Ceux qui croyaient que les “Aigles de Carthage” allaient se noyer sous le déluge dans l'enfer de San Mamès de Bilbao face à la sélection basque doivent en avoir pour leurs frais Ils ont, en effet, plié sans rompre, subi le jeu sans s'affoler. Notamment dans les soixante premières minutes où le team national déjoua, vacilla sur ses bases arrières et parut au bord de la rupture. Sur la pelouse détrempée et glissante du stade San Mamès, la cathédrale du foot basque, les copains de Mathlouthi, de retour de deux mois d'arrêt suite à sa double opération de la pubalgie et de la main, ont longtemps cherché leurs repères. Sous une pluie incessante dans des conditions de jeu dantesques, il fallait à coup sûr opposer beaucoup de courage et de solidarité à l'ouragan basque qui soufflait par rafales violentes, donnant froid au dos de Fatah Gharbi, d'autant que les «Verts» de Bilbao, de San Sebastian et de toute la fratrie basque avaient fait du couloir couvert par le latéral sfaxien, le circuit privilgié de leur manœuvre. Iraola et Xabi Prieto se dédoublaient et faisaient de ce flanc-là un immense boulevard, donnant le tournis à un Gharbi ,livré à lui-même et manquant de soutien, et plus généralement, à l'ensemble d'une arrière-garde dont l'axe ne brilla pas par son entente et sa complémentarité. Sami Trabelsi voulait expérimenter la paire Ifa-Hicheri, une association qui se révèlera malheureuse quand bien même les Espagnols ne trouveront jamais l'ouverture. En grande partie, en raison de l'heure de jeu impeccable, livré par Mathlouthi, auteur d'arrêts décisifs devant Aduriz (39') et Susaeta (55' et 59') et qui sera fort bien relevé par Ben Chérifia dont le baptême du feu s'avère porteur de beaucoup d'espoirs: sauvetage sur une tête de Mikel Rico (67'), sur une frappe lourde de Susaeta, encore lui (78') et sur un coup-franc du Madrilène Xabi Alonso des 30 mètres, sous la transversale (80'). Et soudain, la lumière fut… Alors que Haggui et Abdennour occupèrent l'axe défensif dans la dernière sortie, le 12 novembre dernier à Blida contre les «Fennecs» algériens, une paire expérimentale était testée dans la capitale basque. Il ne faut pas pour autant croire qu'elle a été la seule à battre de l'aile, avant-hier. Car, en défendant très bas, en perdant la bataille du milieu, en condamnant Chehoudi, Dhaouadi et surtout Jemaâ à une désespérante solitude, en concédant parfois 30 à 40 mètres entre le milieu et l'attaque, le bloc tunisien a volé en éclats, ses lignes se distendant dangereusement. Et soudain, la lumière jaillit, et l'éclair fut. Ils ne pouvaient venir que par le talent, par l'imagination, par la vélocité. Toutes ces vertus qu'a su incarner sur la durée d'une demi-heure de jeu Yassine Chikhaoui, capable d'accélérer le jeu, de l'aérer de sa vision et de son intelligence. La note la plus heureuse de la soirée basque aura incontestablement été le retour à son (meileur?) niveau du playmaker du FC Zurich qui renaît de ses cendres après la longue nuit de galères et qui a bénéficié du dynamisme d'un Chermiti revanchard et d'un Ihab Msakni inspiré, comme en témoigne son accélération et son centre parfait sur le premier but inscrit par Youssef M'sakni qui reprenait dans une cage vide un ballon de Chermiti renvoyé par le poteau. Dans la deuxième réalisation, Adel Chedly sera au départ et à l'arrivée après un relais avec Chermiti. Mais en amont, la patte de Chikhaoui a eu pour effet de bonifier et d'accélérer, par une seule touche, l'action. Au final, le staff national doit se réjouir pour le tas d'enseignements tirés de ce premier test qui n'a pas été avare sous ce rapport. La victoire, d'un intérêt relatif et accessoire, et fruit d'un beau réalisme, ne doit guère occulter les carences. Même s'il faut se rappeler que l'objectif recherché était d'accorder du temps de jeu à ceux qui en manquent, de tester de nouvelles formules et de vérifier la réaction du groupe dans un contexte difficile, devant un adversaire de grande qualité technique. Ce soir (19h00), dans l'enceinte mythique de Montjuic Lluis Kampanys, celle des Jeux olympiques 1992, la barre sera inévitablement placée plus haut face aux stars galactiques du Barça.