Les travaux d'une conférence internationale sur la mise en place d'un mécanisme indépendant de suivi des droits de l'enfant ont démarré vendredi à Tunis, en présence d'experts tunisiens et étrangers et de spécialistes en droit et dans le domaine de l'enfance. Organisée à l'initiative du ministère des Affaires de la femme et de la Famille en partenariat avec l'Unicef, cette conférence vise à sensibiliser les membres de l'Assemblée nationale constituante (ANC), les représentants des institutions gouvernementales et des ONG ainsi que tous les intervenants dans le domaine de l'enfance à l'importance de la mise en œuvre effective des droits de l'enfant en Tunisie et de les amener à s'engager et à agir efficacement en faveur de la création d'une institution indépendante de suivi des droits de l'enfant. «Nous devons consacrer l'intérêt suprême de l'enfant et faire parvenir sa voix notamment quand il est sujet d'agression», a affirmé, à cette occasion, Mme Sihem Badi, ministre des Affaires de la femme et de la Famille. «Nous ne pouvons réaliser la justice transitionnelle, l'égalité et les droits de l'homme sans consacrer les droits de l'enfant», a-t-elle soutenu. La ministre a souligné l'importance de la mise en place d'un mécanisme indépendant de suivi afin que l'enfant puisse exprimer ses attentes et aspirations et dénoncer les violations. «Cette structure veillera à la préservation des droits de l'enfant à la protection, à l'éducation, à la santé, à l'enseignement et renforcera son rôle au sein de la famille et de la société», a précisé Mme Badi. «Une enfance saine est le garant d'un projet sociétal sain», a déclaré pour sa part M. Arbi Abid, deuxième vice-président de l'ANC. «Bien que la Tunisie dispose d'un arsenal juridique important dans le domaine de l'enfance, le volet institutionnel connaît plusieurs lacunes, d'où la nécessité de mettre en place des mécanismes et des programmes appropriés pour garantir l'application de la loi», a-t-il fait savoir. M. Abid a indiqué que le projet de la création d'une instance indépendante des droits de l'enfant permettra de pallier insuffisances grâce à la coordination entre toutes les parties concernées. Il a, en outre, mis l'accent sur la nécessité de réduire les écarts entre les enfants en milieu urbain et ceux en milieu rural. De son côté, Samir Dilou, ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, a souligné que l'affaire de la jeune fille violée par deux policiers est venue attirer l'attention de tous sur la nécessité de renforcer la protection des catégories fragiles notamment les femmes et les enfants. «Il faut du temps et des efforts pour renforcer la protection des citoyens de manière générale et des femmes et des enfants en particulier», a-t-il fait savoir. Il a mis l'accent sur la nécessité de constitutionaliser les droits de l'enfant et réformer le cadre juridique et institutionnel, soulignant l'importance de garantir l'indépendance de l'Instance supérieure des droits de l'enfant. Maria Luisa Fornara, représentante de l'Unicef en Tunisie, a souligné que les Etats membres ayant signé la convention internationale des droits de l'enfant, dont la Tunisie, ont une obligation d'exécution et de mise en œuvre des mesures pour le bon fonctionnement des services sociaux, des soins de santé et d'une justice adaptée aux enfants. Elle a rappelé que le comité international des droits de l'enfant a appelé la Tunisie à envisager la mise en place d'une institution indépendante de suivi des droits de l'enfant chargée de défendre et de promouvoir les droits des enfants dans le but de favoriser l'accélération de l'application de la convention onusienne. Mme Fornara a indiqué que l'Unicef accueille favorablement le projet d'inscrire dans le texte de la Constitution un article sur les droits de l'enfant et souligne l'importance de reconnaître explicitement dans cet article les principes fondamentaux des droits de l'enfant. Il s'agit, essentiellement, de reconnaître que l'enfant est un sujet jouissant, sans aucune discrimination de tous les droits prévus dans la législation nationale et les conventions internationales ratifiées par la Tunisie, que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être pris en compte dans toutes les lois, procédures et décisions le concernant et que la participation active des enfants, filles et garçons, dans tous les aspects de leur vie doit être garantie. Cette proposition a été prise en compte par l'ANC, a déclaré à la TAP Meherzia Laâbidi, première vice-présidente de l'ANC. «Nous veillerons, également, à garantir la protection des droits de l'enfant dans le préambule même de la Constitution mais l'important demeure dans la mise en œuvre de ces droits par le pouvoir exécutif». Dans un message adressé aux participants à cette conférence, Jean Zermatten, président du Comité international des droits de l'enfant, a souligné que le mécanisme indépendant de suivi est un mécanisme de protection destiné à surveiller l'action des autorités, à veiller au respect des droits de l'enfant et à dénoncer les atteintes dont ils font l'objet. «La mise en place d'une telle institution constitue un engagement de la Tunisie dans la reconnaissance et la mise en œuvre des droits de l'enfant et témoigne de l'acceptation par l'Etat de rendre des comptes au sujet de ses engagements», a-t-il fait savoir. Les travaux de cette conférence se poursuivront pendant deux jours.