• Un séminaire international sur le droit d'accès à l'information sera organisé à la fin de ce mois à Tunis par la Banque mondiale avec la participation de plusieurs personnalités et experts tunisiens et étrangers. • Les médias sont en mesure de contrôler le travail du gouvernement en utilisant les informations obtenues des organismes publics. • Pour la constitution d'une instance indépendante chargée de vérifier la diffusion des informations par les organismes publics. La rétention de l'information par les départements publics a toujours constitué un problème pour les journalistes les empêchant d'élaborer une enquête complète avec des chiffres crédibles. Chaque journaliste est obligé parfois de se débrouiller —en utilisant les rumeurs et les informations officieuses— pour écrire son papier. Par le passé, le ministère divulguait les données positives, dont il veut faire l'écho à large échelle et dissimule celles qui sont négatives. Sans compter, bien sûr, les données à caractère confidentiel qui relèvent de la sécurité et de la défense. Après la révolution tunisienne, la Banque mondiale veut préparer une feuille de route en vue de faciliter l'accès à l'information. La mission de cette Banque ne se limite plus donc à l'octroi des prêts, mais concerne désormais les questions d'actualité à caractère économique. Comme l'a souligné M. Antonio Nucifora, économiste en chef : «L'institution financière compte aborder à chaque fois un sujet d'actualité à caractère économique, en impliquant les acteurs concernés». Il a manifesté, en outre, sa disposition à collaborer avec tous les médias et de fournir les données disponibles au sein de la Banque. Eviter la rétention légiférée Actuellement, on s'intéresse donc au droit d'accès à l'information, qui exige la mise en place d'une législation appropriée. Mme Eileen Murray, représentante résidente de la Banque mondiale en Tunisie, estime, de son côté, que «dans un souci de bonne gouvernance et de transparence choisies par le gouvernement tunisien, il est nécessaire de respecter le droit d'accès à l'information. Une telle exigence nécessite le changement de comportement de certains responsables même si cela prend du temps». Et de rappeler l'importance des informations dans le domaine des affaires et de l'investissement. Les médias bien informés peuvent constituer un contre-pouvoir et mettre sur le tapis certaines réalités. Intervenant lors d'une visioconférence organisée par la Banque mondiale le vendredi 16 mars, M. Toby Mendel, expert en matière d'accès à l'information et directeur exécutif du centre de la démocratie au Canada, a indiqué que l'information a fait l'objet d'une révolution. Elle est diffusée dans plusieurs supports, dont l'Internet qui transmet chaque jour des millions de données dans toutes les parties du monde. «Le droit d'accès à cette information des structures publiques est devenu, aujourd'hui, une réalité», estime l'orateur. Le cadre juridique relatif à l'accès à l'information peut, cependant, comporter certaines exceptions qui concernent les données d'ordre sécuritaire et militaire et même des secrets industriels. Mais ces exceptions ne doivent pas être élargies à d'autres secteurs pour éviter la rétention légiférée. Pour M. Mendel «Les citoyens, les chefs d'entreprise et les organisations non gouvernementales ont le droit d'avoir accès aux informations dont ils ont besoin». Les informations confidentielles divulguées par wikileaks, par exemple, bien qu'elles aient fait le bonheur de plusieurs personnes assoiffées de données originales, ne se basaient pas sur un cadre légal. On ne veut pas en arriver à utiliser des moyens détournés pour obtenir l'information qui doit être publiée et actualisée dans le site de chaque ministère. D'autant plus que la Tunisie est l'un des 90 pays qui ont mis en place une réglementation au sujet du droit d'accès à l'information. M. Mendel s'est félicité, en fait, du cadre légal régissant la divulgation des informations à la faveur du décret-loi n°2011-41 du 26 mai 2011 relatif à l'accès aux documents administratifs des organismes publics, qui devrait être suivi des décrets d'application. Inaugurer une nouvelle méthode de travail Des circulaires devraient surtout être envoyées aux ministères et organismes publics afin que les responsables fournissent les données demandées, car la rétention de l'information semble encore exister. D'où la nécessité de changer les habitudes et d'inaugurer une nouvelle méthode de travail plus ouverte aux médias et hommes d'affaires. Les nouvelles technologies de l'information constituent un support idéal pour diffuser les informations avec la rapidité souhaitée. «Les informations sont nécessaires pour demander des comptes au gouvernement et lutter contre la corruption», précise l'orateur, qui a pris pour exemple le Canada où les chefs d'entreprise utilisent les données publiques pour participer aux appels d'offres. Même en Grande-Bretagne, les médias ont pu constater des irrégularités dans le travail de certains membres du gouvernement grâce à des données publiques obtenues de façon légale après adoption d'une loi dans ce sens. La loi internationale protège le fournisseur des informations et leur diffuseur. L'information peut être produite également par les journalistes à partir des enquêtes sur le terrain. Au cas où les organismes publics refuseraient de fournir l'information demandée sur la base du décret-loi précité, M. Mendel propose de recourir au tribunal administratif pour obtenir gain de cause, même si ce recours nécessite des dépenses et du temps, ce qui n'arrange pas souvent les médias, qui ont besoin de données récentes. Une structure indépendante chargée de vérifier la diffusion des informations par les organismes publics et les ministères permettrait, selon l'expert, de respecter le décret-loi par les responsables qui pourraient faire l'objet de sanctions s'ils ne se conforment pas à la réglementation en vigueur. Un séminaire international sur le droit d'accès à l'information sera organisé au cours de la fin de ce mois à Tunis par la Banque mondiale avec la participation de plusieurs personnalités et experts tunisiens et étrangers.