L'Agence tunisienne de la formation professionnelle organise, en collaboration avec le Conseil culturel britannique - British council et l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), une conférence internationale ayant pour thème : «Développer un engagement effectif de l'employeur en Tunisie dans le système de la formation professionnelle». Cette rencontre, dont les travaux ont démarré hier et se poursuivent jusqu'aujourd'hui, s'inscrit dans le cadre d'une convention de coopération entre l'Atfp et le British Council. Ont pris part à cette conférence des experts en la matière, provenant de divers pays frères et amis comme l'Egypte, la Turquie, le Royaume Uni et le Qatar. Dans son allocution de bienvenue, Mme Eunice Crook, directrice du British Council, a mis l'accent sur l'importance de la formation professionnelle dans le développement des compétences et la garantie d'un développement économique en harmonie avec les besoins du marché. Elle indique que la présente conférence vise à encourager les employeurs de la région à contribuer efficacement à cette démarche et à faire de la formation professionnelle un outil crucial et utile au service de l'entreprise. Selon elle, cependant, la formation doit être mieux adaptée aux changements et aux progrès technologiques : «Il faut avouer que, jusque-là, l'évolution technologique a constitué un handicap dans cette optique, vu qu'elle n'est pas exploitée comme il se doit. Ce qui justifie le fossé qui se creuse entre l'offre et la demande dans la plupart des régions». Mme Crook affirme par ailleurs que le Royaume Uni a réussi a développer le secteur de la formation : un résultat qui n'aurait jamais eu lieu sans la contribution et l'engagement confirmés des employeurs. Prenant la parole à son tour, M. Ibrahim Toumi, directeur général de l'Agence tunisienne de la formation professionnelle, a indiqué que la majorité des jeunes à la recherche d'un emploi aspirent à être recrutés dans le secteur étatique. «De notre côté, nous souhaitons vivement que nos jeunes accordent à la formation et à l'expérience professionnelle davantage d'intérêt. Pour y parvenir, nous avons besoin d'une contribution solide de la part des entreprises», souligne-t-il. M. Toumi insiste par ailleurs sur le besoin de réussir les actions dans les deux axes de base, à savoir la définition des besoins de l'entreprise et, d'un autre côté, l'intensification de la formation par alternance, et ce, dans un climat propice au partenariat entre l'Agence et l'entreprise. «Si les employeurs focalisent essentiellement sur leurs besoins ponctuels, le partenariat exige que l'on focalise tous sur les besoins du secteur», note le responsable. De son côté, M. Hichem Elloumi, président de la Fédération de l'électricité et de l'électronique, a souligné l'importance de l'approche régionale dans la promotion de la formation professionnelle : une approche qui tient compte des spécificités techniques caractérisant le marché de l'emploi dans chaque région. Il a, par ailleurs, mis le doigt sur le problème relatif au mode de gouvernance et à l'autonomie de gestion dont souffrent les centres de formation. Evaluation du parcours et lacunes à combler L'équation tridisciplinaire, regroupant et l'enseignement supérieur et la formation professionnelle et l'entreprise, dont les jalons sont mis en place depuis quelques années, vacille entre pas franchis et trébuchements. Ce point a été minutieusement expliqué par M. Abdel Aziz Halleb, vice-président de la Fédération de l'électricité et de l'électronique. Il faut dire que le fait de relever le défi de l'engagement de l'employeur en Tunisie n'est pas facile à réussir mais il n'est pas pour autant impossible à réaliser. Si le ministère de la Formation professionnelle et le ministère de l'Enseignement supérieur ont réussi, depuis quelques années, à introduire cette logique dans leurs agendas et à impliquer les parties concernées dont l'Utica et la Fedelec, cette logique demeure défaillante du côté des entreprises. Certes, certaines avancées sont notables, dont la loi en date de 2009 qui oblige certaines entreprises à garantir des stages pour les étudiants de l'enseignement supérieur dans le cadre notamment des licences coconstruites. Pour ce qui est de la formation professionnelle, la Fedelec s'applique à la formulation des besoins en formation initiale, afin de définir le type de formation professionnelle répondant aux besoins du marché de l'emploi. L'orientation de la formation, la bonne communication adressée aux jeunes diplômés et chercheurs d'emploi ainsi que le développement progressif d'une vision régionale ont permis d'enregistrer des points positifs. «Parfois, le taux d'insertion des stagiaires dans les entreprises s'élève à 100%», fait remarquer l'intervenant. Cependant, la dynamique du partenariat n'a pas été pérennisée ni réussie dans tous les secteurs. «Sur 15 secteurs, seulement 6 ou 7 ont réussi le pari», ajoute M. Halleb. Le responsable de la Fedelec montre du doigt les lacunes à combler. Il recommande ainsi aux entreprises de collaborer d'une manière effective et réfléchie, de garantir une vraie formation sur le site du travail. Le responsable appelle également à la mise à la disposition des organisations professionnelles de financements à même de leur permettre de bien oeuvrer dans ce sens. D'autant plus qu'une réforme juridique s'impose afin de quitter la logique administrative et de permettre aux professionnels une certaine autonomie au niveau des mesures et décisions. L'expérience britannique : ça marche L'expérience de la Commission du Royaume Uni dans la prise de responsabilité des employeurs. Tel est le thème de l'intervention présentée par Mme Theresa Mc Dermott, directrice assistante de la Commission. L'expérience britannique part d'un objectif de base, à savoir hisser le niveau et la compétitivité de l'entreprise. Pour y parvenir, il convient de réussir des actions sur plusieurs plans, y compris celui de la formation professionnelle. La promotion des opportunités destinées aux ressources humaines et aux jeunes compétences en particulier figure parmi les lignes d'actions fondamentales. Elle vise également à créer un marché propre aux compétences professionnelles et ce, au profit et des demandeurs d'emploi et des employeurs. L'expérience britannique lie étroitement la formation professionnelle à l'investissement : l'idée étant d'investir dans les meilleures propositions et de hisser la valeur et l'accessibilité à la formation. D'où le rôle fondamental des employeurs dans cette configuration. Pour donner un apport fructueux, ces derniers ont besoin d'exprimer leurs points de vue et proposer des solutions pertinentes dans le cadre d'un bon partenariat. De même, «les subventions doivent parvenir directement à des employeurs responsables, leur donnant plus de pouvoir d'achat sur le marché des compétences, avec les fournisseurs de formation», souligne Mme Mc Dermott. Elle ajoute : «Le solde des dépenses publiques doit passer des subventions à des investissements et des prêts d'employeurs structurés, de façon à inciter les employeurs à investir davantage dans les résultats de la formation».