Tout seul, l'Etat ne pourra pas aller très loin dans sa lutte contre le problème numéro 1 du pays, à savoir le chômage. La création de l'emploi dans une conjoncture économique nationale et mondiale délicate n'est pas chose aisée. La contribution du secteur privé et son implication dans la création de richesse sont désormais essentielles pour répondre aux demandes pressantes de nos jeunes chômeurs qui aspirent à mener une vie digne et construire un avenir meilleur. Victimes d'un système éducatif défaillant dû essentiellement à la faiblesse de la formation et sa non-adéquation avec les exigences du marché de l'emploi, ces derniers ont le droit d'être accompagnés dans leur quête d'emploi mais aussi dans la concrétisation de leurs projets. A Sfax, le secteur privé semble être très dynamique voire préoccupé de trouver des solutions non seulement urgentes mais aussi efficaces pour l'intégration des jeunes demandeurs d'emploi dans le circuit économique. D'habitude, c'est l'Etat qui invite le secteur privé à participer dans des rencontres et forums portant sur l'emploi. Cette fois-ci, c'est Socomenin, une entreprise privée qui offre 1.400 postes d'emploi et totalement exportatrice depuis 2005, qui a organisé, hier à Sfax, un forum portant sur « la formation et l'emploi, une responsabilité nationale, réalité et perspectives ». Deux ministres ont assisté à cette rencontre : M. Moncef Ben Salem, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, et M. Abdelwahab Mâttar, ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi. Une invitation porteuse d'un message fort : le marché de l'emploi est en quête d'une formation spécifique. Or cette formation est malheureusement très faible pour répondre à des besoins de marché de plus en plus strictes et en perpétuelle évolution. C'est ainsi que le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a été catégorique : «Non seulement le système de l'enseignement universitaire mais aussi tout notre système éducatif méritent d'être revus de fond en comble». Le ministre ne mâche pas ses mots : «Notre université a réussi à former plus de sept cent mille chômeurs ! Un héritage très lourd qui exige des efforts de réformes approfondies qui ne seront ni imposées ni parachutées. Bien au contraire, la réforme du système de l'enseignement supérieur fera l'objet d'une consultation nationale qui regroupe, outre les universitaires et les industriels, toutes les composantes de la société civile». Toujours en matière de réforme, le ministre a souligné que le système LMD ne sera pas supprimé. Cependant, il fera l'objet d'une grande réforme afin qu'il puisse répondre avec efficacité aux spécificités de la société tunisienne et donner les résultats escomptés. M. Ben Salem a également évoqué la question de l'orientation universitaire qui se fera désormais en deux sessions au lieu de quatre, avec un dernier délai fixé au 31 août de chaque année. Parlons avec franchise Pour sa part, le ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi a souligné que la problématique de la formation et de l'emploi doit être traitée selon une nouvelle approche se basant essentiellement sur la franchise et le diagnostic précis. Une approche qui doit être élaborée par toutes les composantes de la société civile. Car, ajoute le ministre, nous avons fait des avancées remarquables au niveau politique traduites par les élections réussies du 23 octobre. Cependant, beaucoup reste à faire au niveau socioéconomique. La formation professionnelle ne doit pas être perçue comme étant une issue pour ceux qui n'ont pas réussi leurs études. Bien au contraire, elle est désormais un créneau porteur pour tous ceux qui cherchent à s'intégrer dans la vie professionnelle. Sur un autre plan, le gouverneur de Sfax, M. Mohamed Ali Jendoubi, s'est montré optimiste quant à la capacité des Tunisiens à identifier les solutions à même de créer davantage de postes d'emploi. Au niveau régional, le gouverneur a évoqué la question des « terres des Sialines » qui s'étendent sur un rayon de 70 à 80 km autour de Sfax. La situation juridique de ces terres sera traitée dans les plus brefs délais. L'éventuelle distribution de lots de ces terres aux jeunes diplômés pourra être à l'origine non seulement de la création d'emploi mais permettra aussi de développer l'investissement agricole. La région de Sfax, précise le gouverneur, compte plus de 80 mille demandeurs d'emploi dont 17 mille parmi les diplômés du supérieur. La majorité écrasante des ces diplômés en quête d'emploi vit dans les zones rurales de la région sfaxienne, d'où la possibilité de renforcer les investissements agricoles. Pour le P -.d .g. du groupe Socomenin, M. Nasr Al Farisii, il est temps de trouver des solutions pratiques et pragmatiques pour impulser le secteur de l'emploi. Il a, ainsi, proposé la création d'une commission commune formée de représentants de l'Etat et d'entreprises privées pour l'élaboration et le suivi d'un plan national de l'emploi.