Le dixième rendez-vous des Iles Kerkennah avec le Festival du Poulpe est une nouvelle invitation au partage de moments de liesse, à la détente et aux délices de l'envoûtement printanier dans un environnement encore épargné par les méfaits caractéristiques du développement industriel irréfléchi.. Cette nouvelle et dixième session est également une opportunité avouée, pour l'archipel, de se valoriser, perpétuer ses traditions et ses spécificités culturelles séculaires, promouvoir son image et se signaler en vue d'une meilleure appréhension de sa situation et de ses besoins. Il est de fait, en effet, qu'en dehors de la saison estivale caractérisée par le considérable flux des estivants avec ses corollaires socio-économiques et environnementaux, les Iles Kerkennah vivent par intermittence de périodes furtives d'affluence massive, d'animation et de dynamisme, l'espace d'un de ses trois festivals, pour replonger par la suite dans une certaine monotonie, voire d'inertie prolongée. Aussi, le Festival du Poulpe, allie-t-il à sa dimension culturelle et festive, une épaisseur, scientifique et économique préméditée. A vrai dire, les composantes de la manifestation sont difficiles à différencier et encore moins à dissocier. Pour les besoins de la cause, disons que la composante la plus manifeste est sans doute d'ordre culturel, ayant en point de mire la valorisation des différentes expressions du patrimoine local : art culinaire, habit traditionnel, pêche, musées, folklore. Tout un trésor que le Festival s'emploie à mettre en évidence, à révéler et à faire apprécier, tout autant par les jeunes insulaires que par les visiteurs. De quoi conférer aux Iles une vocation touristique de premier plan et mettre à la disposition des promoteurs un filon inestimable, en l'occurrence, l'atout écologique, un privilège rare par les temps qui courent et dont il conviendrait de faire une source de revenus et une mamelle nourricière généreuse et durable, de l'économie locale. Aussi, est-il souhaitable d'asseoir une stratégie pérenne de développement à même d'arrimer les jeunes à leur archipel par le biais d'activités rentables destinées à combler le déficit exponentiel en matière de richesses halieutiques, harcelées et soumises à une surexploitation sans scrupules. Pour s'en rendre compte, il n' y a qu'à se référer au déclin des méthodes de pêche traditionnelle, à la baisse inquiétante des prises et même à la raréfaction du poulpe lui-même, un produit emblématique, source de richesse et de notoriété, considéré comme l'ambassadeur majeur des Iles Kerkennah. Mais il n'y a pas que les mesures touchant la promotion de l'agriculture, la sauvegarde de l'environnement, le développement du créneau touristique ou la préservation des richesses en poissons. Le transport est considéré, à juste titre d'ailleurs, par les habitants de l'archipel, comme étant la pierre angulaire de tout processus et de toute action de développement. A ce propos, tout en appréciant les efforts consentis en matière d'acquisition d'unités de transport maritime en vue de réduire au maximum l'isolement de Kerkennah, les habitants, demandent à ce qu'un décalage horaire des traversées soit opéré de façon à programmer le dernier départ de Sfax, à 20 heures au lieu de 18h30 dans le but de prolonger l'activité jusqu'à 22 heures sur l'archipel, sachant qu'à l'état actuel des choses, toutes les activités commerciales, de transport et autres y cessent vers le coup de 20 heures. Cette mesure, insiste- t- on ne signifie pas une quelconque augmentation du nombre de dessertes entre l'archipel et Sfax. Toujours au volet transport, nous croyons savoir que la Sonotrak envisage de mettre en service, à partir du mois de juillet prochain, un nouveau car-ferry présentant les mêmes caractéristiques que la dernière unité acquise l'été dernier. Sur un autre plan, un constat d'ordre démographique devrait interpeller davantage dans la mesure où le dernier recensement fait état de 13500 habitants contre 14006 lors du recensement précédent et ce du fait de la tendance croissante à l'émigration. A l'origine deux phénomènes : soit la recherche d'un emploi sur le continent, soit l'accompagnement d'un fils ou d'une fille nouvellement admis au baccalauréat et inscrits dans l'une des institutions de l'enseignement supérieur de la ville de Sfax. Conséquence : « L'archipel est en train de se vider de ses habitants, ce qui a amené à la fermeture de deux écoles primaires », répète-t-on. Solution proposée pour fixer les résidents :la mise en place d'un noyau d'enseignement supérieur spécialisé dans des cursus comme : les sciences de la mer, la pêche ou le tourisme, soit une institution ouverte aux étudiants originaires des gouvernorats limitrophes. Pour revenir aux multiples objectifs du Festival du Poulpe, il y a lieu de s'interroger sur le degré d'harmonie entre les intentions affichées et le contenu de la 10ème édition. En d'autres termes, il s'agit de voir dans quelle mesure, le programme de la manifestation est conforme aux engagements de base, des organisateurs. Du point de vue animation et festivités, il y a lieu de signaler les traditionnels volets musicaux, spectacles pour enfants, tournois et compétitions sportives. Concernant les activités culturelles, la session propose différentes activités au menu varié dont deux compétitions de préparation de repas à base de poulpe, la première, inter-villages , et la seconde entre les établissements hôteliers et les restaurants. Outre les différentes expositions de photos, d'artisanat et d'arts plastiques. Le volet scientifique est lui aussi, riche d'activités telles la soirée astronomique, et plus particulièrement la conférence centrée sur le thème : « Les causes de la baisse des richesses de la mer, notamment, le poulpe et les éponges ». C'est une opportunité de choix pour faire passer le message à qui de droit en vue d'attirer l'attention sur les menaces qui pèsent sur les richesses halieutiques de l'archipel et obtenir des mesures plus fermes et plus soutenues visant à réglementer les pratiques de pêche, à sévir contre la pêche agressive et à faire respecter le repos biologique de façon à permettre la régénérescences des espèces, le tout pour détourner les jeunes de toute idée d'émigration. La nouveauté dans la programmation est incontestablement le circuit touristique. L'activité sera rehaussée par la présence d'une quarantaine de journalistes français, belges, italiens et anglais, en visite en Tunisie sur invitation du Festival « El Ksour » à Tataouine. C'est une action promotionnelle de premier ordre, destinée à faire connaître et apprécier le produit touristique spécifique de l'Archipel. Le départ est prévu à Sfax, à bord d'un car-ferry le dimanche 23 mars. A l'issue de la traversée, l'itinéraire sera jalonné de visites à différents sites et au Musée El Abassia avec , comme moments forts , la sortie en mer et la partie de pêche traditionnelle dite « Chrafi » ainsi que la reconstitution de scènes de la vie quotidienne et de cérémonies traditionnelles, de dégustation de spécialités culinaires typiques à base de poulpe et de poissons...