L'éventuelle candidature de BCE pour un second mandat est un fréquent sujet de conversation qui divise les Tunisiens, y compris ceux, majoritaires, qui l'avaient élu en 2014. Après une réponse affirmative tranchée de la part de Faouzi Elloumi, Boujemâa Remili, qui l'avait vu en tête-à-tête, a explicité l'attitude du chef de l'Etat à l'égard de cette question qui taraude l'esprit de nombreux Tunisiens. Béji Caïd Essebsi ne compte pas se représenter mais pourrait changer d'avis si le congrès électif démocratique de Nida Tounès était effectivement organisé et était couronné de succès, et que ce soit le parti qui, alors, le désigne officiellement en tant que son candidat. Cette question de l'éventuelle candidature de BCE pour un deuxième mandat est un fréquent sujet de conversation qui divise les Tunisiens, y compris ceux, majoritaires, qui l'avaient élu en 2014. Car une partie de ces derniers sont très critiques à l'égard de la gestion de Nida Tounès par Hafedh Caïd Essebsi et considèrent que le Président n'a pas usé de son autorité de capitaine de fait, pour ramener la barque dans le droit chemin. Un bon candidat, malgré l'âge Mais Béji Caïd Essebsi reste pour un bon nombre de ses électeurs de 2014 un éventuel bon candidat pour cinq années supplémentaires, n'était la question de l'âge. Ce que d'autres bajboujistes réfutent en mettant en avant son génie politique, son aura, son expérience et ses relations. Et de les voir se lancer dans le rappel des épisodes où, comme un magicien, il a su nous sortir indemnes du goulot de la bouteille. N'oublions pas son appel à rééquilibrer l'échiquier politique après la victoire écrasante d'Ennahdha aux élections de l'Assemblée constituante, puis son accord miraculeux avec Ghannouchi à Paris et sa victoire massive à la présidentielle grâce au vote utile. Donc, s'agissant de BCE, les pronostics sont jouables, car le problème de l'âge est contrebalancé par la compétence que lui reconnaissent même ses adversaires. Comme ce fut le cas en 2014, où la direction d'Ennahdha avait donné une consigne officielle en sa faveur. Même si, lors du vote, cette consigne s'est avérée être un leurre, puisque les votes islamistes ont été réservés à Moncef Marzouki. Les autres candidats possibles En tête, il est utile d'aborder les hypothèses nahdhaouies. Le parti islamiste a semblé, un moment, tenté par une candidature à la présidence, et l'on a vu Rached Ghannouchi à la télé en tenue de gala demander à Youssef Chahed de choisir entre son maintien au poste de chef de gouvernement et se porter candidat. Mais, depuis, Ghannouchi semble avoir décroché et le parti affirme n'avoir pas encore abordé la question de la présidentielle. Cela n'empêche pas une possible approche originale que pourrait appuyer Ennahdha, celle qui resservirait la stratégie du consensus avec les modernistes mais, cette fois-ci, en optant pour Morjane comme symbole et, derrière lui, une masse de destouriens non engagés et des pères de famille tranquilles disposés à composer avec le projet islamiste. Sachant, par ailleurs, que Morjane est apprécié pour ses qualités de patriote et d'homme d'Etat par des destouriens et des non-destouriens qui apprécient son calme et sa modération. L'hypothèse Abbou L'hypothèse Abbou vient naturellement à l'esprit, dans la mesure où il représente désormais un courant atypique et qu'il n'a jamais nié qu'il pourrait être candidat. Mais, alors que son parti prépare son congrès prévu fin mars, et qu'il semblerait devoir s'y hisser de nouveau au poste de secrétaire général, des bruits semblent rapporter l'existence d'une polémique de coulisse sur le «choix du meilleur candidat» entre monsieur et madame, qui s'appuie sur les bons scores attribués par les sondages à Samia Abbou. Mais les chances de Mohamed Abbou, en cas de candidature, sont plus évidentes, du fait de son ancienne proximité des leaders nahdhaouis qui est susceptible de lui rapporter des voix, voire d'opter pour lui en tant que candidat officiel d'Ennahdha. Et ce, malgré son positionnement déclaré actuel, opposé autant à Ennahdha qu'à Nida. Le droit absolu de Youssef Chahed Youssef Chahed est le possible candidat le plus controversé et le plus silencieux quant à ses éventuelles ambitions présidentielles. L'idée qu'il puisse se présenter inquiète plusieurs parties. La première à l'avoir exprimée est, certes, Ennahdha, mais elle est, depuis, embarquée dans la même galère dans un mutisme parfait sur les intentions des deux alliés. Ennahdha pourrait bien vouloir enfoncer le clou en préférant Chahed tant à Morjène qu'à Abbou, mais le chef du gouvernement s'applique, en toute occasion, à ressortir ses racines destouriennes et démocratiques. La sagesse recommande donc une formule anglaise aussi célèbre que simple : « wait and see ! ». Mais, s'agissant de son droit à se présenter aux prochaines élections, que ce soit législatives ou à la présidentielle, tout le monde a compris que c'est son droit le plus légitime et que vouloir l'en empêcher serait une bataille antidémocratique perdue d'avance. Que compte faire BCE ? La bonne question de nature à déterminer les chances des différents candidats possibles à la présidence de la République, c'est de savoir quelle sera en définitive l'attitude du chef de l'Etat. Car sans lui en face, n'importe qui pourrait bien tenter le coup, y compris Mehdi Jomaâ, Néjib Chebbi ou encore Mondher Zenaïdi. S'agissant de BCE, les recoupements et indiscrétions orientent vers la remise en selle du concept bourguibiste de Front national, qui avait permis, lors des élections de la première Assemblée constituante, en 1956, la victoire massive du parti néo-destourien. Son actuel appui discret à l'Ugtt et sa proximité de l'Unft lui ouvrent cette opportunité. Reste l'Utica. Mais manque à l'appel le grand parti populaire qu'était le Destour. Est-ce que l'actuel Nida Tounès peut vraiment faire l'affaire ? Surtout que le nouveau parti en préparation risque de le vider de nombre de ses militants. Ce qui est sûr, c'est que Béji Caïd Essebsi ne sera pas tendre avec Ennahdha, même si ce dernier, qui le craint plus que tout, tentera jusqu'au bout de l'amadouer. Mais les bases islamistes réclament d'afficher leurs couleurs et rêvent d'une revanche sur le candidat des femmes. Quoi qu'il en soit, il est utile d'insister auprès de tous ceux qui sont au pouvoir pour qu'ils n'utilisent ni l'autorité ni les moyens de l'Etat pour se faire élire. Cela concerne aussi bien les trois présidents que les ministres des partis au gouvernement.