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Les femmes méditerranéennes entrepreneures et la psychologie économique
Energie d'entreprendre
Publié dans Le Temps le 05 - 05 - 2009

Le thème « Femmes entrepreneures » est au centre des débats dans divers centres de recherches à travers le monde. Le CERES, première Institution de Recherches fondée au cours des années soixante en Tunisie, a circonscrit le thème aux pays méditerranéens.
Plusieurs chercheurs ont répondu à l'argumentaire et leurs travaux ont permis aux participants d'avancer dans leur réflexion consacrées aux femmes entrepreneures dans les pays méditerranéens en articulation avec la psychologie économique.
C'est aussi la première rencontre qui fait croiser les regards entre femmes et chercheur (e)s.
Mme Lilia Labidi qui fait partie du comité d'organisation ainsi que du comité scientifique du colloque, a bien voulu nous éclairer sur cet événement qui est le premier du genre.
Professeur de psychologie et d'anthropologie à l'université de Tunis, Lilia Labidi a publié de nombreux travaux et ouvrages, organisé et participé à des conférences nationales et internationales, mis en place des programmes de formation, participé à des projets de développement, fondé et pris part à des associations professionnelles.
De renommée mondiale pour ses travaux et recherches, Lilia Labidi a enseigné en France, en Egypte, aux Etats-Unis, à Malte et en Suisse.

• Economia : Quelle est l'opportunité de ce colloque dans un monde qui court à sa perte avec l'effondrement du modèle capitaliste et ses conséquences et en quoi réside son intérêt ?
-Lilia Labidi : C'est le premier colloque organisé par le CERES (Centre d'Etudes et de Recherches Economiques et Sociales), portant sur le thème : « Les femmes entrepreneures dans les pays méditerranéens » qui a eu lieu du 16 au 18 avril dernier, avec la participation de la Tunisie, du Maroc, de l'Algérie, de l'Egypte et de la Turquie.
Il faut dire qu'actuellement, il y a une très grande dynamique à l'échelle du Monde Arabe où les femmes entrepreneures sont de plus en plus actives et ce qui est nouveau, c'est qu'il y a des chercheurs qui s'intéressent de plus en plus aux femmes entrepreneures.
Si on rappelle la place prépondérante occupée par les femmes dans l'histoire économique dans le monde musulman, on constate qu'il y a plusieurs figures de femmes qui peuvent être considérées comme des icônes dans ce domaine.
Sayeda Khadija, commerçante de son état et épouse du Prophète Mohamed, était une femme valorisée et financièrement indépendante. Elle était la première personne à avoir authentifié sa parole. Leur couple a vécu monogame jusqu'à la mort de celle-ci.
Ensuite, il va y avoir plusieurs femmes dans l'histoire qui vont être des reines et dont la monnaie du pays va être frappée en leurs noms comme les deux reines du Yémen, Asma et sa belle-fille Arwa, qui ont régné au XIème siècle ou Sit al Mulk (XIème siècle), et Shajaret al Dur (XIIIème siècle), en Egypte.
Pour vous dire que les femmes ont toujours joué au fil de l'Histoire, un rôle important dans le monde arabe et musulman. C'est une histoire à réécrire...
Aujourd'hui, nous sommes dans un contexte totalement nouveau avec la crise financière qui sévit dans le monde et l'échec des modèles. Il serait bon d'étudier l'approche des femmes dans le domaine économique. Or, l'intérêt particulier de la tenue du colloque réside dans le fait qu'il y a eu confrontation d'idées et de points de vue entre les chercheurs et les femmes entrepreneures (une quarantaine) ; de celle qui a besoin d'un micro-crédit pour financer son projet à celle qui fait un chiffre d'affaires de plus d'un milliard par an.

Penseriez-vous que les femmes ont une vision différente de celle des hommes du capitalisme ?
-Je dirai qu'elles ont une vision écologique de l'économie. Elles ne sont pas dans la seule accumulation des biens et ont par conséquent une vision éthique de l'économie qui consiste à faire du bien aux autres : sa famille et la société.
Dans ce colloque, il ne s'agit pas d'exclure les hommes, mais de mettre en commun la vision des femmes et celle des hommes, de procéder à une concertation de vues, de partager les expériences.
Ce que je considère comme étant nouveau dans le domaine de la recherche, c'est que nous avons eu dans le colloque, outre les chercheurs étrangers, des chercheurs tunisiens venus des universités de Sfax et de Sousse. Je pense que c'est quelque chose de magnifique et de positif car cela prouve qu'il y a une nouvelle dynamique au niveau du savoir mais également, une nouvelle dynamique centrale générée par la décentralisation des universités.
Par ailleurs, ce qui était aussi intéressant, c'est que nous avons eu des femmes entrepreneures de plusieurs régions : Hammamet, Le Kef, Sousse, Kairouan, Gafsa et Tunis.
L'autre nouveauté c'est que beaucoup d'intervenants communiquaient dans les trois langues : arabe, français, anglais, alors qu'avant, il fallait des interprètes, ce qui coûtait une fortune pour les organisateurs.

Quels étaient les principaux axes du colloque et les recommandations qui en résultaient ?
-Il y a eu l'articulation entre l'objet (femmes entrepreneures), la psychologie économique et les droits des femmes. Tels étaient les axes parmi l'ensemble des travaux qui indiquent l'importance d'un tel sujet.
Parmi les recommandations du colloque : la nécessité de créer un centre de recherches qui se consacre à cette thématique.
Certes, il y a eu en Tunisie quelques recherches sur ce sujet, publiées par le CREDIF, CAWTAR et par des associations. Si ces publications sont importantes, elle ne sont pas suffisantes parce qu'il faut maintenant passer à une étape supérieure, celle de l'accumulation des connaissances pour en dégager une théorie spécifique à la région.
L'importance d'un centre comme celui-ci permettrait que le débat ne soit pas épisodique, mais devienne régulier pour renforcer les échanges entre chercheurs et femmes entrepreneures.
C'est un centre qui donnerait une visibilité aux femmes entrepreneures et qui pourrait travailler en partenariat avec la Chambre des femmes chefs d'entreprises.

Pourquoi insisteriez-vous tant sur un tel projet ? N'est-ce pas votre souci de toujours mettre la femme au devant de la scène ?
-Parce qu'en fait, nous avons besoin de repenser la socialisation de nos enfants.
Nous avons besoin d'éduquer les filles avec la perspective de l'autonomie, de la prise d'initiative et de créativité. Ce qui est en opposition totale avec le modèle actuel malgré les progrès faits dans le domaine de la question des femmes.
L'importance dans la psychologie économique est fondamentale. Elle peut expliquer pourquoi des projets échouent ou pourquoi certaines personnes ont-elles des comportements pathologiques vis-à-vis de l'argent.
Aujourd'hui, l'argent est au centre des relations entre les personnes. L'économiste Keynes avait reconnu la dimension psychologique dans l'économie et se disait préfreudien.
Et Freud, lui-même contemporain de Keynes, s'est intéressé à l'argent qu'il avait articulé avec l'un des stades de la sexualité.
Par exemple : dans un article intitulé « Truth claims in the cartoon world of Nagui Kamal », paru en Egypte, j'avais montré comment la caricature peut renseigner sur les tensions psychiques et économiques d'une société.
La caricature comme la photo ou les annonces de décès, sont des sources d'information sur la psychologie d'une société. Depuis quelques années, nous lisons de plus en plus, des lettres adressées aux morts dans la rubrique nécrologie ce qui nous renseigne beaucoup sur le travail du deuil, non-fait.

Vous vous déplacez beaucoup à l'Etranger pour enseigner ou donner des conférences, avec pour bagages, vos articles, travaux et ouvrages sur la femme. Après Vienne, vous êtes sollicitée par les States. On aimerait en savoir davantage sur ce parcours...
-J'ai participé au mois de décembre dernier à un congrès à Vienne, organisé par la Ligue Arabe et l'Union Européenne pour favoriser le dialogue entre ces deux régions.
Ma communication portait sur : « Comment l'histoire des femmes ne pouvait pas être écrite dans la région, à partir d'un seul point de vue ».
C'est-à-dire, la nécessité d'analyser le discours colonial tenu sur les femmes musulmanes qui se perpétue aujourd'hui, comme si les femmes musulmanes au regard occidental, avaient besoin d'être sauvées. Il suffit de voir ce qui s'est passé ces dernières années en Afghanistan et en Irak.
Par ailleurs, pour que ces communautés travaillent pour la paix dans ces régions, il faut créer des institutions d'éducation communes, des universités communes. Il y a certes une université euro-méditerranéenne, mais elle n'est pas suffisamment connue. Or, il faudrait multiplier de telles initiatives.

Où en sont actuellement vos recherches et quelle est à votre avis, l'issue possible pour produire une science psychologique qui réponde aux besoins de notre société ?
-Ce que j'ai tenté de construire au cours des dernières années, c'est de montrer comment certains faits, pourtant minimes, sont révélateurs d'un grand changement psychologique dans notre société.
A titre d'exemple, les familles n'exposent plus le drap le lendemain du mariage et les filles, victimes de violence sexuelle et de viol, n'hésitent plus à se défendre et à dénoncer de tels actes.
Ces seuls faits montrent que la femme n'accepte plus le statut de victime et que nous devons réfléchir à de nouveaux rapports entre les sexes, ce qui n'est pas encore fait. Parce que s'il est facile de penser le passé, il est difficile d'imaginer le futur et, pour cela, la littérature, l'autobiographie, le théâtre sont de grandes sources d'inspiration pour nous. En parlant de la famille, je parle de la psychologie et en parlant de la psychologie, je fais une critique de la psychologie coloniale et de l'expansion de la psychologie occidentale comme modèle.
Pour moi, l'articulation entre la condition de la femme et la psychologie, comme discipline dans le Monde Arabe, est importante. C'est la seule issue que nous avons pour produire une science psychologique qui réponde aux besoins de notre société.
C'est d'ailleurs, ce cours que je vais donner dans une université américaine l'an prochain.
C'est aussi, quelque chose sur laquelle je travaille depuis plusieurs années et à propos de quoi j'ai déjà publié un texte sur les productions des femmes psychiatres arabes quant « au rapport psychiatrie et sexualité ».
Propos recueillis par Sayda BENZINEB


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