Depuis la révolution, une incertitude générale règne sur tous les secteurs économiques, manque de visibilité et d'informations précises a généré une sorte de stagnation de l'activité. Cette incertitude a fortement marqué le marché financier qui a connu une suspension des cotations à deux reprises. Alors qu'il a repris aujourd'hui son cours, on ne peut toujours pas parler d'une situation rassurante et des Interrogations quant à l'avenir de la région demeurent en suspens. M. Adel Grar, président de l'Association des Intermédiaires en Bourse (AIB) et p.-d.g. de Amen Invest, procède ainsi à un diagnostic précis de la situation actuelle du marché financier et expose et analyse les différentes fluctuations connues par le marché et les perspectives futures de l'économie nationale. Le responsable précise que “depuis le 14 janvier, la Bourse de Tunis a suspendu les cotations deux fois, la première a duré deux semaines à partir du 17 janvier, la seconde a duré une semaine et a eu lieu à la fin du mois de février. Il faut rappeler que depuis la fin du mois de décembre, le marché financier s'est engagé dans une baisse significative après sept années de hausse continue. La cause de cette baisse est la mise en place de la nouvelle taxation des plus values réalisées en Bourse, une taxation instituée par la loi des finances pour la gestion 2011. Pendant la révolution, à savoir pendant les deux premières semaines du mois de janvier, le marché a continué son glissement dans l'incertitude totale. Une chute due essentiellement au manque de visibilité, au flou politique qui régnait alors et à l'absence d'informations précises. Le CMF a, ainsi, suspendu les cotations le 17 janvier afin de permettre aux investisseurs de voir plus clair et aux sociétés cotées d'estimer les dégâts”. Pour lui, “la reprise a été accompagnée par une campagne de communications financières organisées à l'initiative de l'AIB afin de donner aux investisseurs des informations plus précises et une appréciation plus exacte de la valeur des actions cotées. D'autant plus que les intermédiaires en Bourse avaient du mal à donner des conseils à leurs clients en l'absence de visibilité. Les communications financières ont, ainsi, aidé la Bourse à reprendre sa dynamique”. Il reconnaît par ailleurs que vers la fin du mois de février et suite à la démission du premier ministre, “le marché financier a repris sa morosité et l'incertitude n'a pas tardé à reprendre le dessus. Fait qui a poussé le CMF à suspendre encore une fois les cotations avec l'accord de la profession”. Toutefois, “après la désignation d'un nouveau gouvernement, l'activité du marché a repris avec un volume plus solide passant de 2 à 6 millions de dinars en moyenne par jour. Résultat plutôt rassurant, même si ce volume reste faible par rapport aux 12 millions de dinars par jour réalisés courant 2010”. Actuellement, précise -t-il, “ nous sommes en train de suivre de près l'activité du marché financier et nous agissons en permanence pour que l'information financière soit transparente et fluide”. Cette transparence et cette fluidité auraient pour mérite d'aider le marché financier à retrouver son dynamisme et de contribuer à la reprise économique qui nécessite une démarche sûre et progressive. D'ailleurs, M. Grar note que “sur le plan économique, j'aurais souhaité qu'on capitalise sur les acquis déjà existants et qu'on redresse la situation sans ralentir la roue, surtout au niveau des relations économiques de la Tunisie avec le reste du monde”. Aujourd'hui, “la révolution tunisienne a ouvert de nouveaux horizons qu'il ne faut surtout pas tarder à explorer. Par ailleurs, on remarque que l'activité économique a été suspendue pendant une longue période, fait qui a engendré la perte de beaucoup de marchés. Il est à relever aussi que la situation inquiétante chez nos voisins n'arrange pas les choses et n'encourage point les investissements étrangers en Tunisie et dans la région en général. Tous ces facteurs dictent de se pencher, en priorité, sur la relance de l'économie intérieure en adoptant une double vision : une vision à court terme qui consiste à rétablir la machine économique nationale par un regain de la confiance du consommateur tunisien, en l'incitant à consommer tunisien (plus de sécurité et un discours optimiste et rassurant). A moyen terme, il s'agit de procéder à un diagnostic complet de la politique économique de la Tunisie et de repenser son positionnement à l'échelle régionale et internationale sur les quinze prochaines années”. Il faudrait également “analyser la politique nationale de l'emploi et surtout de l'infrastructure de base et définir à la lumière de ce diagnostic une stratégie à long terme. Pour ce qui est des perspectives du marché financier, on a fait ce qu'on pouvait sur le plan information afin de dynamiser le marché, le problème se rattache, désormais, au contexte régional incertain en Libye et en Egypte pour l'instant et peut-être ailleurs demain. Au fait, l'influence de notre Bourse par ce qui se passe dans les pays limitrophes se situe à double titre : à travers le comportement des investisseurs communs avec la Bourse d'Egypte (qui est fermée depuis deux mois) et à travers l'impact sur les sociétés cotées en Bourse et qui exportent en Libye”. Il pense, enfin, qu'il faut se réorganiser dans la mesure du possible et être plus sensibilisé aux problèmes économiques que nous vivons actuellement, vivre avec les réalités existantes et penser à des solutions qui permettraient de relancer les différents secteurs économiques à l'échelle intérieure.