En se mobilisant dans la lutte contre le cancer, le festival de Boukornine a rendu un immense service aux associations et aussi aux artistes éprouvées dans leur chair par cette implacable maladie qui continue de faire des ravages si l'on n'y prend pas garde. Le théâtre de plein air d'Hammam-Lif a vécu jeudi dernier une des plus belles soirées de ces dix dernières années avec le récital tout en tarab d'une vedette pas très connue sur la scène musicale mais cependant dotée de qualités vocales que lui jalouserait plus d'une vedette confirmée. Il s'agit de Awatef Attia, généreusement gâtée sur le plan séduction par Dame Nature. Exceptionnelle, la soirée l'a été puisqu'elle entendait agir en tant que plateforme dans la lutte contre le cancer, celui du sein notamment. De ce fait, elle a impliqué toutes les associations qui œuvrent dans ce sens ainsi que l'élite de la chirurgie carcinologique. Trois jours plus tôt, l'artiste Awatef Attia, une rescapée de ce fléau, était au centre d'un débat sur les méfaits de cette terrible maladie qui s'est tenu à l'hôpital Salah-Azaïez à Tunis. En début de soirée, le Pr Khaled Rahal, président de l'Association de lutte contre le cancer, a pris la parole pour insister sur la nécessité du recours à un diagnostic, une mammographie de plus en plus précoce du cancer qui permettrait, dans de nombreux cas, d'en obtenir la guérison au moyen d'un traitement ou de l'association de plusieurs interventions (chirurgies, radiations, chimiothérapie ou immunothérapie). Le cancer du sein touche chaque année un peu plus de 2.000 femmes en Tunisie. L'espoir est de mise La soirée baptisée «Musique et espoir» est une louable et combien heureuse initiative qui s'inscrit dans le cadre d'une décision présidentielle consacrant 2010, année nationale de lutte contre le cancer. Soutenue par un orchestre de quatorze solistes et choristes, dirigé par Mondher Tamar, clarinettiste et professeur de musique à l'ISM de Sousse, Awatef Attia, très élégante dans une superbe robe rouge très éthérée, a soulevé un tonnerre d'applaudissements dès son apparition sur scène. Dans la première partie du programme, elle a divinement chanté trois magnifiques chefs-d'œuvre de Warda Jazaïria. Avec une énergie débordante, elle évoluait avec infiniment de grâce et de sensualité sur toute la scène, refusant de la sorte les positions statiques qui la fixent au sol. Professionnelle jusqu'au bout des ongles, elle a laissé transparaître, sur ses traits, l'émotion qui jaillissait des mots, tantôt susurrés, tantôt criés et a galvanisé son public franchement sous l'emprise d'une frénésie jubilatoire qui s'exprimait par des ovations qui, certainement, lui faisaient chaud au cœur. Que d'émotions ! Dans la seconde partie du programme, la soirée nous a réservé bien des surprises. Après Alli gara, la plus belle chanson de l'immortelle Oulaya, disparue trop tôt alors qu'elle était au zénith de sa carrière, Awatef a été rejointe par ses deux sœurs cadettes, Nagette Attia et la benjamine Leïla Attia. La ressemblance est si frappante qu'on les prendrait volontiers pour des triplées. Le trio a interprété les succès de Nagette. Le public ne pouvait plus dissimuler une émotion qu'il n'était plus à même de feindre ou de contenir. Non encore remis de ses émotions qu'est apparue sur scène la célèbre comédienne et chanteuse Aziza Boulabiar, une autre victime du cancer, qui, avec beaucoup de tact et d'humour, a réussi à décompresser l'évidente tension qui régnait sur le public. Durant l'entracte, l'Association de lutte contre le cancer a projeté le spot de la réalisatrice Selma Baccar sur la sensibilisation à la mammographie où l'on voit la célèbre actrice Amèle Safta recommander aux femmes de se soumettre à un examen approfondi sur leur état de santé à partir de quarante ans. Un grand bravo au festival de Boukornine d'avoir soutenu efficacement cette noble action.