Les deux partenaires sociaux qui font la pluie et le beau temps, Ugtt et Utica, disent suivre de près le rendez-vous d'aujourd'hui, la teneur des débats, ensuite les premières décisions du gouvernement C'est aujourd'hui que le gouvernement dans sa deuxième version sera soumis au vote de confiance des représentants du peuple à l'Assemblée. Une étape constitutionnellement incontournable pour que les heureux désignés puissent regagner leurs ministères et secrétariats d'Etat. S'il est trop tôt de juger des nominations et degré d'adéquation entre les CV, les parcours personnels et les postes octroyés, quelques conclusions s'imposent déjà. Cette composition gouvernementale regroupant les grands partis qui se partagent la part du lion des sièges de l'hémicycle, mis à part le Front populaire et ses quinze députés, reflète un certain contentement qui a couronné d'âpres négociations visant les partages des postes de responsabilité. Grâce à ce mariage de raison, une majorité confortable est acquise avec à peu près 180 députés, alors que la majorité requise est de tout juste 109 voix. C'est plus qu'espéré. Sauf mauvais coup d'un partenaire, ce cabinet « bis repetita » de Habib Essid devra obtenir, sans trop de suspense, la confiance de la plupart des élus. De même, si cette idylle à quatre persiste, tous les projets de loi devraient passer comme une lettre à la poste. Ce qui semble moins acquis, en revanche, c'est, d'une part, la réalisation immédiate de la stabilité politico-sociale, compte tenu de la quantité de revendications sectorielles ; et d'autre part, la capacité de cette composition à entreprendre les grandes réformes et faire relever un pays qui tombe en morceaux depuis son économie, à ses routes en passant par le niveau de vie de ses concitoyens. Quoi qu'il en soit, les deux partenaires sociaux qui font la pluie et le beau temps, à savoir la centrale syndicale, Ugtt, et l'organisation patronale, Utica, disent suivre de près le rendez-vous d'aujourd'hui, la teneur des débats, ensuite les premières décisions du gouvernement. A priori, ils se disent par la voix de leurs représentants assez positifs et dans l'expectative. Que dit l'Ugtt ? Joint par La Presse, Samir Tahri, porte-parole de l'Ugtt, précise que pour la formation de ce gouvernement, l'Union a été consultée. Il se dit heureux que le gouvernement soit formé et que le vide politique, dangereux pour le pays, soit comblé, en ajoutant ; « Ce qui nous importe maintenant, c'est qu'il y ait de l'harmonie entre les différentes composantes du gouvernement. Il faut mettre en place un programme unique et cohérent et non pas chaque ministre applique celui de son parti. On ne vous cache pas que nous craignons des tiraillements entre les membres de l'équipe gouvernementale. » Pour l'Ugtt, la priorité des priorités, c'est de respecter les engagements pris dans les différents secteurs, de démarrer les négociations au titre de l'année 2014 relatives à l'augmentation des salaires, de prendre des mesures fermes pour stopper les augmentations des prix et de lancer quelques projets dans les régions défavorisées. Egalement, Sami Tahri recommande des mesures solidaires visant les chômeurs, telles que la création d'une caisse ou d'une prime de chômage. En ajoutant : «Nous avons une liste de revendications dont il faudra tenir compte en vue d'envoyer des signes positifs qui permettront au gouvernement de travailler dans la stabilité. Donc nous n'avons pas de réserves sur les personnes, conclut le porte parole de l'ugtt, celui qui veut travailler, nous allons l'aider, celui qui cherche un poste uniquement pour le prestige et les avantages associés à la fonction, celui qui n'a pas de vision, il n'y aura entre nous que le conflit et les confrontations ». Que dit l'Utica ? Joint par La Presse, Hichem Elloumi, vice-président de l'Utica, explique que l'organisation patronale a été consultée plusieurs fois au moment de la formation du cabinet 1 et 2 et ajoute : «Nous pensons qu'il y a dans ce gouvernement des personnes compétentes, nous avons émis des réserves sur certains profils, ce qui a été pris en considération mais de manière partielle. Nous sommes positifs par rapport à cette formation avec qui nous allons travailler. Ce qui importe pour nous, ce sont les priorités ». Pour l'organisation patronale, le volet sécuritaire est primordial. Ensuite viennent les décisions économiques urgentes, comme celles de débloquer les projets publics et soutenir les projets privés, mettre en place les mesures d'incitation à l'investissement et à la création de l'emploi. Le vice-président de l'Utica a insisté également sur la nécessité d'engager rapidement les réformes, en soulignant : « Nous en tant qu'organisation patronale, notre rôle c'est de relancer l'économie, de créer des emplois et de la croissance. Nous allons travailler avec le gouvernement et notre partenaire social, l'Ugtt. Pour nous, la paix sociale est un élément important, nous sommes pour la résolution des conflits sociaux, le respect des droits des travailleurs, et pour un dialogue constructif dans les entreprises. Mais on essaye de ne pas en arriver jusqu'aux conflits sous forme de grèves et notamment, de grèves illégales et empêchement de travail. Nous sommes pour le respect du code du travail. Tout en préservant les équilibres des entreprises, on espère atteindre une stabilité politique, et en tant que représentant du patronat, je suis optimiste ». Hichem Elloumi ne s'est pas empêché de faire remarquer avant de conclure que dans la deuxième version du gouvernement, un quota important a été accordé aux partis politiques au détriment d'indépendants, et qu'à cause de cet esprit de partage, des personnes ont été placées à la tête de départements qui ne relèvent pas forcément de leurs domaines de compétence. Ainsi, et après le grand oral d'aujourd'hui, c'est une nouvelle page de l'histoire de la Tunisie qui s'ouvre. Une page de labeur, de revalorisation du travail, d'esprit de mérite et de justice. Et après la révolution à proprement parler, c'est la révolution mentale qui aura finalement lieu, doucement mais sûrement.