Nous avons toujours été compréhensifs à l'égard de tous ceux qui nous «haïssent» ouvertement, l'hostilité a souvent ses bons arguments, mais ulcérés en revanche par ceux qui nous vouaient une haine profonde tout en portant le masque de la duplicité et de la supercherie. La répugnance des premiers était franche et sans détour. Eux au moins nous affrontaient à visage découvert et non pas comme les «autres» qui prétendent nous mener dans la «bonne voie» de la solidarité «arabe et musulmane», en vérité ils ne font que nous préparer les braises de la haine. Ainsi quand ton «ennemi», a le visage découvert et démasqué, tu peux l'affronter dans le cadre d'un combat loyal et juste. Mais lorsque ce dernier porte de multiples masques, l'affaire devient plus compliquée. Quand la haine s'enracine dans le tréfonds des âmes, et quand la rancœur envahit les sentiments, les masques qui voilaient la face tombent. Un mensonge, disait Mark Twain, «peut faire le tour de la terre le temps que la vérité mette ses chaussures». Cette réalité obscure s'applique à la chaîne «Al-Jazira». En effet, à mesure que le virus du mal croît dans les esprits de ses pamphlétaires, elle est trahie par les mensonges qu'elle propage, fussent-ils emmitouflés de soie et exprimés dans des formules alambiquées et ambiguës. Voici donc qu'une frénésie s'installe dans les studios de cette chaîne: on ne veut plus d'information sans malheur. Et voilà que les événements de Sidi Bouzid allument sa recherche éperdue du mensonge. On voit un gouffre où il y a un tunnel , une tombe où se creuse une ornière. Et d'un excès à l'autre, l'irrationnel conduit toujours le bal. La nuance, la mesure, l'équilibre, la crédibilité deviennent des mots obscènes. La subjectivité est sa première obsession. Au siècle de l'image, en un moment où la télévision et l'écran d'ordinateur sont devenus les principaux vecteurs de l'information et où les professionnels ( les vrais) s'appuient, plus que jamais, sur la noble idée de la crédibilité pour éclairer la vérité, «Al-Jazira» s'engouffre dan le temple de la haine pour renverser les tables de la loi libertaire. Dans cet empire de l'image truquée, dans cette collectivation du mensonge, les surdoués de la désinformation ont essayé, à leur façon, de dépeindre la réalité telle qu'ils la percevaient, à travers le filtre de l'irrationnel, de l'émotionnel et du sectarisme. Qu'avons-nous vu dans les «meilleurs moments» de cette parodie? le degré zéro de la «télé d'information», et ces «bras de services» vendant au porte-à-porte les «vitamines du salut»! Cette «terreur médiatique» n'aspire pas à informer mais à dominer, à subjuguer, à écraser. Le but de cette oppression est d'affrayer les gens au point de tuer en eux ce qu'ils possèdent de plus précieux: leur lucidité, leur faire perdre ou oublier leurs devoirs. C'est en cela qu' «Al-Jazira» est une étape supplémentaire dans la tyrannie de l'insignifiance que les nouveaux provocateurs, ceux de la communication, infligent aux téléspectateurs. Plutôt que d'arracher aux gens leur dignité, comme le font les tyrannies, elle les amène à y renoncer. C'est dans cette «logique» que la haine radicale d'«Al-Jazira» est « sans pourquoi», et c'est dans cette fissure qu'elle invente le culte de la désinformation, la religion de la haine et l'apologie de la superficialité. En passant de la provocation aiguisée à la dramaturgie d'intimidation, son plaisir de tirer l'emporte grandement sur l'utilité d'informer juste, et sa «couverture médiatique» perd son innocence pour laisser place au soupçon. Ses pamphlétaires cultivent la mauvaise foi grinçante, un peu comme dans les cours de récréation de notre enfance où toute bagarre provoquait l'attroupement d'un «public» criant:» vengeance, vengeance»! En s'adressant aux élites, Voltaire avait fixé la doctrine dans une lettre à d'Alembert : «C'est l'opinion qui gouverne le monde et c'est à vous de gouverner l'opinion». Mais la chaîne «Al Jazira» n'a fait que massacrer les nobles principes de cette doctrine, en cédant aux comportements les plus infantiles. Elle distille, soupçonne, insinue, puis condamne avant même que la vérité ait commencé à prendre forme. Devant cette évidence, il faut compter sur la brusquerie de ceux qui refusent de se mettre la tête dans le sable et se mobilisent pour empêcher cette chaîne de jouer avec les allumettes.