Drones en Tunisie : des mesures pour encadrer leur usage    Non-allaitement: Un silence couteux que la Tunisie ne peut plus se permettre    La SNIT met en vente de nouveaux logements à Sidi Hassine dès aujourd'hui    Ooredoo Tunisie s'associe à Dora Chamli pour promouvoir le padel et le talent tunisien sur la scène mondiale    1 Tunisien sur 6 touché par le diabète : un appel urgent à la sensibilisation    Météo en Tunisie : temps partiellement nuageux, températures en légère hausse    Nouvelle taxe sur la richesse : ce que les Tunisiens doivent savoir    La BTE franchit une étape stratégique: migration réussie vers le standard international SWIFT ISO 20022    Tougaï quitte le rassemblement des Fennecs    Démographie: Radioscopie d'une Tunisie en profonde mutation    Ooredoo Tunisie s'associe à Dora Chamli pour promouvoir le padel et le talent tunisien sur la scène mondiale    Une première intervention de chirurgie robotique en Tunisie réalisée avec succès à l'hôpital Charles-Nicolle de Tunis    Marathon COMAR de Tunis-Carthage dans une 38e édition : Courons pour une Tunisie plus verte    Siliana en action : 3 000 coccinelles mexicaines lancées pour sauver nos figuiers de Barbarie    Hikma Tunisie ouvre sa troisième unité de production à Tunis : Hikma Pharmaceuticals renforce sa présence en Tunisie    Hafida Ben Rejeb Latta ce vendredi à Al Kitab Mutuelleville pour présenter son livre « Une fille de Kairouan »    QNB Tunisia inaugure la première agence QNB First à Sfax    Tunis, prépare-toi : les matchs amicaux des Aigles se jouent plus tôt    Tunisie : 2000 bâtiments menacent la vie des habitants !    Quand Mohamed Salah Mzali encourageait Aly Ben Ayed    Ons Jabeur annonce une belle nouvelle : elle va devenir maman !    Météo du mardi : douceur et ciel partiellement voilé sur la Tunisie    La pièce Les Fugueuses de Wafa Taboubi remporte le Prix de la meilleure oeuvre de la 3e édition du Festival National du Théâtre Tunisien    Amina Srarfi : Fadl Shaker absent des festivals tunisiens    Dhafer L'Abidine à la Foire du Livre de Sharjah : Les histoires doivent transcender les frontières    Météo en Tunisie : averses isolées au nord    Sarkozy fixé ce soir sur sa libération    Tunisie: Financement de projets d'excellence scientifique    Décès du Pr Abdellatif Khemakhem    Match EST vs CA : où regarder le derby tunisien du dimanche 09 novembre 2025?    La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Nouvelles directives de Washington : votre état de santé pourrait vous priver du visa américain    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    L'Université de la Manouba organise la 12è édition du symposium interdisciplinaire "Nature/Culture"    Qui est Ghazala Hashmi, la musulmane qui défie l'Amérique ?    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    Taekwondo : la Tunisie s'impose parmi les quatre meilleures nations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Abdellaziz Ben-Jebria: L'Excision, une Pratique en Pleine Expansion
Publié dans Leaders le 18 - 10 - 2023

L'excision (E), ou plus correctement appelée "Mutilations Génitales Féminines (MGF)", est une procédure chirurgicale rudimentaire de pratique ancestrale qui consiste en l'ablation partielle ou totale des organes génitaux externes féminins. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), on estime qu'il y a, de nos jours et à l'échelle mondiale, plus de 130 millions de filles et de femmes qui ont subi L'E/MGF, et que chaque année plus de 3 millions de filles supplémentaires subiraient ce genre de pratique. Les conséquences délétères, d'ordres physiques, psychologiques et sexuels, de l'E/MGF chez ces excisées sont nombreuses et bien documentées.
D'abord qu'est-ce que l'excision?
Cette procédure était auparavant généralement connue par le terme de "circoncision féminine". Mais lorsqu'elle a connu des échos dépassant les communautés qui la pratiquaient traditionnellement mais discrètement, la terminologie de "Mutilation Génitale Féminine" a été adoptée, en 1991, suivant la recommandation de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). C'est une appellation plus réelle qui reflète concrètement non seulement l'horreur de la procédure elle-même mais aussi l'importance de ses conséquences inhumaines et de ses effets délétères sur la santé des filles et des femmes excisées. Suivant les endroits, l'excision (E) est pratiquée sur des nourrissons de quelques jours, sur des fillettes âgées de 7 à 10 ans, et sur des adolescentes ainsi que sur des femmes adultes au moment de leur mariage.En collaboration avec l'UNICEF, et d'autres organisations des Nations Unis, l'OMS propose la définition et la classification de l'E/MGF en cinq différents types:
Type I- clitoridectomie: il s'agit de l'incision du prépuce, bourrelets de peau entourant le clitoris, avec ablation partielle ou totale de ce dernier (partie génitale externe sensible et érectile de la femme).
Type II-excision: c'est une procédure qui consiste en l'ablation du clitoris, et souvent des petites lèvres; elle est la plus fréquemment pratiquée.
Type III-infibulation ou excision pharaonique: ce type se rapporte à l'excision partielle ou totale des organes génitaux externes, suivie de la suture des grandes lèvres avec rétrécissement de l'orifice vaginal pour ne laisser passer que l'urine et le flux sanguin menstruel.
Type IV-inclassable: il s'agit d'une série d'interventions nocives, et non thérapeutiques, exercées sur les organes génitaux féminins engendrant la mutilation sexuelle féminine; elles incluent notamment la ponction et l'incision du clitoris, l'étirement de cet organe et/ou des lèvres, la cautérisation du clitoris et des tissus adjacents par des brûlures, et l'introduction des substances et des herbes corrosives dans le vagin afin d'induire son resserrement et son rétrécissement.
Type V-symbolique: Il s'agit des pratiques, dites symboliques, se réalisant dans le cadre des cérémonies rituelles, et consistant en la piqûre du clitoris avec une aiguille pour faire apparaitre quelques gouttes de sang symbolique. Ces pratiques n'impliqueraient pas de mutilations sexuelles.
Quelques aspects historiques
L'origine précise de l'usage de l'excision est peu connue des chercheurs historiens. Cependant, il existe des textes antiques qui témoigneraient de sa pratique bien avant l'apparition des religions monothéistes. Par exemple, il semblerait que l'excision des femmes Egyptiennes remonte à plus de cinq milles ans avant Jésus-Christ, et qu'elle aurait été pratiquée à l'époque des pharaons ; d'ailleurs on a pu retrouver des momies égyptiennes excisées. C'est peut-être pour cela que l'infibulation (type III) porterait aussi le nom d'excision pharaonique qui est très pratiquée en Egypte, au nord du Soudan et en Afrique de l'Est. Plus tard, mais avant l'apparition l'Islam, les pays de la corne d'Afrique justifiaient les fondements mythiques d'usage de la procédure en rapportant que l'on pratiquait l'excision pharaonique sur les filles pour les protéger contre les viols au moment des razzias arabes.
L'excision en général et la clitoridectomie en particulier ne se limitait pas aux pays africains; elle se pratiquait aussi en Europe au 18ème, 19ème et même au début du 20ème siècle. En effet, le fameux gynécologue, Isaac Baker Brown (1811-1873), membre du "Royal College of Surgeons" (1848) et président de la "Medical Society of London" (1865), pratiquait déjà couramment l'intervention chirurgicale de la clitoridectomie et recommandait son usage pour soigner plusieurs conditions d'épilepsie, d'hystérie et de catalepsie. Il revendiquait même, dans son diagnostique, que la masturbation féminine était à l'origine de ces maladies nerveuses. Cependant, après une série de controverses, parues dans "Lancet" et "British Medical Journal", le docteur Baker Brown a été exclu de la présidence de la "Medical Society of London" et a perdu son poste de gynécologue à l'hôpital londonien, St Mary, qu'il a co-fondé en 1845. À la suite de ces événements, Il n'a jamais pu rétablir sa carrière jusqu'à sa mort en 1873. Ceci n'a malheureusement pas empêché la clitoridectomie de continuer à être pratiquée, jusqu'en 1935 aux Etats-Unis, dans des hôpitaux psychiatriques et des prisons, pour prévenir la masturbation féminine et traiter le lesbianisme.
Quelques prévalences géographiques mondiales
Selon l'OMS, parmi les 130 millions, ou plus, d'excisées à travers le monde, environ 120 millions d'entre elles vivent dans une trentaine de pays africains qui forment une large bande allant notamment du Sénégal et de la Mauritanie à l'ouest (côte atlantique) jusqu'à l'Egypte et la Somalie à l'est (corne de l'Afrique). L'excision est aussi pratiquée, dans une moindre mesure, dans certains pays d'Asie (Malaisie, Indonésie, Inde, Pakistan) et du Moyen-Orient (Irak, Oman, Yémen). Cependant, les pays occidentaux de l'Europe, du Canada, des Etats-Unis d'Amérique et de l'Australie, ne sont pas épargnés par le développement de ce phénomène, touchant ainsi et essentiellement des fillettes immigrées qui subissent secrètement et illégalement des mutilations génitales.
La prévalence varie considérablement d'un pays à l'autre et parmi les communautés à l'intérieur d'un même pays, à cause du facteur ethnique. Mais, pour illustrer cette ampleur, notons que l'excision est presque universelle dans quatre pays où la prévalence est au dessus de 90%, notamment en Somalie (98%), en Guinée (96%), en Djibouti (93%) et en Egypte (91%, plus de 27 millions). Elle est, tout de même, proche de 90% au Mali (89%), en Erythrée (88%), à la Sierra-Leone (88%) ou au Soudan (88%, plus de 12 millions). Cette prévalence est, néanmoins, très élevée au Gambie (76%), en Burkina-Faso (76%), en Ethiopie (74%, plus de 23 millions), en Mauritanie (69%), au Liberia (66%) et en Guinée-Bissau (50%). Elle varie entre 10% et 40%, au Tchad, en Côte d'Ivoire, au Kenya, au Nigeria (20%, plus de 20 millions), au Sénégal, en Afrique Centrale, au Yémen, en Tanzanie, au Benin et en Irak. Elle est en dessous de 5% au Ghana, au Togo, au Niger, au Cameroun et en Ouganda.
Pour élargir cette prévalence à travers le monde occidental, les "Centers for Disease Control and Prevention (CDCP)" estiment qu'il y aurait au moins 200 000 fillettes qui risquent d'être forcées à subir une forme d'E/MGF aux Etats-Unis d'Amérique ; ce chiffre est probablement une sous-estimation de la réalité car ce phénomène, qui est un tabou mais qui est interdit depuis 1997 aux USA, est pratiqué secrètement par crainte de persécutions. En outre, l'excision concerne environ 170 000 et 53 000 femmes, respectivement en Angleterre et en France.
Les risques sanitaires de l'E/MGF
L'Organisation Mondiale de la Santé a répertorié une longue liste de conséquences physiques, psychologiques et sexuelles chez ces femmes. Les complications immédiates des procédures de l'E/MGF peuvent inclure des douleurs aiguës, des hémorragies, des infections avec absence de cicatrisation et même des décès. Quant aux conséquences à long terme, il peut s'agir de l'incontinence urinaire ou de l'obstruction chronique des voies urinaires, des douleurs endurées, des difficultés fréquentes au travail et des complications lors de l'accouchement. Les conséquences sexuelles sont évidentes car l'ablation partielle ou totale du clitoris, qui est l'organe génital externe le plus sensible de la femme, entraîne inévitablement des altérations de la sensibilité sexuelle. En outre, les souffrances endurées et chroniques des femmes excisées ainsi que leurs incapacités de retenir leurs urines et même leurs selles entraineraient des complications psychologiques telles que des angoisses, des dépressions voire même des tentatives de suicides.
Conclusion
Bien que des organisations internationales sérieuses, telles que l'OMS, l'UNICEF ou les CDCP Américains, ont répertorié de nombreuses conséquences sanitaires néfastes chez les filles et les femmes ayant subi ces formes d'excision, il est très surprenant de constater que la plupart des procédures de l'E/MGF sont pratiquées, de nos jours, par du personnel de santé, notamment des infirmières et des sages femmes. Ce qui est encore plus surprenant c'est qu'en Egypte, par exemple, non seulement plus de 70% de ces interventions sont pratiquées par des médecins féminins mais qu'en plus elles se passent, pour la plupart du temps, chez les parents des victimes, quelquefois sans anesthésiques. Enfin, une simple question s'impose: comment peut-on expliquer que des femmes médecins, ayant reçu une éducation élevée en santé publique, peuvent justifier ces pratiques et continuent à être impliquées, au 21ème siècle, dans ce jeu traditionnel anti-féminin?


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.