Les salariés de la Banque franco-tunisienne (BFT) n'en démordent pas. Après avoir organisé plusieurs rassemblements de protestation devant la siège de la banque, les agents et cadres de cette filiale de la Société Tunisienne de Banque (STB) ont manifesté, hier, devant le siège du ministère des Finances pour exiger des réponses de la part des autorités de tutelle sur l'avenir de l'établissement de crédit. «Les activités de la BFT sont relativement gelées depuis environ un an et demi et la situation sociale des salariés ne cesse de se détériorer. Nous réclamons aujourd'hui des réponses claires sur l'avenir de la banque et de ses employés », a souligné le secrétaire général adjoint du syndicat de base de la banque, Zied El Kefi. «Au lieu de plancher sur la récupération des créances de la banque auprès de plusieurs entreprises, dont le montant global s'élève à quelque 270 millions de dinars, la direction générale se croise les bras et continue à gérer très mal la BFT comme si elle cherchait à pousser l'Etat à annoncer sa liquidation», a-t-il ajouté. Le responsable syndical a également fait état de l'existence au niveau de la banque d'«une poignée de personnes qui s'échine à dénigrer toute action visant à sauver la banque pour préserver ses propres intérêts et passer sous silence les dépassements de l'actuelle direction générale». Les protestataires n'ont pas pu rencontrer le ministre des Finances qui avait des engagements liés à l'élaboration de la loi des Finances 2018. «Nous avons pu nous entretenir ave le chef de cabinet du ministre qui nous a promis d'ouvrir le dossier de la BFT à compter du 15 octobre », précise Zied El Kefi. Selon lui, le syndicat de la base de la BFT teindra aujourd'hui une Assemblée générale qui décidera des prochaines protestations visant à amener le ministère des Finances à clarifier l'avenir de la BFT. A noter dans ce cadre que la Fédération du personnel des Banques et des Assurances (FPBA) rattachée à la Confédération générale du travail française (CGT) a publié, hier, une motion de soutien aux salariés de la BFT et dénoncé les agissements des autorités tunisiennes et de la direction générale de la banque. «Nous adressons notre soutien ferme et inconditionnel aux travailleurs de la BFT qui sont en lutte depuis des années pour conserver leurs emplois », a indiqué la FPBA, tout en dénonçant «les agissements du gouvernement, du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie et de la direction générale de la BFT qui «souhaitent se débarrasser coûte que coûte de cette banque dans des conditions occultes». Pour rappel, le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi, tribunal arbitral de la Banque mondiale), qui statue sur l'affaire qui oppose depuis près de trente ans l'Etat tunisien à ABCI Investments, ancien actionnaire de la BFT, a confirmé la responsabilité de la Tunisie dans l'expropriation illégale de la banque. Il n'a pas cependant fixé le montant des dommages, objet d'une procédure distincte. ABCI, qui était l'actionnaire majoritaire de la BFT, a été spolié par le clan Ben Ali. L'Etat tunisien compte désormais se retourner contre les signataires de l'amnistie dont a bénéficié Majid Bouden, le représentant légal d'ABCI, en 2012. M. Bouden avait été condamné, en 1994, à vingt ans de prison officiellement pour «mauvaise gestion» durant son mandat de président non exécutif du conseil d'administration de la BFT. En 1989, M. Bouden, avait signé un protocole aux termes duquel ABCI se retirait de la BFT sans réclamer des dommages. Aux yeux du Cirdi, le fait qu'il ait été amnistié après la révolution équivaut à reconnaître implicitement la responsabilité des gouvernements successifs dans l'expropriation illégale des parts d'ABCI dans la BFT.