Par Rejeb HAJI Les pouvoirs publics devraient continuer également à mettre l'accent sur les soins préventifs qui ont pour objectif de préserver la santé et prévenir la maladie. Aussi, une information médicale de base, relayée par une accélération des programmes de prévention et par des campagnes de sensibilisation, orienterait les soins de première ligne et désengagerait de ce fait les hôpitaux. Quant aux professionnels de la santé, ils détiennent le monopole de la consommation des soins et il est utopique de penser contrôler le volume de leurs activités. D'ailleurs la nomenclature actuelle sous forme de clés est en déphasage par rapport à l'évolution des techniques médicales. Elle est inadaptée à un suivi d'activité et à l'augmentation du niveau de vie des citoyens. Il est vrai qu'en dehors de toute idée tarifaire, l'élaboration de catalogues des actes médicaux par nature contenant l'ensemble des informations nécessaires à la description et au suivi de l'activité médicale a accompagné la réforme de financement des hôpitaux dans les pays développés. Elle a abouti à un coût unitaire par groupes homogènes de maladie. L'assurance maladie telle qu'elle a été conçue et appliquée à la hâte n'est-elle pas en fait la cause et la conséquence des dépenses de santé ? Agir dans différentes directions pour atténuer les coûts : la responsabilisation du secteur privé et son encouragement pourraient alléger le fardeau de l'Etat. La carte sanitaire, destinée à définir des secteurs et à appliquer des normes d'équipement dans chacun d'eux pour canaliser l'accès aux soins et agir sur les facteurs de gaspillage, devrait être réactualisée. Mais l'hôpital demeure l'élément essentiel sur lequel repose toute la structure du système de santé moderne grâce à ses capacités d'accueil, souvent incontrôlables et par la notion de service public, souvent peu précise, qui lui est confiée. Il demeure la pièce maîtresse de dépenses d'où des tentatives pour le soumettre aux lois du marché pour contrôler ses coûts et évaluer ses performances. Même en s'appuyant sur des technologies de l'information et de la communication pour faciliter et améliorer à la fois la prévention, le diagnostic, le traitement ainsi que la gestion de la santé, on ne saurait attendre des miracles. Tout le monde reconnaît, aujourd'hui, que les comparaisons sont indispensables pour imaginer une nouvelle dynamique de la protection sociale. Même si elles sont délicates à conduire, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas interdit de s'inspirer des réussites des autres, voire de les adapter en fonction de situations économiques et politiques propres. Il faut voir ce qui se passe ailleurs et c'est fondamental. Il demeure évident que les examens préalables des expériences d'autrui sont toujours utiles pour améliorer les performances et faciliter les réformes. Si la comparaison avec les pays développés ne permet pas de tirer des conclusions quant au devenir du système sanitaire, on peut conclure qu'elle favorise la recherche des voies et moyens à mettre en œuvre pour garder le surcoût des dépenses de santé dans des limites raisonnables. Le slogan de la gratuité ne pourrait qu'empirer la situation que nous connaissons. L'augmentation de la TVA ne pourrait qu'être aux dépens des plus démunis. Il n'y a pas de miracle pour le financement sanitaire : les demandes de moyens supplémentaires ne peuvent provenir que des fonds procurés par les pouvoirs publics, les organismes de sécurité sociale et les patients. Pour le moment le budget de l'Etat supporte la majorité des dépenses. Mais notre " santé est malade et la guérison exige avant tout un inventaire précis des symptômes pour bien appliquer les mesures thérapeutiques." Pour cela un retour à la clarification des fonctions est nécessaire : celui de l'Etat et celui du privé, chacun selon ses fonctions et ses prérogatives. Une nouvelle définition opérationnelle du rôle effectif et respectif de chacun. Une médecine reconnue de pointe doit être redéfinie, le plein temps intégral trouve aujourd'hui plus qu'auparavant sa raison d'être. A côté des réformes de structuelles, un appel au cœur et à la solidarité en impliquant les " bien-portants " pour entourer la santé de bénévolat et de fondations. La création d'un réseau de plusieurs organismes aiderait à alléger le fardeau financier de l'Etat, surtout pour les malades nécessiteux. A cet effet, une journée de solidarité, celle qui a remplacé la journée chômée du défunt sept novembre, pourrait réconcilier le citoyen avec sa santé. Le système financier lui-même dont on ignore la situation réelle des salaires distribués doit, en contribuant, se disculper vis-à-vis de la société. L'on a découvert récemment que les salaires des plus hauts responsables se comptent par dizaines de millions par mois, la solidarité voire le comportement citoyen exige que les jetons de présence ne puissent plus être distribués mais versés dans un fonds de solidarité pour l'amélioration des hôpitaux. Outre l'instauration d'un impôt de solidarité santé, non pas celui du 26-26 dont tout le monde espère encore connaître la destination des fonds amassés souvent par la contrainte, un impôt sur la fortune pourait aider à alléger le fardeau de l'Etat. Imaginons pour conclure et pour être plus efficace, une mission paraphée à la fois par le Président de la République et par le Premier ministre chargeant une personnalité tunisienne reconnue et confirmée pour son excellence de faire un diagnostic de notre système de santé et proposer des remèdes. Imaginons que l'heureux élu s'entoure d'une équipe, non pléthorique, d'élites pluridisciplinaires provenant de toutes les composantes de la société civile, auditionnant toute personne jugée utile pour la réalisation de sa mission, ces quelques propositions et d'autres trouveront alors le cadre de concertation appropriée. Nous contribuerons ainsi à un changement de style et une nouveauté dans la gouvernance. Nous préparerons de ce fait l'avenir en travaillant ensemble et en se référant au vécu. La tâche est passionnante. Il y va de la santé de nous tous ! C'est évident.