», ajoute Sbabti. Ses qualités technique et physique lui ont permis de gravir rapidement les échelons. Dès la seconde année cadet, Faouzi évoluait déjà avec les seniors grâce à un surclassement. Il restera d'ailleurs quatre bonnes saisons à l'Avenir. 1971, le tournant Ses prouesses ne laissent pas insensibles les dirigeants de l'Espérance Sportive de Tunis qui fait l'impossible pour le recruter. C'est donc en 1971 que «Sabata» prend la route du club de Bab Souika où il réussira le plus gros de sa carrière. «J'ai gagné 13 doublés consécutifs sur 16 avec l'Espérance et 4 coupes arabes. Sans compter 1 coupe arabe remportée avec Al Ahly Jeddah», ajoute-t-il. Son immense talent et ses capacités poussent en ce temps-là Hédi Malek à le convoquer en sélection nationale. «J'étais pourtant voué à une belle carrière de footballeur. Arrière central, je pouvais percer dans cette discipline et être aussi international. Mais Hédi Malek a surgi dans ma vie et m'a fait aimer le handball». Faouzi enrichira son palmarès en équipe de Tunisie en remportant trois championnats maghrébins consécutifs, respectivement en 1969 au Maroc, en 1971, en Algérie et en 1973 à Tunis. Il a aussi remporté le championnat d'Afrique des nations en 1971, également à Tunis, alors qualificatif aux Jeux olympiques de Munich en 1972, puis un second en 1975. En Allemagne, Faouzi Sbabti allait se mettre en évidence face aux meilleurs joueurs du monde de l'époque. «Ce n'était pas facile de rivaliser avec les ténors du handball en ce temps-là et qui étaient la Yougoslavie, l'Allemagne de l'Est, la Hongrie, la Roumanie, la Russie, la Tchéchoslovaquie et même la Bulgarie». Face à ces géants, il allait planter 24 buts en 5 matches. Il récidivera en 1975 en Roumanie lors des Jeux universitaires mondiaux en terminant second meilleur buteur du tournoi. Il terminera aussi quatre fois meilleur buteur du championnat arabe des nations. Si ses prouesses sportives le mettaient au-devant de la scène, Sbabti a quand même un pincement au cœur. «J'aurais pu mieux faire au niveau des études. J'ai fait une carrière d'auditeur comptable et j'ai occupé le poste de directeur général d'une société, alors que j'étais destiné à être expert comptable. Le handball a pris tout mon temps et j'ai dû faire des sacrifices», dira-t-il non sans regrets. 120 points de suture Faouzi Sbabti était réputé pour sa double détente, une qualité rare de nos jours chez les handballeurs. «C'est grâce à ma polyvalence et au fait d'avoir pratiqué d'autres disciplines sportives en parallèle avec le handball que je pouvais réussir la double détente. J'étais en effet très agile». Aujourd'hui, «Sabata» affirme regretter la méthode française basée sur la pratique du sport avec les études. Deux entraîneurs l'ont beaucoup marqué au début de sa carrière. Ce sont Ghraïri et Abdelkrim Derouiche qui l'ont coaché à l'ASMarsa. Ce dernier était aussi entraîneur-joueur avec Faouzi Sbabti. En sélection nationale, il ne peut oublier le Roumain Firan Haralambi : «C'est le père du hand tunisien. C'est lui qui a mis ce sport sur les rails dans notre pays» ajoute-t-il. Au niveau de la direction technique Sbabti a été impressionné par Hédi Malek, Abdelaziz Sfar et Moncef Hajjar. Des regrets, il eu a aussi. «Savez-vous que j'ai 120 points de suture de la tête aux pieds, à travers tout le corps ? Je regrette sincèrement la non-reconnaissance des bénéficiaires de nos services, après tant de sacrifices. Nous n'avons pas droit à l'accès aux soins médico-sportifs. Avec l'âge, les muscles ont besoin de soins et c'est notre droit absolu. Les anciens sportifs doivent être pris en charge comme dans les pays évolués. Personnellement, je souffre d'une arthrose aux deux genoux ce qui va nécessiter la pose de deux rotules. Cela se fera à mes frais grâce à ma fille qui est médecin du sport en Allemagne. Si moi j'ai cette chance, d'autres ne l'ont pas. Il faut créer un système qui défend les anciens joueurs», conclura Faouzi Sbabti sur un ton amer.