Les Tunisiens attendent beaucoup du nouveau sélectionneur. Ce dernier sera-t-il à la hauteur ? Toute la question est là ! Le nouveau patron technique de l'équipe de Tunisie, Georges Leekens, est attendu demain à Tunis pour entamer un bail de deux années dont l'objectif reste la qualification aux deux prochaines éditions de la Coupe d'Afrique des nations en 2015 et 2017. Sa première action consistera à compléter son staff technique, et à s'immerger dans l'atmosphère du foot national qu'il connaît assez mal. Il devrait se déplacer mercredi à Sfax pour suivre le choc du championnat de Ligue 1 : Club Sportif Sfaxien-Espérance Sportive de Tunis. On s'attend également à ce qu'il suive les séances d'entraînement du Club Africain et du Club Athlétique Bizertin afin de superviser les deux candidats au poste de sélectionneur-adjoint, Mondher Kebaier et Nabil Kouki. Deux autres noms sont cités pour ce même poste, Chihab Ellili, entraîneur du Stade Gabésien, et Ferid Ben Belgacem, libre de tout engagement. Le directeur technique national chargé des équipes nationales et du Centre national, Youssef Zouaoui, soumettra à Leekens les dossiers des candidats. Et c'est ce dernier qui choisira son futur assistant. La fédération y trouve là moyen d'imposer des techniciens du pays au sein du staff national, ce qu'avait rejeté Raymond Domenech, entre autres. «Long Knife» (Long couteau, son surnom) aura de suite l'occasion d'évaluer la valeur de l'effectif qu'il aura entre les mains. Les Aigles de Carthage vont, en effet, disputer deux matches amicaux, le 26 mai prochain contre la Corée du Sud à Séoul, et le 7 juin au stade Roi Baudouin de Bruxelles contre les «Diables Rouges» qu'il connaît parfaitement. En fait, à deux reprises,en 1997-1999 et en 2010- 2012, il avait été coach national de la Belgique. Du jeu, de la qualité et une attitude positive Le public sportif attend du technicien belge qu'il redonne une âme à un onze national malmené par une série d'échecs tout aussi retentissants les uns que les autres : élimination sans gloire au premier tour de la dernière Coupe d'Afrique des nations 2013, grosse désillusion au dernier tour qualificatif en Coupe du monde 2014 au Brésil, sans parler de la sortie de route de la sélection des joueurs locaux, éliminée du Chan, dont la Tunisie était détenteur du titre. Cette âme passe inévitablement par le jeu, la qualité et une attitude positive orientée vers la création, l'effort et l'offensive. Il n'a y pas d'ailleurs mystère à cela. L'image de marque a énormément souffert des inhibitions, limites et stratégies étriquées installées par les sélectionneurs au nom du réalisme et de la religion du résultat. Piocher, verrouiller, faire le malin si l'on peut s'exprimer ainsi ne mènent pas très loin. La seule attitude qui vaille consiste à mettre en valeur la qualité intrinsèque d'un produit qui montre de belles choses dans les compétitions africaines des clubs. Mais qui découvre subitement toutes ses limites dès qu'il est confronté au plus haut niveau, soit à des sélections africaines truffées de ses pépites qui jouent dans les plus grands championnats européens. La Tunisie ne possède pas actuellement un cru capable de résister à la classe des pros ghanéens, camerounais, nigérians...Et c'est prioritairement à ce niveau que Leekens va découvrir toute la difficulté de sa tâche. Il aura tout intérêt à marquer son territoire par rapport aux interférences quelles qu'elles soient. Venant de ses employeurs fédéraux, ou des grands clubs qui font ici la pluie et le beau temps. Seuls les sélectionneurs qui ont démontré suffisamment d'indépendance, de distance, de fermeté et de vigilance par rapport à ces lobbies ont réussi à la tête de la sélection. Leekens devra également accorder un intérêt particulier à l'aspect disciplinaire. Le Club Tunisie passe, ces dernières années, pour être un petit Club Med où un tas d'écarts disciplinaires et de conduites anti-professionnelles sont régulièrement dénoncés. Les fêtards doivent être écartés quels que soient leur statut ou leur influence sur le groupe et le jeu. Autrement, bonjour les dégâts ! Sur le plan technique, l'absence d'un buteur de métier a longtemps pénalisé la sélection nationale. Certes, avec ses 36 buts, Issam Jemaâ peut faire figure à trente ans de buteur patenté, mais le bonhomme est régulièrement vilipendé pour un certain ratage des occasions les plus faciles. Il faudra donner leur chance à Hamza Younès, à Khaled Ayari et à Hamdi Harbaoui, le goaleador du championnat belge, touché par une mesure d'interdiction de sélection suite à ses déclarations critiques après le fiasco de la CAN-2013. Peut-être le fait d'avoir exercé pour quelques mois à la tête de la sélection d'Algérie va-t-il aider Leekens à saisir à quel genre de difficultés il doit s'attendre chez nous. Le contexte et le contenu sont quasiment semblables. Il ne partira certainement pas avec le préjugé favorable que sait assurer un grand nom, que ce soit en tant que technicien ou en tant qu'ancien grand joueur. L'opinion sportive est ainsi faite. Le technicien belge de 64 ans doit réussir à donner un coup de jeune à une sélection fatiguée par les déboires et harassée par la critique. Et, en même temps, forcer son tempérament naturel d'ancien défenseur pour apporter aux Aigles l'éclat offensif qui leur fait défaut depuis les temps immémoriaux.