De notre envoyée spéciale à Berlin, Hedia BARAKET Ce soir, les Allemands accueillent, sans surprise, l'annonce du 3e mandat de leur chancelière, mais non sans suspense, la configuration encore floue de leur futur gouvernement Berlin, jour j moins 1. Il est dix heures à Mockernstr, au cœur de Berlin. Dans le Temodrom, immense salle de concert, Angela Merkel tient son meeting de clôture, le dernier d'un long périple. A quelques heures seulement du vote, la campagne des élections législatives allemandes de 2013 n'est pas encore terminée. Ici, le silence électoral n'est pas de rigueur. Le rythme et la ferveur des meetings de la dernière minute veulent prouver que rien n'est encore tout à fait joué. Les partis en lice étirent les dernières heures dans l'espoir de changer le cours annoncé des sondages. Donnée favorite par tous les sondages avec 40 pour cent d'intentions de vote pour son parti, le CDU, Angela Merkel devra retrouver son fauteuil et briguer confortablement son troisième mandat de chancelière. Elle n'en peine pas moins à sauver la configuration de son actuelle coalition en courte avance du fait de la dégringolade de ses alliés libéraux. Au dernier sondage publié vendredi soir en Allemagne, le FDP, Alliance des partis libéraux, continue à chuter avec 5,5 pour cent des intentions de vote. Et c'est tout l'enjeu de cette campagne et de ces élections qui devront confronter les pronostics les plus évidents aux inconnues les plus décisives. L'avenir de l'Europe dans les urnes de l'Allemagne Une coalition forcément plus à gauche, comme celle annoncée avec le Parti social démocrate de Peer Steinbrück, son principal adversaire qui la talonne de loin dans les sondages avec 27 pour cent des voix, changerait économiquement la face de l'Europe encore plus profondément qu'elle ne bouleverserait socialement l'Allemagne. Et c'est tout le suspense de ces législatives de 2013 qui, de l'avis des observateurs, n'ont jamais été aussi européennes. Sous le slogan de campagne « Ensemble, nous réussissons», dans une foule de près de cinq mille personnes et dans une ambiance de grande fête orange, couleur de campagne, la candidate Merkel défendra jusqu'au bout son programme européen qui, explique-t-elle, «ne consiste pas autant à aider l'Europe qu'à faire prospérer l'économie allemande...» Sur le podium, elle part à la chasse des indécis: « Nous avons besoin de votre confiance et de vos voix pour continuer notre politique». Son public retrouve ce matin la «force tranquille» de sa chancelière «mystérieuse» et «rassembleuse». Allègre, elle les fera rire avant de retrouver son sérieux. Faisant allusion à son concurrent, elle cite la Bible: « L'arrogance précède la ruine et l'orgueil précède la chute». Fortement applaudie, la candidate Merkel, fidèle à son costume sobre, sa coupe inchangée, son sourire de petite fille et sa gestuelle rassurante, parle de «futur», de continuité, d'économie, de finances, d'éducation de famille, de mères... La gauche et les dessous d'un miracle Portée par le miracle économique allemand et sa résilience à la crise de la zone euro comptée à son actif, elle clôture son discours avec cette devise « Prospérité, Liberté, Démocratie». Angela Merkel sera restée inflexible sur les points de campagne de ses détracteurs : l'euro, la fixation des salaires minimums, l'augmentation des impôts sur les fortunes des riches et l'augmentation des retraites continueront à nourrir les campagnes des partis de gauche. D'une place à l'autre, sous les pluies abondantes de septembre, «Die linke», le parti d'Extrême gauche hérité de la période communiste de la RDA, les Verts, le SPD de Peer Steinbrück et le parti «Alternatives pour l'Allemagne» défendent, jusqu'à la dernière seconde avant les élections, une Allemagne plus égalitaire où il y a moins d'aide pour l'Europe et moins de précarités et d'inégalités sociales locales qui apparaissent derrière un taux de chômage des plus faibles en Europe. Une coalition avec les démocrates socialistes devrait, pour ce mandat ou le prochain, pousser l'Allemagne sur cette voie.