Par M.B.A*0 Les débats politiques vont bon train, les partis se créent et les droits de l'hommistes veillent. La Tunisie d'après la révolution est un pays vibrant, les projets foisonnent, la culture rayonne, les boutiques fleurissent, les cafés, bars, restaurants se multiplient, les touristes se bousculent et les taxis sont propres… sauf que cette image n'est pas encore réelle, ce n'est qu'une projection virtuelle. Le Tunisien a fait sa révolution avec bravoure, puis s'est arrêté, il demeure au stade de la revendication, il se complaît dans la complainte, il jouit du plaisir de se plaindre comme un enfant capricieux qui tape du pied en disant: Je veux, je veux… La révolution, c'est un mot inventé par Philippe d'Angleterre qui voulait devenir roi pour mieux faire que son prédécesseur, je ne suis pas sûr que nous soyons dans cet état d'esprit aujourd'hui en Tunisie. Une grande absente‑: la femme. Aucun parti n'a été présenté par une femme. Pire, aucun parti n'a un programme féministe. Bien sûr, tous parlent d'égalité hommes-femmes, mais ces dames ont-elles eu plus de postes officiels‑? Y a-t-il eu des statistiques pour identifier les domaines où il y a un déficit de représentation féminine‑? A-t-on remis en question les lois discriminatoires‑? Les femmes accepteront-elles les travaux traditionnellement réservés aux hommes‑? Pourquoi ne voit-on pas d'actions communes, non comme le faisait l'Unft de façon sectaire et hystérique, mais de façon moderne, apaisée. Après les femmes, les artistes ne se montrent pas beaucoup, eux qui se plaignaient de ne pas pouvoir s'exprimer, restent aujourd'hui muets. Pas de nouveaux spectacles, pas d'ouverture de théâtre, les maisons de la culture restent désaffectées et le nombre des musées est ridicule en comparaison des 12.000 musées de France. Les plus incompréhensifs sont les hommes d'affaires, car il y a de bonnes opportunités aujourd'hui pour qui a du capital, et l'Etat accorde facilement des licences. Le capital se cachait de peur de la voracité de la bande au pouvoir, mais aujourd'hui nous sommes un Etat de droit, il n'y a pas de risques. La presse est libre, pourtant je ne vois pas de nouvelles publications qu'on attendait par dizaines, pas de nouvelle radio en dehors de Kalima, pas de nouvelle chaîne de TV. Les journalistes ont attendu des années ce moment, pourtant je ne vois rien de nouveau, d'original, de pertinent. La TV ne nous montre que des débats interminables animés par des journalistes lugubres en présence de responsables stressés qui ne savent plus parler tunisien tant ils pensent qu'ils sont à l'antenne sur Al Jazira. Une exception, il faut l'avouer, pour l'actuel Premier ministre. La jeunesse a fait une révolution pour vivre, créer des associations, des clubs, faire du sport, bousculer les traditions, amener de nouveaux concepts, bref ce que fait habituellement la jeunesse, il faut qu'elle le fasse. Nos intellectuels sont tous devenus des experts du droit constitutionnel, c'est très bien. Mais, ce faisant, ils oublient qu'il existe d'autres débats peut-être aussi importants comme la reconstruction de l'Islam, la nouvelle sociologie tunisienne, les nouvelles méthodes d'éducation et pourquoi pas le droit à la différence. Nous nous sommes tous arrêtés sur le bord du chemin et nous risquons d'oublier que la liberté est un instrument pour une vie meilleure, une vie qu'il faut construire. Le gouvernement est transitoire, il gère plutôt bien les affaires courantes, on ne peut lui demander plus et ce n'est pas son rôle de résoudre tous les problèmes. Le prochain gouvernement ne sera pas formé avant des mois, nous ne devons pas l'attendre, c'est à nous de prendre notre destin en main dès maintenant. Le Tunisien ne doit compter que sur lui-même et s'assumer pleinement comme un homme libre. Alors cessons de gémir, et au travail! *(Gynécologue)