Dans plusieurs pays du monde, les vacances d'été ont vécu et les cours ont déjà repris. Sous nos cieux, la rentrée la plus proche est prévue pour la semaine prochaine et concerne seulement les établissements du Supérieur. Mais il n'est pas dit qu'elle sera effective du côté des étudiants car il y a de fortes chances que bon nombre d'entre-eux rejoignent instituts et facultés après l'Aïd. Il s'agit principalement de tous ceux qui n'habitent pas dans les villes où ils sont inscrits. Pour des raisons financières ou administratives, ils continueront à profiter chez eux des vacances les plus longues de l'année. Les enseignants non plus ne reprendront réellement les cours que fin septembre ou après l'Aïd. Non seulement, ils dépendent fort logiquement d'ailleurs du retour effectif de leurs étudiants, mais même l'administration contribue à repousser un peu plus l'échéance de la véritable reprise (emplois du temps pas encore aménagés, problèmes de salles ou de matériel, défaillance de quelques enseignants etc.). Des vacances qui s'étirent avec une telle élasticité permettent-elles pour autant aux enseignants, aux élèves et au personnel administratif d'être fins prêts le jour J pour entamer une nouvelle année scolaire ou universitaire réussie ? L'effet bénéfique des vacances est-il tributaire de leur durée ou de leur qualité ? Pourquoi, de nos jours enseignants et élèves s'enquièrent-ils avec autant de fébrilité des dates de congé et des jours fériés et multiplient les prétextes pour s'absenter un jour ou une semaine de plus ? Ni les vacances d'été, ni celles accordées au cours de l'année ne sont, paraît-il, suffisantes pour la récupération des forces et la bonne reprise du travail. Pourquoi en sommes-nous arrivés à voir des professeurs de l'Université choisir leurs jours de travail en fonction du calendrier des congés de l'année suivante ? Pourquoi certaines enseignantes enceintes s'ingénient-elles à faire coïncider la date de leur accouchement avec le début du deuxième semestre ? N'est-ce pas pour bénéficier de quatre mois chômés (deux mois accordés d'office plus deux autres de prolongation autorisée), auxquels viendraient s'ajouter bien évidemment les trois mois de l'été !
Les nouveaux promus en cause M.Ahmed Jedaaoui (professeur du secondaire) distingue entre deux générations d'enseignants : pour lui, les nouveaux promus voudraient faire de l'année entière un congé de longue durée. « Ils ne fournissent pas les efforts qu'on attend d'eux et c'est d'autant plus grave que leur formation trahit -eux-mêmes le reconnaissent- d'inquiétantes lacunes. Certains imputent leur démotivation à leur salaire très insuffisant à leurs yeux. En ce qui me concerne, et en dépit de mon ancienneté dans la profession, je fais toujours preuve du même enthousiasme, quelle que soit la date à laquelle on fixe la rentrée des classes. C'est une question de conscience professionnelle qui du reste ne concerne pas que le personnel enseignant ou les fonctionnaires d'une manière générale. ».
Une amicale pour les vacances des enseignants ! Pour M.N.Sellami, une bonne reprise des cours dépend à la fois de la qualité et de la durée des vacances. « Malheureusement l'immense majorité des enseignants ne profite pas pleinement du congé prolongé de l'été : quelques jours sur la plage, quelques soirées dans des fêtes de famille, sinon c'est tout le temps le café et les abrutissantes parties de belote ou de rami. Les professeurs et les instituteurs ne peuvent s'offrir des vacances dorées dans les hôtels ou à l'étranger. La cherté de la vie et les petits projets familiaux ne laissent rien aux loisirs. L'idéal serait de créer une amicale des enseignants que le ministère financerait en partie et qui prendrait en charge nos vacances et celles de nos enfants, sur le modèle adopté dans le secteur de la Santé et celui des grandes banques. ». Concernant les vacances d'été qui traînent en longueur chez nous, M.Sellami rappelle que ce sont les conditions climatiques qui en ont décidé ainsi : « Pas un seul élève ne suivra votre leçon convenablement par une chaleur atteignant 40 degrés (parfois plus) à l'ombre. L'enseignant lui-même ne saurait supporter de travailler dans pareilles conditions ! ».
Des administrateurs sans vacances Les cadres de l'administration ont, sur la question des vacances, plus de doléances que les enseignants (il leur arrive en plus d'assurer certains cours) : un directeur d'école jure que, pendant cet été, il est passé des dizaines de fois dans son bureau pour régler des problèmes divers. « Je m'occupe de tout en fait ; le gardien de l'école a bénéficié de plus de temps de repos que moi et il m'est arrivé d'accomplir les tâches qui sont les siennes ! ». M.N.K. (ancien proviseur de lycée) a tenu à rappeler que, dans l'enseignement, les administrateurs n'ont qu'un mois de vacances : « C'est même exagéré de parler d'un mois entier puisque vous êtes constamment sollicité par vos suppléants pour des renseignements urgents. Des fois, vous vous trouvez obligé d'interrompre le congé pour rejoindre votre établissement ou bien pour vous rendre à une réunion au ministère ou encore pour rencontrer des responsables régionaux. ».
Impardonnable incurie Il semble par ailleurs que le personnel des établissements ne soit pas le seul à manquer de tonus à la rentrée : les murs eux-mêmes sont à plaindre. « On n'entretient pas assez les écoles et les lycées, assure un parent d'élève. L'autre jour et en accompagnant ma fille à son collège, j'ai pu constater l'impardonnable incurie qui prévalait sur les lieux. Nous sommes à quelques jours seulement de la rentrée, mais les écoles et les lycées n'ont pas encore fait leur toilette pour l'heureux événement ! Allez savoir d'ailleurs pour qui la rentrée est aujourd'hui une circonstance réjouissante ! ».