Par Jawhar CHATTY C'est sur l'état de l'existant et sur une réalité tangible que se fonde tout optimisme. Les projections d'un mieux-être, d'un meilleur «existant» futur et les actions qui seront demain entreprises ne feront que, rétrospectivement, confirmer ou infirmer toute propension à l'optimisme. L'optimisme n'est, sans aucun jeu de mots, pas l'espoir. Pour le susciter, il faudrait que soient engagées aujourd'hui plutôt que demain des actions fortes et concrètes qui donnent à voir, à tous ceux qu'on invite à l'optimisme, une amélioration tangible de leur quotidien. Encore une fois, des projections de croissance ne veulent hélas rien dire pour beaucoup de Tunisiens. Face aux gouvernés, le gouvernement semble comprendre cet épineux dilemme. Il est tenu par une obligation de résultat mais il n'a pas encore tous les moyens de sa politique. Les priorités des uns et des autres sont pour ainsi dire les mêmes. Les projets de budget de l'Etat et le programme économique du gouvernement ont réussi tout de même l'exploit, en dépit des contraintes budgétaires et de la très faible marge de manœuvre du gouvernement, à faire converger les priorités, de concilier les impératifs de l'action à court-moyen terme avec les exigences d'une plus grande rigueur sur le long terme. Le gouvernement avait deux choix : soit veiller aux équilibres macroéconomiques et se lancer dans une politique d'austérité, soit adopter une politique budgétaire de relance. La première consiste, ainsi que le souligne le Pr Tawfik Rajhi, du cercle des économistes tunisiens, «à tailler les dépenses en particulier sociales et de compensation tout en réduisant les déficits, alors que la seconde consiste à creuser les déficits tout en augmentant les dépenses». Présentée ainsi, le choix parait tout fait : le déficit budgétaire étant le point focal de cette alternative, au diable l'austérité ! Même si l'expression «tout en réduisant les déficits» reste quelque peu évasive. Au fond, c'est ce genre d'analyse et d'argument qui dérange. Une alternative force le choix et ferme les issues à d'autres voies possibles et envisageables. Noir ou blanc, il faut choisir ! Ce genre de raisonnement binaire a incontestablement le mérite de la sincérité scientifique. Toutefois, il est susceptible de faire ombrage au volontarisme vraiment sincère d'un gouvernement qui s'échine à la tâche pour répondre aux premières priorités des Tunisiens. Et puis, la démocratie, tout comme le développement, c'est tout sauf des choix binaires. Seules des réponses multiples aux défis présents peuvent dégager les horizons et pourront susciter l'optimisme objectif de tous les Tunisiens.