La jeunesse tunisienne avait activement pris part au militantisme, dès l'avènement de la colonisation. Les luttes armées contre l'occupation française qui eurent lieu à travers plusieurs régions du pays du nord au sud, étaient menées par des jeunes tels que Ali Ben Khlifa et bien d'autres qui étaient prêts à sacrifier leurs vies pour la libération du pays. En 1907, le mouvement "jeunes tunisiens" était, comme son nom l'indique, mené par des jeunes comme Ali Bach Hamba et ses compagnons. Plus tard, dans les années 1924, le mouvement social fut mené par M'hamed Ali qui incita au soulèvement des travailleurs, les dockers tunisiens pour dénoncer les conditions d'exploitation dont ils faisaient l'objet sous le régime colonial, alors que le jeune Tahar Haddad qui lui prêtait main-forte, dénonçait en même temps la condition de soumission et d'infériorité, de la femme tunisienne par rapport à la femme coloniale. Dans les années 1930 ce fut aux jeunes intellectuels de prendre la relève au mouvement national en s'insurgeant contre le colonialisme à travers leurs multiples écrits, qu'ils fussent des poèmes, pièces théâtrales, ou autres œuvres de différentes natures. Le jeune poète de génie, Aboul Kacem Chabbi a dans sa poésie, pourtant romantique et affectueuse, réservé une large part à la dénonciation du colonialisme. Ne s'est-il pas en effet, exclamé dans l'un de ses poèmes : "Je ne pleure pas de languir au cours d'une longue nuit ou certains vestiges disparus au fil du temps. Je verse plutôt mes larmes à cause de cette lourde calamité qui s'abattit sur nous et auquel personne ne put y remédier". La calamité qu'il insinuait était cette situation qu'endurait le peuple par la colonisation. Dans un autre poème, un vers bien connu où il incitait le peuple à réagir, a été inséré parmi les paroles de notre hymne national : "Le jour où le peuple décide de vivre Force est au destin d'exaucer son vœu Force est à la nuit de se dissiper Force est aux fers de se rompre". D'autres jeunes intellectuels avaient participé par leurs articles dans plusieurs journaux d'opposition de l'époque dont Echabab, dirigé par le jeune Beyram Ettounsi, le parolier et critique social bien connu, ou Annadim qu'avait fondé le poète humouristique et non moins militant Hassine El Jaziri, qui connut plus d'une fois les affres de la prison à cause de ses critiques acerbes où il dénonçait avec ferveur les méfaits du colonialisme. Un groupe d'intellectuels "Taht Essour" qui se réunissaient à Bab Souika, au cœur de la Médina, était formé par des jeunes qui avaient tant enduré eux-mêmes par cette conjoncture où aucun autochtone ne pouvait prétendre à un travail au même titre qu'un Français, celui-ci étant nettement favorisé. Ils avaient donc donné libre cours à leur plume pour décrire et dénoncer cette déplorable situation, de plusieurs manières et sous différentes formes. Le jeune Ali Douagi, déplorait la situation d'une jeunesse tunisienne défavorisée qui se réfugiait dans la drogue et l'alcool pour noyer ses soucis. Quant au jeune journaliste et critique, Abdelaziz Laroui, il participait par ses articles dans des journaux tels que le Croissant pour décrire à la manière de Molière, la situation de l'époque. Des organisations de jeunesse avaient participé à la lutte nationale, et subi de multiples sévices et exactions par les autorités coloniales. Parmi ces organisations, citons les scouts tunisiens dont notamment le militant et martyr Mongi Bali, ainsi que la jeunesse destourienne parmi laquelle plusieurs avaient payé de leurs vies. Enfin ce fut sur un élan de jeunesse que le Néo Destour prit la relève de l'ancien parti avec des jeunes militants tels que Bourguiba, Ben Youssef, Mongi Slim et bien d'autres pour continuer à mener un combat acharné contre le colonialisme. Les équipes sportives étaient également parmi ces jeunes. L'Espérance tunisienne a eu comme premier président, une figure emblématique aussi bien parmi les Zeitouniens que les étudiants de la Khaldounia, un érudit et non moins militant Fadhel Ben Achour qui était à la force de sa jeunesse à l'époque. Il y allait de même pour le Club Africain et l'Avenir musulman qui étaient présidés par des militants. Le 20 mars 1956, la Jeunesse tunisienne était de la fête pour savourer le fruit de tant d'efforts et de sacrifices.