• 1.100 procès pour violence ont été intentés par le ministère. Plusieurs de ces affaires attendent, aujourd'hui, d'être traduites en justice. Plus de 4.000. C'est le chiffre des agressions subies par des professeurs dans des établissements secondaires au cours des dernières années. Le respect n'est plus qu'un vain mot dans la plupart de ces établissements où une simple injonction de l'enseignant pour rétablir l'ordre dans la classe finit par tourner à l'altercation avec l'élève perturbateur. L'agression est, alors, soit verbale soit physique. Chaque année, le nombre de cas de ce genre s'allonge sur les listes qui sont placardées sur les murs des bureaux du syndicat de l'enseignement secondaire. L'humiliation est devenue le lot quotidien de ces enseignants qui ne peuvent plus jouer convenablement leur rôle d'éducateur et vivent, tous les jours, dans la crainte d'être agressés par leurs propres élèves ou même des étrangers provenant de l'extérieur de l'enceinte éducative. En mai 2011, dans l'établissement Assad Ben Fourat situé à La Manouba, un élève, mécontent de la décision prise à son encontre par une enseignante remplaçante, l'agresse physiquement. Le même scénario se répète un peu partout. A Sidi Bouzid, un groupe de garçons s'attaquent, à la sortie, à leur professeur, et tentent de la violer. Dans un établissement secondaire de la région de Jelma, un parent d'élève pénètre en plein cours et agresse verbalement le professeur de mathématiques. Pour soutenir leurs collègues, des marches de protestation ont été organisées par des enseignants pour dénoncer la violence dont ils font l'objet. 1.100 procès pour violence ont été, par ailleurs, intentés par le ministère. Plusieurs de ces affaires attendent, aujourd'hui, d'être traduites en justice. Mauvaises notes obtenues dans une matière, mise à pied de leur enfant... Les parents d'élèves rejettent en bloc toutes les sanctions prises par les enseignants et s'en prennent violemment à eux, en allant, parfois, jusqu'à l'agression physique. Il y a à peine trois mois, dans un établissement secondaire de la Cité Ettadhamen, un parent d'élève, mécontent de la décision prise par l'enseignant de mathématiques qui avait donné une mauvaise note à son fils, s'emporta brutalement contre lui et le frappa dans la cour devant ses collègues. Une réaction qui suscita une vive indignation au sein du corps enseignant... Au mois de janvier dernier, refusant la décision de renvoi de sa fille du lycée, une parente d'élève s'en prenait verbalement à une enseignante, dans un établissement secondaire situé à El Menzah 9. «Il est révolu le temps où l'enseignant était respecté par les parents et les élèves, souligne un professeur d'histoire-géographie, enseignant au lycée de la rue de Russie. Un accord tacite existait entre les parents et les enseignants afin que ces derniers interviennent également dans l'éducation des enfants. Aujourd'hui, c'est le contraire. Nous sommes face à des parents qui soutiennent leurs enfants même lorsque ces derniers sont dans leur tort. En cas de mauvaise note ou de sanction, ils s'en prennent systématiquement aux enseignants. En leur donnant raison alors qu'ils sont dans le faux, ils ne rendent pas service à leurs enfants». Le ministère de l'Education réfléchit actuellement à la mise en œuvre d'une stratégie pour circonscrire la violence en milieu scolaire et comprenant plusieurs axes dont la prévention, la détection des comportements violents et l'accompagnement psychologique des victimes de la violence. Cette stratégie sera intégrée dans la loi d'orientation sur l'éducation et l'enseignement ainsi que dans le décret organisant la vie scolaire. «Cette stratégie est destinée aux élèves et aux parents ainsi qu'au corps administratif et enseignant. Notre objectif est de sensibiliser ce dernier et d'instaurer un dialogue avec les parents afin d'endiguer la violence au sein du milieu scolaire», observe un responsable du ministère. Un travail de longue haleine pour lutter contre une mentalité coriace.