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La fin de la Jamahiriya !
La lettre du jeudi
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 08 - 2011


Par Pr Khalifa Chater
La bataille de Tripoli sonne le glas de la Jamahiriya, la plaisanterie tragique de l'histoire. L'institution de l'improvisé a permis à son fondateur d'établir un régime atypique et bizarre, au-dessus de la loi, qui intrigue et dérange. Ses revirements spectaculaires, suite aux révisions tragiques de son discours et de ses positions stratégiques, au gré des événements, transgressaient ses principes fondateurs. Comment procéder à cette étude de cas déconcertant du “réalisme utopique”, sinon de “l'ambiguïté destructive”. Qu'il nous suffise de rappeler sa confusion entre la résistance et le terrorisme, le tiers-mondisme et le pragmatisme anti-idéologique et les schémas caricaturaux du fameux Livre vert.
Le leader post-politique, “l'exemple le plus insolite du despote oriental contemporain” (Pierre Rousselin, Le Figaro, 21 février 2011), exerçait son leadership sous l'emprise “de l'opium de la grandeur” (expression de Nizar Kaawane, membre du Mouvement du 17 février, Al-Jazira, 21 août). Vivant son rêve, Kadhafi a réussi la gageure d'un régime cocasse, d'un “Etat de masse”, dirigé par sa famille et son clan. Drôle de démocratie unilatérale, occultant tout vis-à-vis, tout interlocuteur et, bien entendu, tout contre-pouvoir ! L'édifice singulier devait s'effondrer comme un château de cartes.
L'étape laborieuse des négociations : Prudence stratégique, le Conseil national de transition libyen était conscient de la nécessité d'engager la bataille de Tripoli, qu'il a voulu éviter, sinon retarder. Il craignait de soumettre la population de la capitale, otage des séquelles de l'establishment de Kadhafi, à un bain de sang et des combats de rue qui n'épargneraient personne. Les négociations officieuses engagées montraient sa préférence de la solution de l'exil, qui aurait permis de faire l'économie d'une guerre. Kadhafi et son establishment auraient été tentés par la recherche d'un lieu de refuge, scénario qui aurait permis d'échapper aux verdicts des tribunaux révolutionnaires.
Des négociations ont bel et bien eu lieu, les 14 et 15 août, à Djerba et Tunis. Elles sont confirmées par les informations recueillies auprès des témoins oculaires, cités par l'Agence tunisienne (TAP, 16 août), l'arrivée à Tunis, lundi 15 août, de l'émissaire de l'ONU, Abdel Elah Al Khatib, chargé du dossier et la confirmation par Dominique de Villepin, l'ancien Premier ministre, de sa présence à Djerba, lundi 15 août, avec des représentants du régime et de l'opposition (Les mystérieux voyages diplomatiques de Villepin, Le Parisien, 18 août 2011). Mais ces informations fragmentaires ne permettent ni de connaître les participants à ces discussions, ni leur teneur. Faut-il s'en étonner ? Les démentis des protagonistes attestent cependant l'importance du non-dit et la gravité des enjeux. Alors que les insurgés posaient comme condition sine qua non le départ de Kadhafi et de son establishment, le clan adverse qui ne veut pas admettre sa défaite, essaie de gagner du temps, adoptant la tactique de la fuite en avant. Les positions irréductibles des négociateurs et le refus de Kadhafi de prendre acte de sa défaite ont mis à l'ordre du jour la bataille de Tripoli et finaliser la stratégie adoptée.
La bataille de Tripoli, une stratégie globale de consensus : Elle fut engagée six mois après le début du soulèvement, cinq mois après les premières frappes de l'Otan sur la Libye. Le choix de l'heure atteste le murissement de la situation et le long travail de préparatifs et de concertation avec tous les acteurs, avant la mise en œuvre de cette opération d'envergure, pour la prise du dernier bastion du colonel Kadhafi. La ville fut encerclée et prise en étau, avant l'assaut final. Après quelques mois d'enlisement, les insurgés ont ouvert plusieurs fronts à l'ouest, à l'est et au sud-ouest de la capitale et attaqué les villes les plus stratégiques. Ayant pris le contrôle de la ville de Zaouia, à 45 km à l'ouest de Tripoli, ils ont pu disposer de sa raffinerie, la source essentielle de carburant pour la capitale. D'autre part, ayant assuré le contrôle de la ville côtière de Zliten, à 150 km à l'est de Tripoli, ils ont coupé la voie vers la frontière tunisienne. L'étau se resserra autour de Tripoli. Autre donnée stratégique, l'Alliance atlantique intensifia ses raids sur les environs de la capitale libyenne, alors que les rebelles s'en approchaient.
Stratégie opportune, et qui dément toute perspective de partition, la résistance a estimé qu'il revenait aux insurgés de la capitale et de l'Ouest de prendre Tripoli. Détournant la surveillance de l'establishment, les résistants de Tripoli, armés discrètement par leurs alliés, sont sortis de leurs centres de ralliement, les mosquées, samedi après la prière du couchant. L'effet de surprise leur a permis de prendre possession des quartiers du voisinage et de se diriger vers le centre de la ville. Les insurgés bénéficiaient, bien entendu, de la couverture aérienne de l'Otan. La vacance du pouvoir aidant — le leader et les siens réfugiés à Bab El-Aziziya ou dans leurs cachettes hors de la capitale assuraient une direction de distance — les bataillons de Kadhafi furent prompt à déposer les armes. Les habitants du voisinage et des trois villes de l'ouest rejoignirent ces avant-gardes constitués par les résistants tripolitains. L'entrée le 24 août dans le complexe fortifié de Bab El-Azizia et les résidences de Kadhafi paracheva la libération de Tripoli.
Les images diffusées par les télévisions ont montré la prise de la place Verte, lieu symbolique où les partisans de Kadhafi se rassemblaient depuis le début de l'insurrection à la mi-février. La foule en liesse, agitant des drapeaux rouge, noir et vert, aux couleurs de la rébellion, qui salua l'événement, montrait que Tripoli adhérait à l'insurrection. Prise en otage, elle agissait, de concert avec les révolutionnaires du 17 février, dans la discrétion absolue que requerrait sa situation.
La Libye tourne la page de Kadhafi : L'ère de l'après-Kadhafi a bel et bien commencé. Les éventuels poches de résistance, non encore neutralisées, fournissent, certes, à l'establishment mis en déroute un sursis éphémère. Mais elles ne peuvent remettre en question la victoire définitive des révolutionnaires, qui est en train de s'accomplir. La guerre médiatique, engagée par des survivants du régime, telle l'apparition, lundi 22 août, de Saif El-Islam, son fils, démentant la défaite du régime, fut une tentative désespérée pour sauver la face et entretenir l'illusion.
Fait significatif, la victoire de Tripoli s'est accomplie dans le respect de l'ordre révolutionnaire. Les mots d'ordre de Moustapha Abdeljalil, président du Conseil national de transition (CNT), organe politique de la rébellion libyenne, ont été explicites. Il a recommandé aux insurgés, le jour même du déclenchement du soulèvement, de “protéger la vie et les biens de la population”, mais également de “protéger les institutions et les biens publics”. Il leur enjoint, par ailleurs, de ne pas piller et de “traiter avec justice” tous les soldats du régime qui seront fait prisonniers ou se rendront. Ces recommandations ont été, pour le moment, prises en compte, écartant le risque d'anarchie.
Priorité absolue, l'Etat libyen doit se restructurer, ou plutôt se construire, dans une totale pénurie institutionnelle. La chose n'est certes pas aisée. Mais la communauté internationale doit faire le pari sur la résistance qui a réussi à mettre sur pied la stratégie de la conquête territoriale progressive du pays et son couronnement par l'engagement de la bataille de Tripoli, par un traitement pertinent de consensus insurrectionnel. La découverte de la liberté nécessitera un dépassement de soi, une transgression des états d'âme, l'identification lucide des enjeux et des défis, pour réinventer les modes de gouvernance souhaités et les mécanismes de pouvoir identifiés, afin de créer, à partir d'un socle défaillant, l'Etat démocratique et la société civile citoyenne. Nous y reviendrons.


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