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«Nous avons l'art pour ne pas mourir de vérité»
Colloque - «Livres à Tunis» et «Livres et société»
Publié dans La Presse de Tunisie le 26 - 02 - 2012

«Quand les aiguilles s'affolent, comment peut-on s'orienter dans la pensée ?», s'est demandé l'écrivain Hamadi Ben Jaballah, au cours du colloque dédié au livre et à la société, qui s'est tenu vendredi et samedi derniers à Tunis. La réponse lui paraît évidente: «Pour se retrouver, il suffit de chercher la liberté!». Mais laquelle? La démocratie naissante a fait exploser les écrits. Les plumes se libèrent et les phrases se déchaînent d'une manière spectaculaire.
«Comment écrire en Tunisie aujourd'hui ? Comment allier témoignages, responsabilité et liberté ?», fut le premier thème débattu lors de cette rencontre. L'écrivain Ali Bécheur a ouvert le bal avec un véritable hymne à cette liberté et au métier de romancier. Il a fait la distinction entre deux sortes de libertés : politique, et individuelle. «La démocratie peut favoriser l'émergence culturelle, mais elle n'est pas son garant. Le régime totalitaire n'empêche pas un auteur d'être libre. On invente, à notre guise, notre monde et notre vérité. Le langage d'un écrivain se reconnaît à son chant particulier, tel un oiseau. S'il commence à se censurer lui-même ; à se maîtriser et à mettre des chaînes à sa plume, il n'ira pas loin. Ecrire, c'est aller au fond de soi-même, de croire à son langage et de prendre le risque de déplaire...C'est notre responsabilité». Ali Ben Béchir pense que la solitude et le silence sont fondamentaux pour un écrivain. Une solitude devenue pourtant rare.
L'essayiste Hélé Béji a diagnostiqué, pour sa part, cette «saturation sonore» dans laquelle baigne l'écrivain d'aujourd'hui. Elle a constaté «un vide d'écriture dans une inflation d'écrits». «L'écriture s'éloigne d'elle- même», remarque-t-elle. H. Béji a mis en évidence des écrits qui se veulent révolutionnaires, populaires et judiciaires. Par quelques feuillets, on peut entraîner la condamnation publique. Ainsi, écrire peut participer à détruire. «Et on est loin de la vocation de l'écrivain. Comment ce dernier garde-t-il sa dignité quand l'indignité devient la règle ? Comment peut-il être responsable face à une irresponsabilité généralisée?», se demande l'essayiste. Pour elle, il n'y a qu'une seule solution : s'identifier à l'Autre en restaurant sa part de l'humanité. «Il ne faut pas oublier que, grâce au livre, l'humanité est restée intacte, malgré les injustices du monde», insiste-t-elle.
«Ici, j'ai appris la diversité et la tolérance»
Un retour à l'histoire aiderait l'écrivain, selon Hamadi Ben Jaballah, à retrouver sa vocation et sa liberté. Ce chercheur a rappelé à l'audience le rôle des intellectuels et des scientifiques arabes dans l'instauration du savoir occidental. «La modernité, c'est nous. Il ne faut pas l'ignorer», déclare-t-il. Revenir en arrière reviendrait, selon lui, à l'effacement de toute l'histoire de l'humanité. Il est essentiel, aujourd'hui, de savoir qui nous sommes et ce que sont nos principes et nos valeurs.
La pluralité de la société tunisienne fut le deuxième thème traité dans ce colloque. Les intervenants ont été appelés à raconter leurs propres expériences. Ils ont ainsi apporté un témoignage sur la Tunisie de leur jeunesse. «J'écrivais pour garder les choses à l'intérieur de moi. Je dialoguais avec le réel. Je le reconstruisais et je lui répondais. Je ne voulais pas perdre ce que la Tunisie m'a donné. Ici, j'ai appris la diversité et la tolérance... J'ai appris aussi que l'Autre est multiple et qu'on n'est, en fin de compte, qu'un morceau de cette multitude», a déclaré l'écrivain Claude Fellous. La chercheuse Sophie Bessis est allée aussi dans ce sens. Elle est contre une identité figée, fixe et unique, «qui n'est autre qu'un concept politique», précise-t-elle. Elle opte pour le thème «Appartenances» qui ne peut être que pluriel. Qu'est-ce qu'être tunisien ? Comment être tunisien ? Bessis ne prétend pas apporter une réponse à ces questions, mais elle croit qu'être tunisien est le fait de ne pas pouvoir se défaire de soi. Hassouna Mosbahi a confié le témoignage d'un exilé volontaire qui a confirmé cette hypothèse. «Dans le silence et l'obscurité d'une langue que je ne maîtrisais pas, j'ai retrouvé mon langage et ma Tunisie», a-t-il dit. Cet écrivain, victime de la censure, d'abord politique puis religieuse, a choisi de quitter sa patrie pour s'installer en Allemagne. Là, il a retrouvé sa liberté d'écrivain et dépeint la Tunisie à sa manière.
Trop de problèmes pour un petit espace
«Comme le dit Nietzsche : ‘‘Nous avons l'art pour ne pas mourir de vérité''», a déclaré la romancière Azza Filali, l'organisatrice du colloque. Cette dernière voulait raconter la société actuelle à travers la pensée de ceux qui écrivent. Elle a invité à cet événement des littéraires, des professeurs universitaires, des journalistes, des éditeurs, des écrivains... Elle est allée à la recherche de ce qu'elle appelle «l'archéologie de la trace», c'est-à-dire, de ceux qui ont fait de la Tunisie une terre de dialogue et de diversité culturelle. Elle a développé, entre autres, deux notions : «centre» et «héros», qui résument la réalité sociale actuelle. «Avant, il y avait un Centre entouré de régions. Maintenant, ces régions veulent devenir Centre. Ce n'est pas nécessairement une mauvaise initiative. Mais ce phénomène mérite, à mon avis, d'être analysé. Quant au Héros, il symbolise l'histoire de l'homme seul et de l'opinion publique. A-t-on encore besoin de héros ?», se demande Azza Filali. Ce colloque essaye également d'analyser les relations entre écrivains, éditeurs et libraires et de suggérer, en plus, quelques propositions pour le livre...
Trop de problèmes pour un petit espace. En voulant tout dire, on perd la ligne directrice de cette rencontre. Malgré les bonnes volontés et la belle initiative de la romancière, le programme de ce colloque a paru éclaté. Un choix qu'on respecte. On aurait aimé une plus grande concentration sur le livre, sur ses problèmes majeurs et sur, par exemple, la littérature francophone tunisienne. Ali Bécheur a soulevé ce sujet à la fin de la rencontre. Il a parlé de ce parent pauvre de la littérature que personne n'aime voir. «Mais qu'il est important de ressusciter», insiste-t-il. Il a aussi évoqué le mutisme médiatique dans lequel baigne la littérature tunisienne: «Quelle place occupe le livre sur les colonnes des journaux ou dans les émissions télévisées et radiophoniques ? Où sont les revues et les magazines spécialisés ?... », s'est-il demandé. La littérature tunisienne ne semble pas avoir la place qu'elle mérite dans la société. Un problème de taille qui mérite réflexion et analyse approfondie.


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