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La Commission pour la réforme politique est-elle une tour d'ivoire inefficace ?
OPINIONS
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 03 - 2011


Par Brahim Meddeb*
Comme tout Tunisien interpellé par la situation actuelle en Tunisie et les horizons qui se dessinent sur le plan politique, j'ai entrepris dans le cadre de cet article une démarche en vue de déchiffrer la stratégie de la Commission pour la réforme politique. Le texte est écrit sous forme d'un récit comportant plusieurs épisodes afin d'analyser de façon critique la pertinence de la Commission à travers les différentes déclarations de son responsable, le professeur Ben Achour. À la lumière de cette analyse, la Commission pour la réforme politique s'avère un instrument très inefficace pour mener à bien le processus de rénovation politique. L'analyse démontre aussi que la Commission sécrète ses propres dysfonctionnements qui la rendent peu viable. Pis encore, elle crée elle-même les mines qui sapent sa crédibilité. Le texte repose sur une démarche critique constructive dans le respect des compétences et des orientations des personnes concernées.
Episode 1 : L'origine des trois commissions
Toute personne impartiale, qui analyse les informations, est obligée de croire que les trois commissions ont été pensées, proposées et annoncées par le dictateur Ben Ali dans son discours du 13 janvier 2011, comme le démontrent les extraits suivants.
Extrait 1 : «Je demande à la commission indépendante, je dis bien indépendante, qui va enquêter sur les incidents, les dépassements et les décès que nous regrettons, de déterminer les responsabilités de toutes les parties, toutes les parties sans exception, avec équité, intégrité et objectivité».
Extrait 2 : «Pour ce qui est de la commission dont j'avais annoncé la constitution, il y a deux jours, avec mission d'examiner les phénomènes de prévarication, de corruption et d'abus des responsables, elle sera indépendante, je dis bien indépendante, et nous veillerons à son impartialité et à son intégrité». 
Extrait 3 : «Nous constituerons, à cet effet, une commission nationale qui sera présidée par une personnalité nationale indépendante et crédible auprès des partenaires politiques et sociaux pour se pencher sur l'amendement du Code électoral, du Code de la presse et de la loi sur les associations. La commission proposera un échéancier qui s'étalera jusqu'aux élections de 2014, y compris pour ce qui est de l'éventualité de dissocier les élections législatives de l'élection présidentielle».
Nier ces faits vérifiables, c'est traiter les citoyen(ne)s tunisien(ne)s de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, ce qui est une insulte à l'intelligence du peuple tunisien et une faute très grave. Mieux encore, le porte-parole de la Commission pour la réforme politique, peut-être peu ou mal informé, a nié cette vérité dans une déclaration à la radio le 23 février 2011. À la lumière de ce constat, il est tout à fait normal que les Tunisiens se posent une question pertinente : quelle est la légitimité des trois commissions découlant de décisions prises par le dictateur Ben Ali ?
Vu que Ben Ali a toujours pris et mis en œuvre de mauvaises décisions et a toujours agi en méprisant le peuple tunisien et en spoliant ses richesses au cours de ses 50 années de carrière militaire, policière et politique, il est donc absurde de vouloir bâtir la Tunisie de demain sur la base d'instructions (kararat) prises par le dictateur avant sa fuite. En effet, il est légitime pour toute personne objective de se poser des questions sur les intentions du despote avant sa chute. Prenons l'hypothèse que si le tyran avait réussi à mâter la révolution et à se maintenir au pouvoir, quelle valeur et ampleur auraient eu ces commissions ? Quels résultats auraient-elles atteints ? Il s'agit-là de questions très simples dans leur apparence, mais très riches de signification dans leur essence. En relisant attentivement l'extrait 3 du discours de l'ex-président Ben Ali (cité ci-dessus) et en laissant libre cours à son imagination, tout lecteur pourrait y répondre de façon logique.
Pour clore l'épisode 1, compte tenu de la maturité, du sens élevé de responsabilité et de l'intelligence du peuple tunisien et de ses forces vives, il est possible d'inventer et d'élaborer des instruments innovateurs légitimes et mieux que les trois commissions pour concevoir et mettre en place les fondations d'une Tunisie libre, démocratique et digne, conformément aux attentes des Tunisiens. Le fait que sa création fut décidée par le despote Ben Ali mine, dès le départ, la commission et remet en cause sa légitimité.
Episode 2 : La Commission pour la réforme politique a déjà une option privilégiée et prioritaire en vase clos
L'épisode 2 débute par une conférence de presse le 22 janvier 2011, au cours de laquelle les chefs des trois commissions ont présenté les objectifs et les prérogatives de leurs commissions respectives. Plus spécifiquement, le professeur Ben Achour a précisé que «la priorité sera accordée à l'élaboration des textes organisant les élections et à l'amendement du code électoral […], l'amendement du code de la presse […]» (La Presse, 23 janvier 2011). Cette précision doit être comparée avec l'extrait 3 du discours de l'ex-président mentionné ci-haut.
Dans une entrevue à l'Express, réalisée par Dominique Lagarde (25/01/2011), le responsable de la Commission pour la réforme politique, M. Yadh Ben Achour, suggère déjà un premier scénario, soit l'élection d'un nouveau président dans une première étape. Sur ce point, il répondait aux questions du journaliste :
«Comment seront choisis ces juristes ? Combien seront-ils ?
- Entre 10 et 15. C'est moi qui les choisirai parmi les spécialistes du droit public. J'écarterai ceux qui se sont directement impliqués aux côtés de la dictature, en particulier ceux qui avaient signé des pétitions appelant Ben Ali à se représenter en 2014». 
«En aucun cas. Le Parlement actuel est complètement discrédité. Personnellement, — mais cela n'engage que moi— je serai assez favorable à ce que, dans un premier temps, seule la loi électorale soit modifiée, ce qui peut se faire par décret-loi, afin de permettre l'élection d'un Président de la République. Ensuite, le nouveau chef de l'Etat appellerait de nouveau les citoyens aux urnes pour élire une assemblée dont il décidera s'il s'agira d'une Assemblée constituante ou d'une Assemblée législative, qui amenderait le texte de 1959». (Nous soulignons.)
Le 2 février, le professeur Ben Achour réaffirme ce premier scénario dans un entretien réalisé par Raouf Seddik (La Presse, 2 février 2011). Sur ce point, les réponses du professeur Ben Achour aux questions du journaliste sont claires sur le premier scénario qu'il a déjà fixé avant même le début des consultations :
Question 1 : «Est-ce que la révision de la Constitution pose un problème de votre point de vue, au niveau de la procédure ?
Au niveau de la procédure, je pense qu'une révision de la Constitution ne pourra pas être menée par l'actuelle Assemblée et par la Chambre des Conseillers. Donc il faudra attendre la dissolution de cette Assemblée et l'élection d'une nouvelle…» 
Question 2 : «Donc, après les élections, pas avant ? Oui, mais c'est une possibilité, celle à laquelle on s'engage maintenant : préparer d'abord les élections présidentielles…» (Nous soulignons.)
Question 3 : «Est-ce que le travail de consultation commence bientôt ?
- Les experts juristes ne se sont pas encore réunis : ils le feront mercredi prochain (aujourd'hui, Ndlr). Vous voyez donc à quel point le délai de deux mois prévu par la Constitution est impossible à respecter !»
Question 4 : «Le travail de la commission va se poursuivre au-delà de la période qui nous sépare des élections, n'est-ce pas ?»
Oui, je pense. Enfin, c'est ce qu'il me semble. Tout dépend bien entendu de l'évolution politique du pays, des autorités qui seront en place. Nous serons, pour notre part, toujours disposés à travailler. Mais, je pense que, normalement, le travail de la Commission devra aller au-delà des élections présidentielles».
Pour clore l'épisode 2, il est évident que le scénario adopté par le responsable de la Commission de la réforme politique est d'élire dans une première étape un nouveau président. En effet, se prononcer le 2 février 2011 sur l'option à privilégier bien avant la première réunion des experts juristes et bien avant la consultation populaire qui doit avoir lieu, ne fait que biaiser la soi-disant mission de la Commission. On disait que les dés sont pipés et le grand jeu est déjà fait. À la lumière de ce constat, le devoir de réserve (ne pas s'exprimer à l'avance sur les options) qui doit être respecté dans un tel processus a été sacrifié pour des raisons inconnues. Il est ainsi facile de constater qu'un tel comportement constitue la deuxième mine traduisant non seulement un vice de procédure fatal mais aussi un problème de fond à propos de la mission et du rôle de la Commission pour la réforme politique. À ce stade, la Commission n'avait en aucune façon à se prononcer, par la voix de son président et avant même le début des consultations sur un éventuel scénario. Elle a ainsi outrepassé sa mission et son rôle.
Episode 3 : Vers un conditionnement au sens de Pavlov de l'opinion publique
Le scénario d'élire dans un premier temps un nouveau président affirmé à l'épisode 2 se consolide et se réaffirme avec force à l'épisode 3, comme l'illustre les déclarations du professeur Ben Achour (Reuters – 10 février 2011) :
«Mon opinion personnelle est qu'il faut que nous ayons une élection présidentielle dans un délai maximum de six mois»
«Nous avons un seul objectif et nous ferons tout pour atteindre cet objectif: l'objectif est d'organiser de véritables élections pour la première fois en Tunisie».
«C'est l'objectif fondamental. Je ne reculerai pas d'un pouce par rapport à cela. Je démissionnerai si jamais on oublie cet objectif».
À son avis personnel, a-t-il ajouté, la prochaine étape après l'élection présidentielle devrait être la dissolution des deux chambres du Parlement et la tenue d'élections législatives pour élire une assemblée législative et constituante.
«La dernière phase sera la préparation d'une nouvelle Constitution qui sera préparée par l'assemblée constituante et permettra à la Tunisie de se diriger vers une Deuxième République».
«Sa commission, a-t-il ajouté, ne publiera ses recommandations sur les étapes à suivre qu'après consultation de tous les groupes concernés, y compris du mouvement islamiste Ennahda, interdit sous Ben Ali.» (Nous soulignons.)
Il est paradoxal de noter que tout en réaffirmant le scénario priorisé, le responsable dit vouloir ne pas publier les recommandations de la Commission avant que le processus de consultation se termine.
Tout porte à croire que le processus a mal démarré, car le responsable de la Haute commission de la réforme politique privilégie et parachute un scénario sans avoir encore exploré les attentes du peuple et les forces vives tunisiennes. En jouant un tel rôle, la Commission se prend pour une institution qui offrira une démocratie providentielle.
Si «la demande de démocratie nous vient du fin fond de notre société» (propos du professeur Ben Achour, La Presse 2 février 2011), il faut donc aller lire les besoins réels et les attentes des citoyens(nes) et consulter massivement les Tunisiens(nes) avant de leur offrir un scénario prêt-à-porter et préfabriqué dans une tour d'ivoire.
Il est ainsi aisé de constater une lacune majeure sur les plans méthodologique, éthique et moral de la Commission. En répétant sans arrêt et en insistant sur une option privilégiée, le professeur Ben Achour pose lui-même une troisième mine et sape ainsi la crédibilité et le fonctionnement de sa Commission. «À force de répéter une hypothèse, elle devient une vérité».
Episode 4 : Le summum de la confusion
Dans une conférence de presse improvisée le 23 février 2011 (La Presse, 23 février; Kapitalis, 23 février; Webmessager.com, 23 février, La Presse, 24 février), le professeur Iyadh Ben Achour, persiste et signe. Il se prend pour l'homme providentiel investi d'une mission : offrir au pauvre peuple tunisien la démocratie sur un plateau d'argent. En effet, il propose trois nouveaux scénarios venant s'ajouter à sa première option préférée, tel que précisé dans les épisodes 2 et 3. Parallèlement, le professeur Ben Achour affirme : que la Commission n'a pas la prétention de se substituer au peuple ; que la Commission ne publiera pas ses recommandations avant l'achèvement du processus de consultation, etc.
De telles affirmations sont contradictoires avec les agissements réels et les faits observables. Alors que la consultation ne fait que débuter et que les tâches de la Commission ne sont pas encore définies par un décret-loi, le professeur Ben Achour parachute soudainement des scénarios et des choix dont l'origine est mystérieuse.
Dire quelque chose et faire le contraire, c'est perturbant. Affirmer des beaux principes et ne pas les respecter sème la confusion et le flou. De quel droit et sur quelle base morale et éthique, une poignée d'experts juristes improvisent des choix et décident de régler les destinées politiques du peuple tunisien ? A-t-on écouté le peuple qui veut être écouté ? A-t-on lu ses besoins et ses véritables attentes ? A-t-on consulté les populations dans les régions ?
Un tel comportement est inapproprié, car il oriente les résultats vers une direction voulue et formate au sens de Pavlov l'opinion publique à des options pensées et véhiculées d'en haut vers le bas. Un tel comportement est contradictoire avec l'affirmation du professeur Ben Achour qui dit que «désormais, la démocratie est intériorisée par le peuple». Cette belle théorie est loin d'être appliquée par celui qui la théorise.
L'analyse et la synthèse des différentes déclarations du responsable de la Commission pour la réforme politique ont ainsi permis de mettre en relief plusieurs dysfonctionnements et lacunes graves : méthodologie inappropriée, mission et rôle mal définis et incompatibles avec la pratique démocratique participative, absence de tableau de bord et de feuille de route, absence de définition des tâches de la Commission, devoir de réserve non observé, informations peu disponibles et changements en fonction de la conjoncture. La Commission, laquelle est composée d'une brochette d'experts (professeurs universitaires) choisis par un ex-doyen, n'agit pas selon les règles de l'art et les principes élémentaires du management et de la gouvernance. Toutes ces anomalies majeures font en sorte que la Commission sécrète ses propres contradictions propices à son autodissolution. Parachuter trois nouveaux scénarios dans une conférence de presse improvisée le 23 février 2011 est une quatrième mine qui sape la soi-disant mission de la Commission et son fonctionnement. Loin de convaincre l'opinion publique, les précisions fournies ne font qu'amplifier le flou et la zizanie, comme l'illustre une caricature très originale «une photo vaut mille mots» accompagnant le texte du journaliste M'hamed Jaïbi, «Transition démocratique et réforme politique : retour à la case départ» (La Presse, 24 février 2011).
Il est donc inutile de fantasmer pour savoir qui veut miner la mission de la Commission. Elle est minée dès le début de son institution et elle se mine elle-même quotidiennement.
Par ailleurs, sur le plan des communications, la synthèse des déclarations du professeur Ben Achour met en relief l'absence flagrante d'un fil conducteur précis et d'une vision articulée. On est porté à croire que la technique de la confusion est utilisée dans le discours où on emploie des formulations pour dire quelque chose en prétendant ne pas le dire ou ne pas vouloir le dire. Pour illustrer ce point, voici un exemple : le responsable opte pour un premier scénario qu'il privilégie en disant que c'est son point de vue personnel. Il le réaffirme ensuite deux fois consécutivement dans le temps tout en disant qu'il ne divulguera pas les recommandations. Il parachute ensuite trois autres scénarios tout en disant que la consultation ne fait que débuter. Il finit par dire que les tâches de la Commission seront prochainement établies par un décret-loi. Chercher le fil conducteur devient impossible, car il n'y en a pas.
La stratégie de communication employée inconsciemment ou consciemment commence par soulever tellement de la poussière à un point que tout le monde devient incapable de voir. Face à cette confusion, le peuple, après avoir réussi à passer à travers le mur (de la peur), à coups de tête et de sang de martyrs, se demande à juste titre ce qu'il fera dans la cellule d'à-côté, où sa destinée est déjà réglée d'avance par un comité d'experts juristes.
À la lumière de ce qui précède, il est dans l'intérêt du bon fonctionnement du processus démocratique de laisser au peuple tunisien l'opportunité de définir de façon autonome des choix politiques conformément à ses aspirations légitimes. Vu que c'est un peuple responsable, mature, intelligent et innovateur, il n'est pas nécessaire de l'éclairer ni, à plus forte raison, de choisir à sa place.
Le responsable de la Commission, le professeur Ben Achour, sait sans aucun doute que «le mieux est l'ennemi du bien». Il a tellement à cœur l'avenir démocratique de la Tunisie à un point qu'il veut et qu'il tient à le définir et à le déterminer seul avec une équipe restreinte d'experts juristes.
Pour conclure, en ce grand moment historique, l'intérêt général de la Tunisie exige que l'élaboration des fondations d'une Tunisie libre, démocratique et digne soit l'affaire d'un Conseil national représentatif de protection de la révolution et d'une Assemblée constituante représentative. Vu l'importance capitale du processus de rénovation politique, il n'est pas normal de laisser à une commission dont la légitimité est douteuse et à une poignée d'experts juristes, malgré le respect qu'on doit à leurs compétences et leurs orientations personnelles, le soin de choisir seuls la voie à suivre.
(Ph.D. Professeur titulaire)
(Directeur, doctorat en management de projets-directeur Revue Organisations & Territoires -,responsable du Laboratoire d'analyse des innovations et de soutien aux entreprises (CAISEN), Université du Québec à Chicoutimi, Québec, Canada)


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