Carthage « 2 » a fini par céder au niveau des soutiens porteurs parce que dès le départ il y avait malentendu sur ses objectifs. Le Président de la République garant et soucieux de la sécurité nationale, de la continuité de l'Etat et par ricochet de la paix sociale, a répondu positivement aux différents appels des partis et syndicats ouvriers et patronaux, pour faire « l'audit » de l'action gouvernementale en vu de réajustements plus ou moins en profondeur dans certains départements jugés moins efficaces que d'autres. Deux choses sont venues compliquer les choses et les procédures. D'abord la publication de certains chiffres sur la relance de la croissance à 2,5% avec perspectives positives, d'ici fin 2018, pouvant atteindre les 3%, si la courbe ascendante du Tourisme et des extractions minières et énergétiques se confirment, en plus du bon parcours de l'agroalimentaire, des industries textiles et du cuir et surtout le retour des investisse urs locaux et étrangers. D'ailleurs, ceci vient d'être confirmé par l'agence de notation « Fitch » qui maintient la Tunisie au même rang de la notation « B+3 » donc positive, tout en exprimant des réserves sur la « stabilité politique »... Comme quoi les problèmes de ce point sont essentiellement dus à la faillite, ou presque, de sa nouvelle classe politique, totalement déconnectée, des réalités du pays et du monde. Par ailleurs la fixation de l'UGTT rejoint un peu plus tard par Nida Tounès (de Hafedh Caïd Essebsi), sur la nécessité du départ de Youssef Chahed, président du gouvernement, à qui on reproche « des échecs » à bien des niveaux, comme l'inflation à 7,7%, la fonte de nos réserves en devises pour ne couvrir que 73 jours d'importations... purgatoire jamais atteint depuis la fin de l'ère Mzali en 1986, et surtout la cherté de la vie qui a décimé en bonne partie la classe moyenne, qui de tout temps et universellement, a toujours constitué le véritable support des systèmes politiques et sociaux stables. Cette campagne anti-Chahed a frisé la « croisade » du côté de Taboubi, qui a engagé un bras de fer jamais vécu depuis 1978 avec le gouvernement, voire l'Etat tout entier. Or la suspension de Carthage « 2 » ne semble pas avoir apaisé le premier secrétaire de la centrale syndicale historique. Bien au contraire et sa déclaration à la sortie du Palais présidentiel en dit long sur le ressentiment du bonhomme : « Je ne garantis plus rien » et l'UGTT n'est plus engagée par le processus de Carthage... (1 ou 2) il faut comprendre l'ensemble du processus, ce qui indique un conflit majeur en vue avec le Sommet de l'Etat y compris la présidence de la République ! Pourtant la démarche de BCE, est, on ne peut plus logique et rationnelle. « Vous voulez changer le gouvernement ». Eh bien le seul chemin à prendre c'est le Bardo et l'ARP ! Là, les choses ne sont pas aussi simples, car les débats à l'hémicycle de l'ancienne « Salle du Trône » du Bey, ne sont pas faits pour être expéditifs... bien au contraire. Ça risque de trainer en long et en large, avec les discours fleuves des députés des partis de droite comme de gauche, sans oublier les périphéries de Nida Tounès qui détient sur le papier plus de la majorité à presque 60% sans toutes ces fissures encore saignantes. Maintenant que faut-il déduire de tout cela, et en vue de quelles prévisions !? Primo, le gouvernement Chahed n'est pas éjecté vers la sortie du grand portail de la Kasbah. Ceci au niveau de la forme... Sur le fond, le gouvernement est quand même affaibli. Youssef Chahed devrait à notre humble avis procéder au moins à un remaniement « partiel » pour clamer les esprits après consultation et rétablissement des canaux de négociations et du compromis avec l'UGTT et son secrétaire général Noureddine Taboubi... « Paris vaut bien une messe », et c'est bien le cas de le dire ! Mais, ce qui est à craindre c'est qu'après toute cette « croisade », Youssef Chahed devienne encore plus dépendant du Parti islamiste Ennahdha et son président incontournable Rached Ghannouchi. Ce dernier a encore une fois démontré toute sa maîtrise et son art de convertir la faiblesse en force, puisqu'il récupère tranquillement et sans gros tapages, toute la ferveur populaire autour de Chahed et surtout le ressentiment d'une grosse partie des classes moyennes contre la position de l'UGTT (Taboubi) jugée trop déstabilisatrice pour l'économie et le pays tout entier. Côté UGTT, il serait suicidaire d'engager le pays vers les zones de turbulences graves, comme celles du bassin minier en 2015-2016, ou d'autres grèves cycliques dans d'autres domaines. Là encore il serait, plus que recommandable, que l'UGTT fasse preuve de patience, et de responsabilité pour juger du cas par cas, et non pas focaliser sur le départ de Youssef Chahed et du gouvernement dans son ensemble, Taboubi sait bien que l'UGTT est un acquis national majeur et qu'une partie de sa force de frappe et d'influence, elle l'a tient de sa proximité avec l'Etat, le pouvoir et les gouvernements successifs depuis l'ère Bourguiba ! La Tunisie peut se relever plus rapidement qu'on le croit, si la sagesse et la responsabilité priment des deux côtés. Si la croissance refait surface et fait bond à plus de 3% l'UGTT telle même en tirera profit... Alors... gardons espoir et optimisme, au lieu de jeter de l'huile sur le feu et pousser à l'irréparable, par les amateurs politiciens qui raffolent de l'anarchie globale destructrice. Le monde d'aujourd'hui est compliqué au plus haut point, et cette complexité ne peut être résolue que par les professionnels qui ont de la patience et de l'expérience au niveau des Etats. L'amateurisme... c'est fini... et tous les Etats se mettent à l'école du pragmatisme et du rationalisme ! La Tunisie n'a aucun autre choix !