• Le projet de loi est présenté conformément aux dispositions de l'article 28 de la Constitution • Une nouvelle étape qui exige l'accélération de la promulgation de législatives permettant au peuple de dire son mot La Chambre des députés a adopté, hier, au cours d'une séance plénière, au palais du Bardo, un projet de loi habilitant le président de la République par intérim à prendre des décrets-lois conformément à l'article 28 de la Constitution. La séance a été présidée par M. Sahbi Karoui, président de la Chambre par intérim, et s'est déroulée en présence, notamment, du Premier ministre et du ministre de la Justice. Ce projet de loi a été présenté conformément aux dispositions de l'article 28 de la Constitution tunisienne, selon lequel la Chambre des Députés peut habiliter le président de la République par intérim et jusqu'à la fin de sa mission prévue par l'article 57 de la Constitution, à prendre des décrets-lois, dans le nouveau contexte qui commande la promulgation de nouvelles lois concernant notamment l'amnistie générale, les droits de l'Homme, les libertés fondamentales, le système électoral, la presse, l'organisation des partis politiques, des associations et des organisations non-gouvernementales, la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d'argent, le développement économique et social, les finances, la fiscalité, la propriété, l'éducation, la culture, la lutte contre les catastrophes naturelles et les dangers, les conventions internationales commerciales, fiscales, économiques, et d'investissement, les traités internationaux relatifs au travail et au domaine social, et ceux concernant les droits de l'Homme et les libertés publiques. Tournant historique A l'ouverture des travaux, la Chambre des Députés a salué la mémoire des martyrs de la Révolution de la liberté et de la dignité dont la jeunesse a été le pilier fondamental et qui a été marquée par l'adhésion de toutes les catégories et régions, pour ouvrir une nouvelle page honorable, dans l'histoire de la Tunisie. Dans une allocution d'ouverture, M. Sahbi Karoui a mis l'accent sur le tournant historique sans précédent qu'a connu le pays, grâce à la révolution de la jeunesse tunisienne, en particulier, et le peuple tunisien, en général. Il a, dans ce sens, salué l'Armée nationale, les structures de la sécurité publique, le peuple tunisien et les différentes sensibilités qui se sont opposés aux actes de violence, de destruction et de pillage, et ont fait face à ceux qui ont voulu porter atteinte à la patrie. Il a, d'autre part, loué le rôle des médias qui entrent dans une nouvelle étape positive, afin de consolider le processus démocratique libre et responsable. Le président de la Chambre par intérim a appelé les députés à dépasser leur appartenance politique, à participer à la concrétisation de la volonté du peuple et à contribuer à la réalisation de la mutation politique espérée par tous les Tunisiens, dans les meilleures conditions, en plaçant l'intérêt supérieur du pays au-dessus de toute autre considération et en adhérant à la volonté populaire et à la légalité constitutionnelle. Amnistie générale Prenant la parole, M. Mohamed Ghannouchi, Premier ministre, a souligné que la Tunisie vit, aujourd'hui, une étape historique ayant ses spécificités, une étape qui exige l'accélération de la promulgation de législations permettant au peuple de dire son mot, de choisir son président, de progresser sur la voie de la liberté et la préservation des droits acquis et d'élever la Tunisie au rang des pays avancés. Il a, d'autre part, passé en revue les défis posés par l'étape de transition et dont les plus importants sont la protection des vies, la sécurité des citoyens, la consolidation de la stabilité et l'instauration des conditions appropriées pour la reprise de la dynamique économique. Le Premier ministre a évoqué les projets de législations notamment ceux relatifs à l'amnistie générale, la ratification des conventions internationales ayant trait aux droits de l'Homme et aux libertés fondamentales. Il a, également, relevé que la prochaine période exige la promulgation de lois qui permettent de céder le flambeau au gouvernement légal, d'élire le futur président, d'où la nécessité d'amender la loi sur les partis et le Code électoral. M. Mohamed Ghannouchi a expliqué que les problèmes et les défis posés, ainsi que les dossiers qui s'accumulent imposent au gouvernement provisoire de s'activer pour les régler. Il a, à ce propos, appelé les citoyens à reprendre le travail pour protéger la révolution de la Tunisie, la révolution des jeunes, celle de Sidi Bouzid et des régions intérieures du pays, la révolution de la dignité et de la liberté. Promulgation rapide des lois Lors de l'examen de l'article premier de ce projet de loi, plusieurs députés ont exprimé leur refus de déléguer l'ensemble des prérogatives fixés dans cet article au Président de la République par intérim appelant à limiter l'habilitation aux questions urgentes. Ils ont relevé que cette habilitation constitue une dissolution indirecte du Parlement. Les Députés ont également souligné que la conjoncture actuelle et l'intérêt suprême de la Nation nécessitent la promulgation rapide des lois. Ils ont affirmé d'autre part la nécessité pour les anciens détenus bénéficiant de la loi d'amnistie générale de recouvrer rapidement leurs droits et que des excuses leur soient présentées pour les injustices subies. Un député a indiqué que l'adoption de ce projet de loi implique que la Chambre des députés soit consultée par le gouvernement concernant les lois relatives au régime électoral, la presse et l'organisation des partis. Un député s'est interrogé sur les prérogatives de la Chambre des Députés après l'habilitation du président de la République par intérim. Il a également relevé qu'aucune référence n'a été faite au développement régional dans les 17 articles du projet de loi bien que cette question soit une des principales revendications de la Révolution du peuple tunisien. Il a exprimé son refus d'habiliter le président de la République au moment, dit-il, où le gouvernement et les institutions intérimaires n'ont pas pu encore réaliser la stabilité dans le pays, appelant à habiliter le président du Conseil constitutionnel. Un député a proposé d'ajouter l'expression ''conformément à l'article 57 de la Constitution'' à l'article premier de ce projet de loi. Une députée a relevé que l'adoption de ce projet de loi n'empêche pas constitutionnellement les députés de retirer cette habilitation au cas où le gouvernement s'écarterait des principes républicains et constitutionnels ou transgresserait les lois relatifs au statut personnel. Révision du budget de l'Etat Un autre député s'est interrogé sur la possibilité d'introduire des amendements au code du travail afin de résoudre les problèmes de la sous-traitrance et de l'élargissement de la couverture de sécurité sociale à de nouveaux secteurs. Il s'est également interrogé sur la possibilité de réviser le budget de l'Etat, à la lumière des nouveaux changements intervenus dans le pays. Un député a évoqué la question de la réforme du secteur de l'éducation, indiquant qu'il ne s'agit pas d'une question urgente et ne nécessite pas de ce fait une habilitation, affirmant la nécessité à ce que les reformes dans ce domaine soient tenues loin des questions politiques. En réponse à ces interventions, M. Mohamed Ghannouchi a affirmé, concernant la loi d'amnistie générale, la libération de plusieurs détenus condamnés suite aux évènements du bassin minier et des événements de Slimane. Il a ajouté que ces personnes seront appuyées afin qu'elles recouvrent leurs droits matériels et sociaux. Il a indiqué que la légitimité du gouvernement de transition s'inspire de l'article 57 de la Constitution ,affirmant que sur cette base, le gouvernement poursuivra son action tout en s'attachant à ce que la situation dans le pays reprenne son cours normal. Promotion sociale M. Mohamed Ghannouchi a ajouté que la Chambre des députés est une institution constitutionnelle qui sera consultée lors de l'examen de plusieurs projets de loi, à l'instar de ceux relatifs à la création des institutions, des procédures judiciaires, la détermination des crimes et délits, l'émission de monnaie et différentes autres questions, tout en précisant que l'action du gouvernement sera contrôlée. En ce qui concerne le développement régional, le Premier ministre a indiqué que cette question est étroitement liée au développement économique, à la promotion sociale ainsi qu'aux aspects financiers et fiscaux. Il a affirmé que les mesures qui seront adoptées par le gouvernement dans les prochains jours attesteront de la justesse de cette orientation avec l'adoption de mesures concrètes. Le Premier ministre a expliqué par ailleurs que les pertes enregistrées par l'économie tunisienne, malgré leur gravité, ne peuvent cacher l'importance des acquis réalisés par la révolution populaire. Il a ajouté que la préservation de l'indépendance de la décision nationale est liée à la stabilité financière et politique, indiquant que la Tunisie dispose de plusieurs conventions lui permettant d'accéder à des crédits afin de réaliser les travaux d'infrastructure nécessaires pour faciliter le développement et l'investissement dans les régions. Le Premier ministre a également affirmé que les droits de la femme seront préservés et qu'ils ne peuvent être transgressés sous aucun prétexte. L'article premier de ce projet de loi a été adopté avec 16 voix contre et une abstention. Le deuxième article de ce projet de loi a été adopté avec 16 voix contre et une abstention. Chambre des conseillers Séance plénière demain La Chambre des conseillers tiendra, demain, une séance plénière à partir de 08h00 du matin. A l'ordre du jour de la séance plénière, l'examen d'un projet de loi habilitant le Président de la République par intérim à prendre des décrets-lois conformément à l'article 28 de la Constitution.