• « Si on ne gagne pas la licence 3 G, il est clair que l'on va être amené à reconsidérer nos investissements et à faire des économies. Pour Tunisiana, à cette période précise de l'histoire du pays, il n'est pas question de reculer. Le temps est à l'investissement et à la croissance». • «En cette période cruciale de développement du pays, c'est vraiment important d'avoir une infrastructure forte de télécom. C'est tout un nouvel écosystème qui va se créer autour de cette licence (création d'emplois directs et indirects). Tunisiana représente tout de même 2.000 emplois directs et deux fois, sinon davantage, d'emplois indirects» • «Le secteur tunisien a plutôt besoin aujourd'hui d'un secteur de télécom fort avec une Tunisie Telecom forte, une Orange Tunisie forte et une Tunisiana forte. Si vous êtes fort, vous êtes prêt à investir et à donner une meilleure infrastructure pour les Tunisiens. Avec un 4e opérateur, la Tunisie court le risque d'avoir un très faible secteur de télécommunications». Le staff était au complet. L'ambiance détendue, malgré une certaine tension perceptible du comité d'accueil de Ken Campbell, directeur général de Tunisiana. Un grand monsieur, au sens propre et figuré. De l'étoffe de ces managers qui savent conjuguer, avec finesse et beaucoup de prudence, les exigences de la performance économique, dictées du reste par les actionnaires, et une vocation foncièrement sociale et citoyenne d'une entreprise qui, sur ce terrain, a eu l'intelligence, et pour reprendre l'expression de Mme Ikram Ellouz, responsable des relations publiques, d'investir dans les régions intérieures du pays non seulement en termes d'infrastructures de télécommunications mais aussi dans la promotion de la culture, domaine qu'elle considère, à raison, à la base de toute œuvre de développement par ce qu'il ouvre comme perspectives d'épanouissement pour des idées portées par les jeunes Tunisiens. M. Campbell ne pouvait espérer plus éloquente introduction pour défendre les couleurs de Tunisiana, ses attentes et ses ambitions. Avec un accent anglo-saxon canadien caractérisé et un français impeccable, il a trouvé dans cette vocation citoyenne de Tunisiana, un argument fort, bien plus que tous les autres d'ordre économique et financier, autour duquel il a, tout au long de l'entretien accordé à La Presse, cherché à structurer ses réponses. L'ambiance de tension « perceptible » à laquelle on faisait précédemment allusion n'était, à vrai dire, que la traduction d'un message clair que tout le monde ici semble vouloir de tout cœur transmettre aux sphères de la décision politique tunisienne. Ce message, pour faire court, tient en peu de mots : dégager de nouveaux horizons pour Tunisiana, désormais un opérateur historique dans le domaine des télécommunications. Dégager les horizons pour une entreprise tunisienne citoyenne, en lui permettant d'investir encore plus non seulement dans l'écosystème et dans les ressources humaines tunisiens, selon la formule de M. Hatem Mestiri, directeur exécutif technique, mais aussi dans une plateforme technologique et de communications tournée vers l'avenir et dont les retombées en termes de croissance pour l'économie tunisienne sont évidentes. Il est vrai que l'expérience en la matière de ladite entreprise, ainsi que la force de frappe de son réseau sont aujourd'hui tout à son actif et militent pour un nouveau redéploiement de ses activités sur le territoire tunisien. Le directeur commercial, M. Taieb Farhat, n'a à cet égard nullement manqué d'aligner les atouts et les avantages «compétitifs» de l'enseigne, en mettant tout particulièrement en exergue le potentiel de création d'emplois que ne manqueraient pas de susciter une extension et un nouvel élargissement des services de Tunisiana. Une enseigne qui, il y a lieu de le reconnaître, a tout de même, pris le risque de démocratiser en Tunisie les services de la téléphonie mobile à une époque où les pressions politiques sont légion et en dépit de sérieuses contraintes imposées par l'ancien régime pour défendre le monopole de Tunisie Télécom, et plus tard pour garantir de meilleurs plus-values et débouchés à Orange Tunisie. Un militantisme involontaire qui semble avoir coûté à l'entreprise un sérieux frein à un redéploiement et à un investissement dans le marché tunisien de la technologie de téléphonie mobile de troisième génération. Les choses ont certes depuis beaucoup changé. Mais le temps semble prendre son temps. L'administration tunisienne mettant un peu du sien dans une posture d'attentisme, les pouvoirs politiques, en quête de repères, engloutis qu'ils sont sous le poids des dossiers et ne sachant surtout pas qui en fin de compte ménager entre tous ces prétendants et soumissionnaires en termes d'investissements, rien ne semble pour l'instant définitivement acquis. Ce n'est bien évidemment pas ce que dit M.Campbell, bien au contraire. Jamais autant qu'aujourd'hui il n'a, soutient-il, «aussi profondément foi dans le sérieux et la détermination du gouvernement actuel à ouvrir de nouveaux horizons de développement pour l'économie tunisienne ». Introduction en Bourse Et nous voilà dans le vif du sujet relatif au projet 3G dont Tunisiana attend une issue heureuse à la hauteur de ses ambitions. «La politique de gestion du marché et de la concurrence commence à changer. C'est très important pour l'avenir de cette industrie et pour la croissance des investissements et pour l'amélioration des services rendus aux Tunisiens», dit d'entrée M. Campbell. Un signe qui, à ce titre, ne trompe pas : «La démarche adoptée par le gouvernement actuel pour la licence 3G: c'est complètement ouvert et transparent, avec un cahier des charges vraiment clair : pour les sociétés de télécom à même d'offrir un service de haute qualité, dans toutes les régions du pays sans exclusive, c'est très encourageant. «Nous sommes ici depuis longtemps avec un réseau bien établi et une marque qui est bien connue, cela nous donne un avantage certain. Plus de 6.600.000 abonnés, 900 points de vente dans toutes les localités du pays et ...un gisement d'emplois indirects», avance encore le directeur général de Tunisiana. Les arguments ne manquent sans doute pas, mais le marché n'est-il pas venu à saturation avec Tunisie Telecom et Orange Tunisie ? «Le marché existe et la demande est bien réelle mais la question serait plutôt de savoir si ce marché existe pour un quatrième opérateur. Est-ce que c'est vraiment rentable pour un 4e opérateur de rentrer dans le marché? Est-ce vraiment, et surtout, rentable pour la Tunisie que d'accueillir un nouveau fournisseur de services de Telecom ? Le secteur tunisien a plutôt besoin aujourd'hui d'un secteur de télécom fort avec une Tunisie Telecom forte, une Orange Tunisie forte et une Tunisiana forte. Si vous êtes fort, vous êtes prêt à investir et à donner une meilleure infrastructure pour les Tunisiens. Avec un 4e opérateur, la Tunisie court le risque d'avoir un très faible secteur de télécommunications. » Le contenu de l'appel d'offre est très clair pour une licence 3G et fixe. Un 4e opérateur peut arriver, c'est la règle du jeu. Tunisiana a soumis la meilleure offre possible pour démontrer qu'elle va apporter plus de valeurs sur le marché qu'un nouvel entrant. A la fois en termes d'apports pour l'Etat, pour les consommateurs et pour l'écosystème, soutient-on ici. « Nous sommes le seul opérateur qui n'a pas aujourd'hui le 3G, le fait de soumissionner est juste un rééquilibrage du marché et c'est aussi un peu pour réparer l'injustice que l'on a subie», a fait remarqué le directeur exécutif technique de Tunisiana. A cet égard, M. Campbell, qui soutient ne pas connaitre le nom des autres soumissionnaires pour la 3G, s'est tout au plus fait le vecteur de quelques rumeurs faisant état de sociétés des pays du Golfe. Mais on sait, de notre côté, que des opérateurs turcs et espagnols sont de la partie. «On n'est jamais à l'abri des surprises. Il faut toujours rester prudent et considérer qu'il y a concurrence toujours. En cette période cruciale de développement du pays, c'est vraiment important d'avoir une infrastructure forte de telecom. C'est tout un nouvel écosystème qui va se créer autour de cette licence (création d'emplois directs et indirects). Tunisiana représente tout de même 2000 emplois directs et deux fois, sinon davantage, d'emplois indirects», avance le directeur général de Tunisiana. «Si on ne gagne pas la licence 3 G, il est clair que l'on va être amené à reconsidérer nos investissements et à faire des économies. Pour Tunisiana, à cette période précise de l'histoire du pays, il n'est pas question de reculer. Le temps est à l'investissement et à la croissance». Le message est subtil. Il n'en demeure pas moins qu'il donne à réfléchir quant à une éventualité d'un plan social – fort peu probable au demeurant —, du moins quant à des incidences bien réelles sur les emplois indirects et sur le développement de toute une large sphère d'activités liées au service des télécommunications. «On sait que la pertinence financière pour un investisseur d'aller aujourd'hui investir dans les régions intérieures du pays est faible. Quand le gouvernement privilégie les investissements dans ces régions, et le cahier des charges pour la licence 3 G est clair dans ce sens, j'espère qu'il va considérer les investissements que Tunisiana est à cet égard prêt à faire». Le juste prix de la licence sera, conclut M. Campbell, le prix d'une fidélité d'une entreprise citoyenne et d'une entreprise résolument tournée vers l'avenir en termes de croissance et de progrès social. Avec, dans cette perspective, une «sérieuse» éventualité de s'introduire en Bourse. Pour Tunisiana, tout ou presque semble aujourd'hui suspendu à la suite qui sera donnée par le gouvernement provisoire à sa «requête» d'une licence 3G. Au-delà d'une injustice ressentie sous l'ancien régime, l'enseigne semble avoir des raisons objectives qui militent pour une nouvelle croissance en Tunisie.