Le circuit parallèle du commerce fausse le jeu de la concurrence loyale. C'est pour cela d'ailleurs que les pouvoirs publics tiennent à assainir le secteur en rappelant à l'ordre ces vendeurs qui proposent, sur les routes, divers produits agricoles et surtout les fruits de saison fraîchement cueillis. Pourtant, les consommateurs ont un tout autre avis et considèrent que ces commerçants gagnent leur vie tout en fournissant aux citoyens, notamment ceux à revenus limités, des fruits frais et à bon prix. Ces vendeurs sont, eux-mêmes, de niveau de vie modeste et sont obligés de vendre les fruits sur les routes pour subvenir un tant soit peu à leurs besoins. Ils collaborent directement avec les agriculteurs en s'engageant à vendre les quantités produites et partager les bénéfices. Cette collaboration n'est pas faite sur la base d'un contrat écrit mais oralement. La confiance compte beaucoup dans de tels cas. Sans l'intervention des intermédiaires Ces vendeurs acceptent, en général, une marge bénéficiaire modeste pour pouvoir gagner la confiance du producteur. Ce commerce parallèle se développe au grand dam des intermédiaires qui invoquent toujours les frais de transport —qui ont augmenté suite à la révision à la hausse du prix du carburant— pour justifier la flambée des prix. Ils parlent aussi de la contrebande qui exporte illégalement ces produits vers les pays voisins et notamment la Libye ainsi que le fameux marché parallèle. Sur les routes de Bizerte, Nabeul, Le Kef, Sousse, les automobilistes notent la présence d'étalages à même le sol remplis de fruits de saison comme les fraises, les oranges et même les melons. Les prix affichés sur de grandes pancartes attirent l'attention des conducteurs dont plusieurs n'hésitent pas à s'approvisionner à moindre prix. A titre d'exemple, un kg d'oranges Thomson est vendu pour seulement 1 dinar alors que les fraises sont écoulées à 500 millimes la livre. Aucun rapport avec les prix pratiqués sur nos marchés! En été, on propose des pastèques, des melons, du raisin et même de la figue de barbarie, de la pêche. En hiver, place aux oranges de différentes variétés, aux pommes et aux poires... La vente du producteur au consommateur a toujours été payante dans la mesure où les prix connaissent une baisse appréciable. D'ailleurs, l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche a organisé une exposition-vente en son siège sans l'intervention des intermédiaires et a connu un engouement important de la part des consommateurs venus de plusieurs cités. Depuis la lueur de l'aube Les consommateurs contactés ont manifesté leur satisfaction quant à cette manifestation appelant à multiplier les espaces de vente et à les rendre permanents. C'est une façon de maîtriser les prix et de couper l'herbe sous les pieds des spéculateurs qui misent sur les quantités limitées d'un produit pour imposer leur prix fort. Le marché parallèle des fruits existe depuis belle lurette et tous les voyageurs à travers les routes connaissent ces commerçants qui ne disposent ni de patente, ni de local et encore moins de travailleurs. Ce sont les membres d'une même famille qui se mettent souvent à vendre, se contentant d'une simple tente improvisée pour s'abriter du soleil ou de la pluie. De plus, leurs produits sont frais et ne sont pas avariés contrairement à ce que l'on constate dans certains marchés municipaux où les marchands passent toute la matinée à mettre les bons produits en avant pour cacher ceux qui sont avariés. Certains vendeurs se contentent de leur camionnette qui sert pour la journée comme étalage. Munis seulement d'une vieille balance, ils passent le plus clair de leur temps à guetter le passage des automobilistes dans l'espoir de tomber sur un acheteur assez riche capable d'acheter de quantités considérables de produits et d'achever rapidement leur travail. Des produits de campagne sur place En fait, les vendeurs en question ne donnent pas assez d'importance à la question temps puisqu'ils sont sur place depuis la lueur de l'aube pour ne plier bagages que tard le soir. Certains utilisent des lampes à pétrole à l'arrivée de la nuit car les zones dans lesquelles ils travaillent sont dépourvues du réseau électrique. Les clients ne sont pas uniquement des consommateurs tunisiens mais aussi des touristes passant quelques jours dans notre pays. Certains bus touristiques marquent une pause près de ces vendeurs —sans doute sur proposition de leurs voyageurs— pour acheter des fruits de saison frais. Ils veulent goûter les produits de la campagne sur place en payant le prix. Parfois, l'on constate une file de voitures garées sur le bas-côté de la route, preuve que ces marchands sont achalandés. La floraison de ce type de commerce n'est pourtant pas bien vue par les autorités publiques compétentes et les professionnels qui exigent l'assainissement du circuit de distribution pour que tous les produits agricoles passent par les marchés de gros avant de parvenir aux marchés municipaux, seuls autorisés, selon eux, à vendre au détail. Mais malgré les opérations de contrôle entreprises, on n'est jamais parvenu à éradiquer totalement ce commerce parallèle. Des points de vente improvisés sont constitués de temps à autre dans un coin d'une route... Les agents de contrôle économique ne sont pas en mesure de couvrir d'une façon permanente tout le territoire national et surtout pas ces routes rurales éloignées des centres urbains. C'est que les vendeurs choisissent leur place en misent surtout sur les automobilistes de passage.