Le 23 octobre 2011 restera à jamais gravé dans la mémoire des Tunisiens, tous âges et toutes couches sociales confondus. Pour la première fois de son histoire ancienne et contemporaine, le Tunisien, considéré il y a quelques mois comme sujet mineur, politiquement parlant et non comme citoyen à part entière, s'est prononcé librement et dans une entière transparence pour ceux et celles qui baliseront le chemin. Chacun selon ses convictions pour une Tunisie juste, égalitaire, démocratique et libre. A Nabeul, ce dimanche 23 octobre, climat printanier aidant, les électeurs de la cité des Potiers se sont rendus en grand nombre aux différents bureaux de vote répartis à travers la ville pour accomplir un droit et un devoir, jugés indispensables par tous les citoyens qu'on a croisés dans les différents coins de la ville. Révolus les temps des faux semblants des élections orchestrées par les anciens ripoux du PSD et du RCD, s'accordent tous les électeurs. Ce qui met du baume au cœur, c'est que les électeurs ont fait montre d'un sens civique aigu, d'une maturité prononcée et d'une prise de conscience exemplaire pour l'accomplissement de ce devoir historique. A Bir Challouf, à Lahwach, à la place des Martyrs, au centre Ibn Khaldoun, les électeurs, dans une ambiance sereine de gaieté et de bonne humeur, ont fait la queue pour élire leurs candidats, parfois pendant plus de deux heures, sans faire grise mine. Quelques témoignages recueillis au cours du scrutin dénotent que le Tunisien n'a plus besoin d'une «assistance politique» pour éclairer sa lanterne dans ses choix économiques, politiques ou sociaux. Mohamed K., électeur au centre Ibn Khaldoun affirme : «Que l'on soit du PDP, d'Ettakatol, du Poct ou d'Ennahdha, l'essentiel, c'est que nous avons traduit, dans un respect réciproque des différentes sensibilités politiques, ce que nous avions sur le cœur pendant plus d'un demi-siècle». Un autre électeur renchérit : «Le peuple tunisien est majeur et vacciné. Certes, le foisonnement des partis politiques et des listes indépendantes a failli faire perdre le nord à bon nombre d'électeurs mais au fil des jours de la campagne électorale, cet encombrement du paysage politique s'est relativement dégagé». Le président d'un bureau de vote à Bir Challouf témoigne: « L'affluence des électeurs a commencé tôt le matin. La place du centre des élections était noire de monde dès avant sept heures du matin. L'ambiance était calme et sereine…». 16h00 : visite du centre des élections de la place des Martyrs réservé aux non-inscrits. Même affluence et même ambiance. Quelques observateurs étrangers suivent scrupuleusement l'opération de vote. Demandant l'avis de l'un d'entre eux, en l'occurrence Mme Betty Mc Callum, du Congrès américain (Etat du Minnesota), elle souligne que «les élections se déroulent dans d'excellentes conditions. Le peuple tunisien a exprimé aujourd'hui 23 octobre sa détermination et sa volonté d'épouser la liberté et la démocratie. Les votants, ajoute-t-elle, avec lesquels j'ai parlé ont pris les choses très au sérieux et ont accompli leur devoir convenablement. Et de conclure : «C'est un grand honneur pour moi d'être en Tunisie au cours de cette journée historique». 17h30 : retour au centre Ibn Khaldoun. Ledit centre ne désemplit pas et les files d'attente sont encore longues. Certains votants sont encore indécis sur le choix de leurs candidats. M.Z., père de famille, avoue: «Les élections se sont déroulées dans les règles de l'art. Tout un chacun a pu exprimer librement son choix. Mais, ajoute-t-il, pourvu que tous les esprits s'apaisent après les élections et que les prétendants à l'Assemblée constituante se plient aux résultats des urnes». 19h00 : les portes de tous les centres de vote sont closes, les directeurs des bureaux prennent une pause de trente minutes avant de commencer l'opération de dépouillement. Vive la Tunisie! Vive la République !