Leila Haddad, avocate des victimes de l'affaire de la chevrotine de Siliana, a annoncé que le Tribunal militaire de première instance du Kef a décidé de clore l'instruction et de traduire quatre sécuritaires devant la Chambre d'accusation de la cour d'appel militaire de la ville. Annonçant avoir déposé un appel contre ce jugement, Me Haddad a indiqué qu'Ali Laârayedh, ministre de l'Intérieur à l'époque, ainsi que d'autres anciens cadres du ministère ne seront pas inquiétés. Le 15 février 2015, Ali Laârayedh était revenu sur l'affaire, lors d'une déclaration accordée à la radio Mosaïque FM, en expliquant qu'à l'époque des protestations des habitants de Siliana, il avait le choix entre ordonner l'utilisation des balles réelles ou voir le siège du gouvernorat saccagé et brûlé. L'intéressé a ajouté que le responsable des opérations, qui était sur place, avait pensé à l'utilisation de la chevrotine qui est ‘un moindre mal' ; cela a permis la maîtrise de la foule sans pour autant qu'il n'y ait de morts. Une déclaration qui n'a apparemment pas été prise en compte lors du jugement en question ; en sa qualité de ministre de l'Intérieur, Ali Laâreyedh a certainement été mis au courant des décisions prises par les unités d'interventions se trouvant sur place avant que ces dernières n'aient intervenu. L'affaire de la chevrotine de Siliana, survenue fin novembre 2012, avait agité tout le pays après que les protestataires, presque tous les habitants de la ville, l'aient quittée, en geste symbolique, prenant le chemin de Tunis à pieds. Personne ne peut oublier les images qui nous sont parvenues de Siliana avec des jeunes dont les visages étaient ensanglantés, défigurés ; certains d'entre eux avaient même perdu qui la vue, qui un oeil ... Des jeunes et des moins jeunes qui étaient sortis protester contre le gouverneur de la région ; un gouverneur qui a été fortement défendu par Hamadi Jebali, chef du gouvernement de l'époque. L'affaire de la chevrotine avait été au coeur de la polémique en Tunisie surtout après l'intervention d'Ali Laârayedh le soir du mercredi 28 novembre 2012 (aux JT de la watanya 1 de la télévision tunisienn ) où il avait accusé l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) et le leader de la Gauche, assassiné quelques semaines plus tard, Chokri Belaïd, d'avoir été derrière les violences de la ville. Belaïd, qui était lors de la déclaration de Laârayedh en voyage au Maroc, n'avait pas hésité à répondre à ces accusations à son retour, à l'aéroport Tunis-Carthage. Ce verdict, bien qu'il soit en première instance, vient perturber encore plus la scène politique qui est déjà prise dans de grands débats qui empêchent tout le pays d'avancer. Une nouvelle déception de voir, un jour, la vérité, sur l'affaire de Siliana, sur l'affaire du 9 avril 2012, sur les assassinats de Belaïd, de Brahmi ou encore de Naguedh, apparaître enfin au grand jour.