Sur une échelle de 0 à 1, l'indicateur (ICA) de l'année 2012 a affiché une valeur de 0.625, dépassant, ainsi, largement la moyenne. Comparé à 2010, l'indicateur a gagné quelques centièmes de point. A première vue, c'est une bonne performance. Evidemment, la révolution a chassé les vieux démons des affaires qui ont pesé lourd sur les comptes des investisseurs privés et de l'Etat. Toutefois, dans ce nouveau contexte des affaires, de nouvelles donnes ont remonté au-devant de la scène. Ce qui explique le changement de la méthodologie de calcul de l'ICA, selon Mme Bakhta Ben Sassi, directrice centrale de la compétitivité. «Les formules de calcul sont toujours les mêmes, mais on a ajouté deux nouveaux facteurs, à savoir l'insécurité et la corruption, aux sept anciens», explique-t-elle. Désormais, l'appréciation des dirigeants des entreprises des neuf facteurs détermine le niveau de l'indicateur ICA. Donc, derrière cette valeur absolue de l'indicateur, plusieurs performances et contre-performances des facteurs ont tiré vers le haut ou vers le bas. Dans cette liste, «les dirigeants interviewés ont placé l'insécurité et la corruption parmi les premières contraintes du climat des affaires», précise la directrice, graphique à l'appui. Une infrastructure favorable De droite à gauche, l'axe tracé sur le niveau de la valeur de l'indicateur place les facteurs les plus favorables pour terminer avec celles les plus contraignantes. En tête de la liste des facteurs favorables aux affaires, aux yeux des dirigeants, la qualité des infrastructures se place avec une note de 0.73. Ce terme générique regroupe, selon la directrice, la desserte routière, ferroviaire, aérienne et portuaire ainsi que les services de télécommunications et les réseaux d'électricité, gaz et eau. «Toutefois, cette moyenne pourrait cacher des disparités dans certaines régions», relativise-t-elle. Evidemment, sur les côtes, à proximité des ports et avec une autoroute, les entreprises disposent de plus gros atouts, ne serait-ce que logistiques, comparé à un emplacement à l'intérieur du pays. Deuxième surprise, les entrepreneurs placent les ressources humaines en deuxième position des facteurs favorables aux affaires. Compte tenu du tas de critiques que l'on balance au système éducatif et à la qualité des diplômes, ce classement est assez surprenant. Assurément, l'abondance de la main-d'œuvre pourrait jouer en faveur des entrepreneurs qui négocieront sur le marché du travail des salaires de plus en plus compétitifs. Mais quand il s'agit de compétences pointues, les entreprises souffrent dans la recherche du bon profil. Entre les deux positions, il convient de préciser que les entreprises sont appelées à former la nouvelle recrue, diplômée ou non, aux spécificités du domaine d'activité et aux procédures de la firme. A cet égard, la directrice martèle : «Selon une autre étude, la période d'apprentissage pour devenir pleinement opérationnel ne cesse de s'allonger». Donc, ce facteur pourrait perdre des places lors des prochains classements. En troisième place, on peut identifier le facteur relatif au cadre macroéconomique et réglementaire. Pour ce facteur, la directrice suppose que les hommes d'affaires sont sensibles à la stabilité de la réglementation plutôt qu'aux niveaux des indicateurs macroéconomiques. La même analyse est aussi vraie pour le dernier facteur des procédures administratives et du système judiciaire. Les deux nouveaux critères sont ceux qui tirent le plus vers le bas. «Les deux nouvelles donnes sont perçues comme de sévères contraintes à la réalisation des affaires», ajoute la directrice centrale de la compétitivité. Le premier facteur, l'insécurité, «n'a pas été décomposé en sous-facteur», souligne la directrice. Elle englobe tout ce qui perturbe le fonctionnement normal des entreprises. Des grèves, sit-in et toutes les formes de revendications sociales au sein de l'entreprise jusqu'à la violence qui perturbe l'environnement de l'entreprise, les raisons sont multiples et la conséquence est le ralentissement, voire la suspension, de l'activité de l'entreprise. Placé au premier rang, il est révélateur de la situation précaire des entreprises. En effet, la majorité écrasante des sociétés ont subi les effets collatéraux de la révolution. Outre l'insécurité, dans le contexte d'après-révolution, le spectre de la corruption a plané sur les affaires, selon les chefs d'entreprise. Le graphique place ce facteur en deuxième position. Les statistiques afférentes à l'indicateur ICA indiquent que 34% des entreprises considèrent la corruption comme une sévère contrainte. «Il est vrai que la corruption n'est pas un phénomène nouveau, mais après la révolution, de plus en plus d'entreprises acceptent d'aborder ce sujet tabou», explique la directrice. En effet, 22% des entreprises se sont trouvées dans l'obligation de verser des pots-de-vin, alors que 17% des interviewés ont refusé de se prononcer, probablement un « oui » déguisé. Surtout que la majorité des entreprises sont favorables à toute réforme pour l'accélération des services. Selon les réponses des promoteurs, la douane et la police sont les secteurs les plus touchés par la corruption. Ces deux nouveaux facteurs, l'insécurité et la corruption, ont camouflé les autres contraintes, défaillances et dysfonctionnements. D'ailleurs, le facteur relatif aux pratiques sur le marché a basculé du premier au dernier rang des contraintes les plus sévères. De même, les charges sociales continuent leur tendance baissière. 40% des entreprises en 2006 considéraient ces charges comme une contrainte majeure, alors qu'en 2012, seulement le tiers des entreprises adoptent cette perception.