Venant de Houmma (chaleur) en arabe, le mot Hammam, veut dire littéralement ce qui donne chaud. Nos ancêtres étaient persuadés des multiples et incontestables vertus du Hammam. Outre le fait qu'il a un effet purificateur, surtout pour une société musulmane où les ablutions sont indispensables pour la prière, le Hammam est bénéfique à plus d'un titre. Rien ne vaut en effet un Hammam pour ménager sa santé et prévenir les rhumatismes, et les multiples courbatures surtout après un bon massage prodigué par un masseur agile ou un « Tayeb » chevronné. Ce fut la raison pour laquelle il fut dénommé le médecin muet, dont les médications valent de loin, d'après eux, celles d'un toubib en chair et en os. Pour les femmes, le Hammam n'a rien d'égal pour se faire belle et garder constamment leur teint de jeunesse. Il faut dire qu'en Tunisie la tradition des bains chauds existaient depuis les Romains qui avaient institué des thermes dans plusieurs régions. Chez les Arabes, la notion de bain a été développée surtout avec l'avènement de l'Islam, en tant qu'élément purificateur. Il est en effet indispensable dans certains cas de faire les grandes ablutions, c'est-à-dire de se laver entièrement avant de faire la prière, ou pendant les rites du pèlerinage. A l'aube de l'Islam, s'il n'y avait pas de bains publics, les musulmans accordaient désormais une grande importance à la purification par l'eau. Il est énoncé dans un verset coranique : « On a créé de l'eau tout ce qui est doté d'une vie ». L'eau est ainsi en Islam synonyme de vie. Selon un autre verset le Trône divin est sur l'eau. Ayant donc une acception divine, l'eau est sacrée. Elle a des effets bénéfiques pour les croyants et maléfiques pour les incrédules. Le Pharaon n'a-t-il pas péri en effet noyé ? Tandis que pour Moïse, l'eau est devenue une plate forme pour l'aider à franchir la mer . En tout état de cause, l'effet purificateur est incontestable en Islam. Les bains ont commencé à exister chez les Arabes, à l'ère des Abbassides sous le règne de Haroun Errachid. Lorsque les envoyés de Charlemagne ont franchi le seuil du palais abbasside, ils avaient attiré l'attention de leurs hôtes par leur odeur répugnante. Haroun Errachid ordonna à ses valets de leur faire prendre un bain avant de les rencontrer. En fait c'était le moyen-âge en France, où on ne connaissait pas de bains et où on attachait pas d'importance à la propreté . D'ailleurs, même plus tard, Louis XIV, le roi soleil, se contentait pour toute toilette de passer une éponge à peine humide sur la figure et sur quelque parties du corps. A cette époque les bains étaient dèjà de mise surtout chez les Abbassides. Il faut croire que le Hammam existait déjà en Tunisie à l'ère Hafside. Cependant ce fut avec l'avènement des Ottomans que les Hammams ont pu proliférer et se développer de manière accrue. En effet durant l'empire ottoman, le Hammam s'était développé pour connaître une destination autre que celle pour laquelle il a été institué à l'origine. Il devint de plus en plus un lieu de défoulement pour les hommes et une occasion aux femmes pour se rencontrer. En Turquie les « Dallek » ou masseurs étaient plutôt des jeunes esclaves qui faisaient tout ce que les clients désiraient comme sortes de massages. A un moment donné le Hammam était un lieu de débauche pour les hommes . Cependant , sous Kamel Ataturk, les « Dallek » étaient devenus de simples masseurs, qui n'étaient plus des esclaves et qui travaillaient normalement moyennant rétribution. Quant aux femmes qui n'avaient pas le droit de quitter leur foyer, elles y trouvaient un moyen pour se libérer en joignant l'utile à l'agréable, puisqu'elles avaient l'occasion de se faire belle, en se teignant et surtout en s'épilant. En Tunisie, le Hammam était également un moyen donné aux femmes pour sortir du foyer qu'elles n'avaient pas le droit de quitter surtout quand elles étaient jeunes. Les Hammams étaient généralement réservés aux hommes durant les matinées et aux femmes les après midi, celles-ci étant occupées le matin à préparer les repas. Cependant quelques Hammams étaient strictement réservés aux hommes. Il y en a qui le sont encore jusqu'à nos jours , tels que Hammam El Kachachine, à la Médina, entre Souk El Blat et la Médressa Slimania. Les Hammams étaient anciennement conçus de façon telle que celui qui vient pour prendre un bain puisse également se rendre chez le coiffeur installé juste à l'entrée. Le coiffeur, ou barbier prodiguait également quelques médications tel que le fait de poser des ventouses pour ceux qui se plaignait de mots de têtes ou de courbatures. Il pratiquait également les circoncisions sur des petits garçons. Mais généralement pour cette tâche il se déplaçait le plus souvent chez l'intéressé. A l'intérieur du Hammam, il y a trois différents espaces . Le troisième et le plus chaud car là que se trouve la chaudière qui procure de l'eau chaude et c'est là qu'il y a le plus de vapeur. Certains malades de rhumatismes y passent le maximum de temps avant de se déplacer à l'espace moins chaud où un « Tayeb » les attend pour un bon massage. Un autre espace est disposé de cabines individuelles qui servent aux toilettes et aux ablutions. Pour les hommes, les serviettes étaient procurées par le gérant du Hammam qui veillait aux conditions d'hygiène en se gardant de ne pas omettre de laver les serviettes une fois ayant servi pour une seule personne. Tandis que les femmes étaient tenus d'amener leur propres serviettes dans leurs bagages . Il faut dire que pour les femmes c'était toute une expédition d'aller au Hammam. Elles emmenaient en effet tout le nécessaire de toilette avec quelques fruits, dont notamment des oranges , afin mieux déguster le plaisir de ces moments agréables du hammam, et de se donner du punch et mieux résister à la vapeur . Par ailleurs, outre le fait qu'il soit un lieu de purification et de cure, le Hammam sert également à célébrer certaines cérémonies. La mariée est accompagnée par quelques jeunes filles et la Hannana, quelques jours avant le mariage, pour se faire une beauté. C'est une vraie fête qui a lieu à cette occasion. C'est la Hannana qui était chargée de faire toute sa toilette à la mariée : épilation avec un produit magique qu'elle préparait à l'avance, avec du sucre additionné de citron. Badigeonnage de la peau au barouk, un autre produit pour rendre la peau d'une blancheur éclatante. Elle est encouragée par les youyous de toutes les femmes présentes sur les lieux. Mais de nos jours, avec la prolifération des centres de beauté, la Hannana qui existe encore n'a plus qu'un rôle très limité. La mariée revisite le Hammam, avec le même cérémonial, au septième jour du mariage. Le marié se rend lui aussi au Hammam avec ses amis et ses proches pour un bon bain chaud avant le jour J. Il y va de même pour un garçon, quelques jours avant sa circoncision. Le Hammam reste-t-il encore de nos jours un lieu de cure et de purification, malgré la prolifération des salles de bains dans les nouvelles habitations ? En tout état de cause , les Hammams bien que de plus en plus modernisés de nos jours, gardent ce côté magique et bénéfique de toujours. Rien ne vaut un bain de vapeur, pour se libérer d'une grosse fatigue et se trouver une bonne forme. C'est vérifié, et c'est satisfait ou remboursé !