Une mesure qui vient contrecarrer et l'article 26 de la Constitution et les conventions internationales sur le droit d'asile... Quel serait le sort des réfugiés, qui avaient pris la Tunisie pour une terre de paix et d'asile si le camp de Choucha Ras Jedir fermait subitement ses portes ? L'hypothétique fermeture du camp résonne comme une sentence imminente pour les Africains qui y ont été placés depuis 2011. Des réfugiés qui ne cherchaient qu'à fuir un climat politique et sécuritaire, déclenché suite au conflit libyen. Selon M. Massaoud Romdhane, l'un des membres fondateurs du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes), le nombre de réfugiés installés au camp a remarquablement baissé, finissant par se limiter à une centaine, tout au plus. Cette baisse revient, entre autres, par le recours de ces désespérés à l'émigration clandestine en direction de la rive nord de la Méditerranée. Cette initiative illégale et hasardeuse risque de prendre plus d'ampleur, suite notamment à l'arrestation, le 27 septembre 2014 de Bamba Omar, un réfugié ivoirien, pour non-détention de papiers d'identité. Ce réfugié, qui a été acquitté le 9 octobre, figure pourtant sur la liste des réfugiés qui avaient afflué à Ras Jedir, munis d'un laissez-passer. Acquitté, Bamba Omar restera tout de même sur le qui-vive, puisqu'il comparaîtra, encore une fois, devant le tribunal le 16 octobre. Ce qui en dit long, d'ailleurs, sur le risque qu'il court, non pas pour avoir commis un délit ou pour avoir offensé la loi, mais juste pour être un réfugié en Tunisie. Cette situation ne concerne pas uniquement cet Ivoirien. Elle touche tout réfugié n'ayant aucune issue sauf de rester en stand-by dans l'espoir d'atteindre l'Europe et de pouvoir y vivre. L'Etat revient sur sa parole ! Certes, notre pays avait accueilli à bras ouverts les réfugiés africains et libyens, faisant ainsi preuve d'hospitalité et de respect inconditionné du droit d'asile et des conventions internationales en la matière. Cependant, ce sens de la responsabilité et de respect des droits de l'homme, et des réfugiés en particulier, semble s'effriter peu à peu. Aujourd'hui, il est question de fermer définitivement le camp de Choucha Ras Jedir. Se trouvant dans l'incapacité juridique d'expulser les réfugiés restants, l'Etat les placerait, probablement, au centre de détention des étrangers à El Ouardia. Un sort aussi cauchemardesque que d'être resté dans un terrain de conflit et de danger. «L'Etat avait pourtant promis, en juillet 2013, de leur livrer des permis de résidence à même de garantir leur droit d'asile ; une décision sitôt retirée. De son côté, le Haut commissariat pour les réfugiés semble baisser les bras, vouant les réfugiés à un sort incertain. Seule la société civile continue à défendre leur cause», souligne M. Romdhani. Le Ftdes condamne la potentielle fermeture du camp de Choucha, et recommande le respect du droit d'asile, conformément à l'article 26 de la Constitution, ainsi qu'aux conventions internationales. Il demande à l'Etat de doter ces réfugiés d'un statut juridique stable, notamment d'un permis de résidence à même de préserver leurs droits et de repenser les dossiers formulant une demande d'asile et ayant été rejetés en raison «d'un climat politique et sécuritaire tumultueux dans la région, en particulier sur les frontières tuniso-libyennes». Le Ftdes appelle les pays européens à accueillir les réfugiés africains fuyant la guerre et les conflits politiques conformément aux directives des conventions internationales sur le droit d'asile.