Avec le retour, six ans après, de l'Etoile Sportive de Béni Khalled en Ligue 1, le foot du Cap Bon retrouve ses lettres de noblesse En fait, c'est un football qui fonctionne à courant alternatif, incapable de s'installer sur la durée parmi l'élite. Le CS Menzel Bouzelfa, le CS Korba et l'ES Béni Khalled ont pu avec les moyens de bord remédier aux carences du représentant du chef-lieu du gouvernorat, le Stade Nabeulien, incapable de rejoindre une seule fois la première division. Seulement, l'aventure de ces rescapés durait généralement le temps d'un songe d'été. Dans le genre «une saison, et puis s'en va!». L'équipe khalladie représente l'exception : une première accession en 1993-1994, suivie d'une autre promotion en 1998-1999. Avant de briser la règle en enchaînant deux saisons au plus haut niveau entre 2003 et 2005. Autant dire que la «Sbika» (surnom du club consistant en une reprise approximative des initiales en français) a réussi le meilleur parcours dans l'élite parmi les représentants de la presqu'île du Cap Bon, se permettant le luxe de remporter en 2001-2002 un trophée certes honorifique, mais suffisamment valorisant : la coupe de la ligue Promosport. C'était la génération des Makram Tajouri (qui portera par la suite la tunique du Club Africain, composant avec le Togolais Salou Tadjou un axe défensif invulnérable), Mounir Chihi, Slim El Hani, Charles Mbay… «Notre destin toujours entre les mains» Cette saison, les clignotants étaient au vert. Dès les trois coups, une victoire ramenée de Monastir, contre un ancien pensionnaire de la L1 donnait parfaitement le ton des ambitions du club cher à Saïd Boujebel lequel n'a guère lésiné sur les moyens pour mettre en place un ensemble compétitif et capable d'exaucer le vœu des fans rouge et blanc. L'expérience des Monem Rammah, Wahid Ben Mohamed, Chedly Chaâr, Anouar Sahbani et Frej Sassi est mise au service des jeunes loups Bilel Hergam, Hosni Bouhani, Hamdi Chourabi, Khaled Ben Chaâbane, Anis Trabelsi… Le tout encadré par un technicien appartenant à la nouvelle vague, Lotfi Kadri, le frangin de Jalel qui avait débuté la saison sur le banc de l'Union Monastirienne, l'autre lauréat de la L2. Durant de longues journées, l'ESBK caracola en tête du classement, prenant parfois une avance conséquente sur le rival usmiste. Mais, au bout du compte, elle avait la profonde conscience que la course se fait par rapport au troisième du classement. La longue trêve observée par la compétition allait rompre l'enchantement et briser net le train d'enfer mené par les copains du jeune keeper Wissem Helal, prêté par l'Espérance de Tunis et qui va rejoindre bientôt l'ES Zarzis dans le cadre du transfert du portier international Aymen Ben Ayoub au bénéfice du club de Bab Souika. «Nous savions dès le départ que la phase retour allait être compliquée, les clubs menacés par la rélégation se transformant subitement pour devenir intraitables, rappelle Lotfi Kadri. Dans les faits, cela s'est concrétisé par une baisse de régime notoire entre les 20e et 23e journées. Mais nous avons pu nous appuyer sur les sept à huit longueurs d'avance que nous avions accumulées un certain temps pour maintenir notre position parmi les deux premiers. Béni Khalled a toujours eu son destin entre les mains, n'attendant de cadeaux de personne», analyse-t-il tout à son bonheur. «Il nous a fallu passer trois mois pénibles sans compétition. Néanmoins, le club a assuré dès le départ les conditions de la réussite : un potentiel humain renforcé avec des recrues ciblées, de longues mises au vert, un excellent parcours durant la phase aller», observe-t-il. Le nul ramené dimanche dernier de Jendouba (1-1) ajouté à la défaite du 3e, l'AS Djerba (3-0) face au SC Moknine a propulsé le club khalladi parmi l'élite, deux journées avant la clôture du championnat. Maintenant, d'autres défis attendent l'ESBK, ceux de l'exigeante Ligue 1 : un effectif à booster, un stade Habib-Tajouri à réaménager, une préparation foncière à entamer dans les meilleurs délais et, surtout, de nouvelles sources de financement à dénicher. Le tout Béni Khalled ne peut pas, en tout cas, ne pas avoir aujourd'hui en pleines fêtes de promotion, une pensée émue pour le regretté Hédi Boujebel, l'ancien président qui avait conduit l'ESBK en Ligue 1 au début de ce millénaire. Car on ne vous l'a pas dit, l'Etoile Khalladie est une affaire de famille. Depuis la nuit des temps, la famille Boujebel a toujours su apporter un soutien financier décisif et une gestion efficace au porte-drapeau du sport dans cette coquette cité. Cette fois, la «Sbika» veut s'inscrire sur la durée en Ligue 1. Il n'est plus question d'y faire de la simple figuration. Toujours faudrait-il y investir les moyens et conjuguer les efforts.