Par Mohamed Jamel Eddine BOUSLAMA & Abou-Séoud MESSADI Jusqu'à présent les 60 et quelque partis politiques tunisiens, y compris le mouvement Ennahdha dans les déclarations médiatisées de ses dirigeants, sont apparemment unanimes sur le Code du statut personnel (C.S.P) vieux de plus d'un demi-siècle. Ce code a reconnu la citoyenneté aux femmes de la société tunisienne sans considération quantitative précise s'entend. Et cette société ne s'en est jamais plainte à notre connaissance, bien au contraire nous en sommes tous fiers. Cependant, nous nous posons tous, acteurs de la société politique et civile, des questions dont les réponses ne sont guère claires. Est-ce que Ennahdha (notez en arabe le nom féminin de ce parti!) va respecter ce consensus? Est-ce qu'elle le respecte déjà aujourd'hui ? Est-ce que le discours tenu par ses leaders n'est pas contredit, à tous les coins de mosquées, par eux-mêmes et par les imams qu'ils ont (démocratiquement ?) fait placer? Démocratie Pire encore. Est-ce que ce mouvement respectera ses engagements "démocratiques" si déjà maintenant il se prend pour seul héritier du RCD en investissant les locaux de ce même RCD pour en faire des locaux nahdhaouis dans certaines contrées? De quelle légitimité ? De quelle légalité ou même légalisme ? Ce mouvement là a-t-il plus de droits que les autres partis ? Nouvelle approche de la démocratie ? Déjà! Classe politique Outre ces questions basiques quant à la moitié-démocratie-femme de la société, et de l'autre, les pratiques visibles maintenant et ici sont on ne peut plus claires : totalitarisme quand tu nous tiens! Et clairvoyance oblige; la classe politique intégralement ne se trompe-t-elle pas de débat ? Ne focalise-t-elle pas uniquement sur le C.S.P pour contredire Ennahdha ? Ne limite-t-elle pas la discussion à la seule plate-bande de la laïcité ? La Tunisie n'a-t-elle pas vécu plus d'un demi-siècle avec l'article 1er de la Constitution de 1959; jusqu'à ce qu'un cacique directeur de feu PSD lance, sinon encourage, le mouvement islamiste à l'université, dans les années 70, pour taper de "la gauche" ou la casser, comme c'est arrivé à l'aile "démocratisante" du PSD lui-même (Congrès de Monastir) ? Projet d'Ennahdha ? Bref, mesdames, messieurs, redressons la barre ! Posons les vraies questions : - Quelles sont vos solutions concernant la relance de l'économie nationale et pas seulement patronale ? - Quelles sont vos propositions pour redresser l'agriculture ? - Quelles solutions préconisez-vous au problème du chômage des jeunes et de la formation professionnelle ? Et les microprojets ? - Quelles sont vos positions et analyses concernant la crise monétaire mondiale qui touche la Tunisie comme elle a touché des pays comme la Grèce et le Portugal ? - Quel est votre programme pour relancer la croissance qui avoisine le niveau zéro ou presque ? - Quelles solutions pour le secteur du tourisme qui représente des investissements énormes déjà faits, source de devises et de centaines de milliers de postes d'emploi directs et indirects? - Quelles propositions avez-vous pour libérer la création culturelle? Ou bien est-elle l'apanage du ciel? - Et la santé, l'éducation, et les caisses sociales ? - Et la coopération internationale, économique et politique etc. etc..? Monopole de l'Islamite Et à ce dernier titre, ces messieurs-dames d'Ennahdha n'accusent-ils pas les autres de francophilie, d'occidentalisme et dans la foulée, d'ignorance totale de la culture arabo-islamique? Ont-ils oublié les années passées à Londres ou ailleurs en exil doré? Mais, tout simplement, nous leur dirons ouvrez les yeux, cette culture arabo-musulmane, qui appartient à toute la Tunisie, a aussi fait ses beaux jours en Europe et elle a même servi de base aux siècles de la renaissance et à la domination actuelle de l'Occident. Les Ibnou Sina, Ibn Al Jazzar, Ibn Khouldoun ou Ibn Rochd appartiendraient-ils à la seule Ennahdha ? Mais n'oublions pas que pendant ces temps les "ignares", fils de cette même culture arabo-musulmane, empêchaient tout IJTIHAD, préparant le terrain à l'extrême droite fasciste, européenne compris. Celle-ci limite aujourd'hui quasiment son discours au seul problème de l'immigration, comme celle tunisienne qui limite son seul programme à la question de la femme! Seul cheval de bataille pour enclencher une marche arrière, une marche en arrière ? Et pourquoi pas aussi sur toutes les questions de gouvernement et de développement que nos nahdhaouis n'estiment pas utile de nous dire aujourd'hui ? Leur seul discours n'en cacherait-il pas tant d'autres ?