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D'un film à l'autre: épisodes de la transition
Le cinéma des femmes dérange
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 10 - 2011

Il y a plus d'une raison de rapprocher deux affaires qui ont concerné deux films (Laïcité inch'allah et Perspépolis) ayant fait sensation au cours de cette transition. Le film de Nadia El Fani, intitulé d'abord Ni Dieu ni maître, est à l'origine d'un premier épisode. Il est programmé un dimanche de mai, par l'association Lam echaml (Unissons-nous) dans le cadre des débats autour du thème : «Touche pas à mon artiste». La projection est perturbée par une foule agressive qui, pour empêcher la séance, n'hésite pas à s'attaquer aux spectateurs, aux responsables et au bâtiment. Même si le film est projeté et discuté, les suites sont graves : on s'aperçoit que certains attaquants avaient de fausses barbes, que la police a tardé à intervenir. On enregistre surtout que les protestations pacifiques des organisateurs dans les médias, les manifestations de rue et le communiqué du ministère de la Culture condamnent certes, mais ne parviennent pas à maintenir l'existence de la salle de CinémaAfriCart. Le propriétaire refuse de renouveler le bail, privant ainsi la Ville de Tunis de la seule salle de cinéma d'art et d'essai existant à Tunis depuis des années. De son côté, pour apaiser la tension, la réalisatrice remplace l'ancien titre du film par son sous-titre : Laïcité inch'allah.
La deuxième affaire concerne la projection de la version dialectale de Persépolis, le 7 octobre par Nessma TV. Pour une chaîne à vocation et à public maghrébins, la programmation d'un film à succès projeté en version originale à Tunis à sa sortie en 2007, depuis deux semaines à l'affiche de la salle Alhambra de La Marsa, et le soir du même vendredi dans la salle Madart de Carthage, découle d'une logique éditoriale cohérente. La projection de ce dessin animé de Marjane Satrapi, racontant la fabrique de la dictature iranienne vue par une enfant, est suivie d'un débat animé par quatre intellectuelles reconnues pour leurs travaux sur la littérature, la philosophie et l'histoire des idées. Avant la fin de l'émission, les réactions sur Internet se déchaînent : une avalanche d'attaques verbales et d'appels haineux sont suivis, le lendemain, par une marche vindicative en direction des locaux de la chaîne. Les forces de l'ordre interviennent à temps, empêchent les agresseurs d'avancer et d'attaquer, les pourchassent et en arrêtent une partie. Le directeur de la chaîne dénonce l'agression le jour même dans les médias, puis présente des excuses, deux jours après, pour avoir offensé involontairement les sentiments religieux des spectateurs. La campagne d'opinion continue, monte, dégénère jusqu'à l'attaque de son domicile et de sa famille.
Dans les deux épisodes, le passage à la violence et à l'agression est immédiat et hélas, «efficace». Comment l'opinion peut-elle dégénérer si vite à chaque fois ? Comment se manifeste-t-elle en brutalité ? Dans cette période transitoire, la sécurité est une affaire délicate, fragile. On note que si les policiers ont eu la première fois un comportement douteux, ils ont fait leur métier, au cours de la seconde. Aussi, doit-on s'arrêter davantage sur la violence qui a accompagné ces deux affaires qui ont secoué le pays et divisé l'opinion. Elle est nourrie de plusieurs phénomènes et il faut en chercher l'explication dans le fond et dans la forme de ces événements. Dans les deux cas, on a affaire à des œuvres cinématographiques dans lesquelles les femmes sont auteurs et critiques, créatrices et interprètes. Dans ces deux événements, forme et fond semblent insoutenables, inacceptables.
Analysons le contenu : la première impression est que l'on se retrouve devant des répliques de l'affaire des caricatures partie du Danemark en 2006, laquelle rappelle la fetwa condamnant Salman Rushdie en 1989, pour son roman Les versets sataniques. Malgré le rapprochement évident avec ces affaires dont l'épicentre européen suscite de loin des réactions dans les pays arabes, que nous disent aujourd'hui ces affaires entièrement locales ? En supposant que tous les protestataires ont vu les films, les déclarations dénotent une réaction épidermique face à l'évocation de Dieu, à travers un titre ou la figuration imaginée de l'idée que s'en fait un enfant. L'évocation semble insupportable, touchant paraît-il à un sacré, alors que le propos de chaque film montre, au contraire, une vision humaine, une façon de voir profane. Face à ce contresens érigé en malentendu inquisitoire, les spectateurs tunisiens seraient-ils cinématographiquement moins avertis, ou plus susceptibles que leurs voisins algériens et marocains ? Drapés dans une bigoterie de bon aloi, et armés de «bien-pensance» hargneuse, les agresseurs sont passés à la violence en Tunisie, propageant haine et ignorance, une fois de plus.
Signalons que le mouvement se nourrit de commentaires colportés, l'interprétation hostile éclate et gonfle en colère avant la projection, ou juste le lendemain d'une émission. Cette hyper-réactivité attire l'attention sur un autre détail. Dans le premier film comme dans le second, les femmes sont au premier plan, au centre. Elles sont maîtresses des propos et de la scène, elles occupent l'espace par la parole et par la pensée. Elles sont artistes et médiatrices. Serait-ce là le point inconscient qui suscite autant de violence ? Alors que beaucoup de choses doivent changer, serait-on là devant une limite du supportable ? Dans cette transition toute fraîche, le pouvoir de l'image et la place de la femme déboussolent, activent un possible déjà-là, mais encore difficile à admettre. L'intolérable, celui qui mène à la violence, serait-il autant dans la facture de ces œuvres que dans leur contenu ? Ces affaires autour de films et de femmes sont-elles en train de nous mettre à l'épreuve de nos limites ?
Dans une phase où tous les coups sont permis par électoralisme, lâcheté ou affairisme, ces deux manifestations culturelles qui ont exacerbé les passions, apportent leur part d'enseignement : elles nous mettent devant deux limites symboliques fortes, deux frontières subliminales aussi difficiles à franchir que le fait de passer de la dictature à la démocratie. A moins que ce ne soit le même chemin...


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