Existe-t-il une corrélation logique voire scientifiquement prouvée entre les maladies métaboliques et les pathologies psychiatriques? Les spécialistes en psychiatrie se sont penchés sur cette hypothèse dans l'optique de trouver un autre fil conducteur des maladies qu'ils traitent et afin de rendre – dans le cas d'une hypothèse confirmée — plus pertinente la prise en charge du malade. Partant de ce principe de recherche, plusieurs études ont été menées dans les hôpitaux et les CHU tunisiens, visant chacune à confirmer ou à nier un éventuel rapport de cause à effet ou tout simplement d'interactivité entre le physique et le psychiatrique. Certaines études ont été élaborées en se référant aux mutations du système immunitaire considérées dans ces cas comme des indicateurs significatifs. Parmi les études effectuées dans ce sens, figure l'étude transversale, élaborée sur un échantillon de 103 malades hospitalisés dans les unités psychiatriques, ,en vue de cerner le rapport entre deux maladies: la maladie coeliaque et divers troubles psychiatriques, dont la schizophrénie. Cette dernière préoccupe, par sa complexité et par son impact sur l'organisme du malade, un bon nombre de psychiatres qui s'adonnent à des études scientifiques, à même de les aider à mieux comprendre les secrets de cette pathologie. Pour ce, il était nécessaire de rechercher les symptômes de l'hypersensibilité au gluten auprès de ces malades par le biais de l'utilisation des anticorps anti-transglutaminase, les anti-endomysium et les anti-gliadines. Cette étude a fini par démontrer que les personnes souffrant de schizophrénie et de troubles bipolaires sont significativement plus touchées par l'hypersensibilité au gluten que les autres. D'autant plus que les caractéristiques propres à la maladie coeliaque présentent des différences notables chez les malades mentaux. Il faut dire que la schizophrénie est jugée comme étant une maladie mentale perturbatrice du métabolisme. Dès son premier épisode, elle favorise certains troubles métaboliques dont l'obésité abdominale, l'hyperglycémie ainsi que l'hypertension artérielle. La prévalence de ces troubles chez les schizophrènes sous traitements antipsychotiques serait en effet nettement plus élevée soit, au moins, le double. Suite à une étude prospective, élaborée sur un échantillon de 27 schizophrènes non soumis à des traitements antipsychotiques et reposant sur un diagnostic métabolique détaillé. Cette étude a démontré que les patients non soumis aux antipsychotiques présentaient une faible prévalence du syndrome métabolique. En revanche, l'administration du traitement favorise l'apparition des troubles métaboliques dont la prévalence se multiplie carrément par trois. D'où l'impératif d'un suivi pointu de l'état de santé des schizophrènes sous traitement. Interactions significatives Outre le recours à l'immunologie comme élément de base servant les pistes prospectives, les spécialistes en psychiatrie se penchent sur des études susceptibles de les aider à mieux comprendre les maladies dites psychosomatiques. L'idée étant de savoir si la maladie physique déclenche celle psychiatrique ou psychologique ou vice-versa. Une équipe de psychiatres s'est rendue à l'hôpital de pneumologie à l'Ariana pour un objectif bien déterminé: cerner le rapport de cause à effet entre le syndrome d'apnée de sommeil, d'une part, et les troubles anxio-dépressifs, de l'autre. Il est à souligner que le syndrome d'apnée du sommeil est une maladie qui consiste à perturber la qualité du sommeil à travers des troubles respiratoires plus ou moins graves, qui peuvent même provoquer la mort. Cette maladie touche 2% de la population mondiale féminine et 4% de celle, masculine. En présence, en outre, de troubles anxio-dépressifs, la prévalence prend de l'ampleur pour se situer entre 7% et 17%. L'étude menée sur un échantillon de 30 patients alités à l'hôpital de l'Ariana a démontré que le syndrome d'apnée du sommeil revient à des antécédents familiaux dans 10,7% des cas. Pour ce qui est des troubles psychiatriques, l'antécédent familial a été également relevé dans 7,1% des cas. Il est par ailleurs important à noter que le syndrome d'apnée du sommeil s'avère être sévère dans 64,3% des cas. D'autant plus que près de 50% de l'échantillon souffrent de troubles anxio-dépressifs. Les résultats de ladite étude ont prouvé la corrélation entre les deux maladies: Les troubles anxio-dépressifs ont été déclenchés par le syndrome d'apnée du sommeil dans 42,9%. Ce qui en dit long sur l'impact des maladies physiques sur l'aspect psychologique. Autre piste de comorbidité digne d'être analysée: l'interaction entre la maladie de Crohn ( maladie inflammatoire intestinale chronique ) et les troubles anxio-dépressifs. Ce sujet a également fait l'objet d'une étude prospective menée sur un échantillon de 70 patients souffrant de la maladie de Crohn. Les spécialistes ont pu déceler des troubles dépressifs chez 45,7% des patients dont 21,4% de dépressions jugées comme sévères. Manifestement, la maladie de Crohn influe sensiblement sur la santé psychologique et psychiatrique du malade; une influence encore renforcée par d'autres facteurs comme l'âge, le genre et l'ancienneté de la maladie.