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Mensonges et manipulation manifestes Rencontre avec Mme Moufida Tlatli, ministre de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine — En réponse aux allégations d'un quotidien israélien révé
• «Je ne comprends pas les raisons de cette cabale, la Palestine est et demeurera une cause qui m'est chère» Le journal palestinien Arabs 48 révèle, dans son édition du 23 janvier 2011, que le quotidien israélien Yediot Aharonot a consacré ce jour-là la couverture de son supplément artistique à la ministre de la Culture du gouvernement d'union nationale, Mme Moufida Tlatli. Arabs 48 mentionne qu'on peut y lire un entretien de deux pages avec une chanteuse israélienne d'origine tunisienne, Corinne El Ayil, qui prétend «qu'une relation d'amitié la lie depuis plus d'une décennie à la réalisatrice Moufida Tlatli». L'entretien est illustré de photos montrant les deux femmes posant côte à côte. La chanteuse affirme, en substance, dans l'interview que «Moufida Tlatli a des positions positives envers Israël et les Israéliens et qu'elle est heureuse de voir son film projeté en Israël». Pour en savoir plus, nous avons rencontré la ministre de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine qui s'en explique. Interview. Pouvez-vous nous raconter les faits tels qu'ils se sont déroulés et les circonstances de cette rencontre ? En 1995, j'étais à Paris pour la promotion de mon film Les Silences du palais, une chanteuse israélienne, auparavant journaliste, s'est présentée à moi pour un entretien. Elle m'a semblé, vu ses traits, être une Israélienne d'origine d'Europe de l'Est, je ne l'avais jamais vue auparavant et depuis l'entretien je ne l'ai plus revue. Nous avons parlé du film, de la condition de la femme en Tunisie et en Israël et elle a insisté dans l'entretien sur les raisons de mon refus d'aller en Israël pour présenter le film qu'un grand vendeur international «Fortissimo» avait acheté. Son but était de faire une interview plutôt positive pour la sortie du film en Israël. Nous n'avons évoqué dans cet entretien de deux heures que des questions d'ordre artistique et esthétique. A la fin de l'entretien, je lui ai demandé de m'envoyer l'article. Ce qu'elle n'a jamais fait. Les Israéliens m'ont harcelé et ont envoyé les billets de la production pour que j'aille en Israël, mais j'ai refusé, car je soutiens depuis toujours à fond la cause palestinienne. Les billets ont été récupérés par d'autres Tunisiens qui, eux, ont fait le voyage en Israël. J'ai, en tant que monteuse, monté plusieurs films sur la cause palestinienne qui dénoncent l'occupation israélienne signés Farouk Bellouga, Michel Khlaïfi et d'autres. Je me vois donc mal trahir cette cause qui m'est chère et partir en Israël. Ma faute a été, peut-être, d'avoir accepté d'accorder cette interview. Mais c'était à mes yeux un petit compromis pour la cause du cinéma tunisien en général. Concernant «La Saison des hommes», mon deuxième film, les acheteurs israéliens ont eu recours au chantage : ils m'ont dit qu'ils n'achèteraient pas le film si je n'allais pas en Israël. Je leur ai répondu: «Ne l'achetez pas». Et ils ne l'ont pas acheté. Je ne comprends vraiment pas les raisons de cette cabale faite de mensonges et de manipulation. Peut-être que certaines parties, d'ici ou d'ailleurs, veulent manipuler l'opinion publique. Mais, encore une fois, je le crie haut et fort : la Palestine, avec tous ses enfants, femmes et hommes opprimés qui souffrent quotidiennement de l'injustice et de la répression israéliennes, est dans mon cœur. Elle demeurera cette cause qui m'est chère. Je ne mettrai jamais les pieds en Israël tant que la Palestine restera occupée. Ma position est on ne peut plus claire, elle ne changera jamais. Pourquoi avez-vous accepté de participer au gouvernement d'union nationale ? Je ne suis affiliée à aucun parti, ni mouvement, mais je me suis dit que si on a fait appel à moi, je me devais d'accepter pour apporter provisoirement ma petite pierre à l'édifice de la révolution tunisienne et à la construction de la Tunisie libre et démocratique. J'ai hésité après l'appel de certains professionnels du cinéma qui m'ont exhorté à refuser puis je me suis dit que je devais accepter le poste, pour défendre certains de mes credo tels que la liberté d'expression artistique et la liberté d'association. Surtout que j'ai été membre de l'Association des cinéastes tunisiens (ACT) et de la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI). J'ai commencé, une fois ma prise de fonctions, par prendre connaissance des dossiers concernant le pillage des sites archéologiques, les terrains archéologiques déclassés et les associations civiles. Je compte étudier petit à petit tous les dossiers relatifs aux domaines du cinéma, du théâtre, du livre et de l'édition, etc. J'espère qu'en six mois je pourrai réaliser quelques acquis pour les hommes de culture et le secteur en général. Vous êtes l'une des signataires de l'appel des 65 pour un sixième mandat en faveur de Ben Ali, l'ancien président déchu, pourquoi? On m'a appelée par téléphone de la Présidence, précisément M. Abdelwahab Abdallah, pour me dire que j'ai été choisie parmi les personnalités indépendantes pour lancer un appel à la candidature de Ben Ali aux présidentielles de 2014. Pouvais-je refuser, j'étais trop fragile pour le faire d'autant que je savais qu'il allait être réélu, vous savez comment, à 99,99%. Je vous rappelle que je n'ai jamais voté de ma vie. Allez-vous démissionner ou rester dans ce gouvernement transitoire suite à cette «affaire» ? Non je ne démissionnerai pas. J'estime que je dois aller jusqu'au bout par amour du pays et par patriotisme, sauf si l'on me renvoie du gouvernement. Je n'ai aucune ambition politique, je ne cours pas derrière les postes et les honneurs. Même concernant ma carrière de cinéaste, «Les Petites mains» que je réaliserai bientôt sera mon dernier film. Je suis grand-mère et je compte me consacrer à mes petits enfants. Est-ce que vous vous rendez au siège de votre ministère ces derniers jours ? Non. Ce n'est pas possible, vu les centaines d'hommes, de femmes et d'enfants de «la caravane libre» qui campent à La Kasbah. Tous les sièges des ministères alentour sont fermés. Depuis deux jours, je n'y vais pas. Je travaille à la maison.