Comment raconter la journée du 14 janvier 2011 sans pour autant mettre en images les évènements qui ont précédé la fuite du dictateur? C'est ce que nous découvrons dans Mon14, un documentaire réalisé par Ismahane Lahmar d'après une idée de Amira Mimouni. Parmi la multitude de films sur la révolution tunisienne, Mon 14 se distingue par sa réalisation et par son point de vue, puisqu'il se base sur le récit et le vécu personnels de plusieurs protagonistes sur ce qui s'est passé dans cette journée historique qui a bouleversé le cours de l'histoire de la Tunisie. Loin des slogans, ce film se positionne dans l'émotion. Les personnes interviewées retracent, tel un puzzle, des faits et nous font partager une avalanche de sentiments où la peur et la stupeur se mélangent à la fierté d'un exploit de tout un peuple. Des histoires vraies, des faits réels, des témoignages de citoyens tunisiens dans les 24 gouvernorats du pays, le film essaie de retracer d'une manière narrative la réalité des faits tout en montrant la richesse la diversité des paysages de la Tunisie, la vie au quotidien restée à ce jour immuable, voire statique. La réalisatrice ne semble pas vouloir intervenir dans le quotidien de ces gens ordinaires qui s'avèrent être des protagonistes incontournables de la révolution. Le 14 janvier est une date qui a marqué tout un chacun. On en parle, on se remémore, on partage et on commente. La construction du film, simpliste en apparence, à cause de la succession d'interviews, s'avère complexe, tissée en filigrane. Chaque propos, exprimé face à la caméra discrète d'Ismahane Lahmar, s'imbrique avec la déclaration qui suit. Les mots qui sortent de la bouche de l'un complètent ceux de l'autre. Des visages d'hommes et de femmes de toute la République, des patelins les plus retirés que l'équipe du film a sillonnés durant des mois à la recherche du récit de la révolution, sont montrés dans leur simplicité, leur spontanéité. Chacun porte en lui une partie de la vérité des réalités d'une révolution qui s'est déclenchée le 17 décembre, voire bien avant, et qui s'est terminée le 14 janvier 2011. Sans prouesses techniques, le film est discret, et c'est de là qu'il puise son originalité. Mon 14, comme l'indique son titre, est une narration personnelle, où le subjectif est le maître mot, d'une révolution menée par des gens simples, une révolution qui est faite par tous ces intervenants ordinaires que les politiques ont fini par usurper. Ce film, fin et touchant, n'a pas eu droit à une sortie commerciale, comme c'est le cas pour beaucoup d'autres productions post-révolution, mais l'équipe, reconnaissante aux gens filmées, a entamé le mois dernier, une longue tournée à travers le pays afin de montrer le film à ceux qui ont bien voulu donner leur image pour témoigner. A partir du mois d'août, Mon 14 entame un long voyage dans différents festivals internationaux dont notamment le Festival des films du monde à Montréal, le Festival international du documentaire à Bilbao, Human Rights Watch international film festival aux USA, le Festival international de Chicago, le festival international de Hampton à New-York, le Festival international du film documentaire à Amsterdam, Edimbourg international film festival en Ecosse, le Festival international du documentaire à Marseille et le festival international du film de Doha. Bon vent!