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Recherche fondamentale et recherche appliquée se complètent ; Il n'y a pas dichotomie Après les prix Nobel de physique, de chimie et de médecine, des scientifiques tunisiens percent un tabou
Après l'attribution des prix Nobel de physique, de chimie et de médecine, pour cette année 2009, des scientifiques tunisiens ont mis l'accent sur la complémentarité entre la recherche scientifique fondamentale et la recherche appliquée, comme l'illustrent les découvertes primées, cette année, par cette prestigieuse distinction internationale, notamment celles relatives aux sciences physiques, à la base de la révolution technologique numérique, de nos jours. Le prix Nobel de physique a récompensé, en effet, cette année, des travaux scientifiques entrepris depuis les années 1960 et ayant permis, d'une part, la généralisation de l'utilisation des fibres optiques pour la transmission des données et en télécommunications, et d'autre part, la numérisation des images grâce à des caméras numériques électroniques. Les professeurs Mourad Tellimini et Abderraouf Ben Naceur, enseignants chercheurs en physique à la Faculté des sciences mathématiques et physiques de Tunis, nous ont affirmé qu'à l'instar des distinctions précédentes, le prix Nobel de physique de cette année a consacré des recherches fondamentales en optique et autres disciplines physiques reconverties en applications technologiques.
Un mérite égal A cet égard, M. Mourad Tellimini a estimé que la recherche scientifique fondamentale et la recherche appliquée sont indissociables et complémentaires, car, dans la recherche scientifique, il y a toujours une composante fondamentale et une composante appliquée. Le rôle des physiciens est d'effectuer des recherches fondamentales en laboratoires propres à être transformées sur le plan appliqué en produits technologiques. Ainsi, avant d'avoir des applications utiles dans tous les domaines de l'activité humaine, le laser a été découvert et mis au point en laboratoire, dans le cadre de recherches en optique, dans les années 1960, presque comme simple curiosité scientifique, sans but utilitaire. Il en va de même de la magnéto résistance géante. Les auteurs de ces découvertes ont reçu des prix Nobel de physique. ''Ainsi, a dit M. Mourad Tellimini, il est faux de parler de l'existence d'une dichotomie et d'une contradiction entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Elles se compètent et méritent l'une et l'autre d'être encouragées, au service du bien être de l'humanité.'' M. A. Ben Naceur a noté que la qualité d'ingénieurs des trois scientifiques américains couronnés du prix Nobel de physique, cette année, ne peut pas être interprétée comme une préférence marquée pour la recherche appliquée, au détriment de la recherche fondamentale, car dans le système américain, les ingénieurs possèdent des formations solides en théorie et en pratique, à l'instar des systèmes allemand et japonais. Le passage de la théorie à la pratique s'en trouve renforcé. Le système tunisien de recherche scientifique qui connaît un développement grandissant, privilégie cette orientation et dispose d'une masse critique d'enseignants chercheurs et d'ingénieurs de haut niveau pour enregistrer des résultats probants. Deux des ingénieurs américains primés, George Smith (né en 1930) et Williard Boyle (né en 1924), pour leur découverte du capteur d'images ou caméra numérique appelé C.C.D ( Couple-Charged Device), ont travaillé dans les laboratoires américains Bell, qui ont à leur actif plusieurs autres prix Nobel. Le troisième ingénieur, Charles Kao (né en 1933), récompensé pour ses réalisations dans l'utilisation des fibres optiques comme support pour la transmission de la lumière à grandes distances, a travaillé dans les laboratoires de la ''Standard Telecom Laboratories''. Actuellement, plus d'un milliard de kilomètres de fibres optiques utilisées en télécommunications, couvrent la terre tout entière.
Réserves justifiées ? Cette année, en particulier, des commentateurs et des scientifiques ont cru déceler dans les prix Nobel de physique, de chimie et de médecine, une accentuation de la préférence portée en faveur des recherches appliquées aux dépens des recherches fondamentales. Selon certains d'entre eux, les laboratoires Bell aux Etats-Unis d'Amérique auraient licencié les physiciens employés dans la recherche fondamentale pour ne garder que les ingénieurs concepteurs d'inventions immédiatement exploitables. De grandes Universités américaines, sous prétexte de la crise économique, auraient également réduit les budgets réservés à ce type de recherches. L'un des lauréats du prix Nobel de physique, de cette année, George Smith, a déposé, durant sa carrière scientifique, plus de 30 brevets d'invention. En chimie, un des lauréats, Thomas Steitz (69 ans), a fondé, depuis 2002, une entreprise de produits pharmaceutiques, pour exploiter ses découvertes qui permettent de mettre au point de nouveaux antibiotiques agissant sur le ribosome des bactéries. Le ribosome est un organiste microscopique du cytoplasme de la celle vivante, permettant la synthèse ou la fabrication des protéines par l'organisme vivant, qu'il soit unicellulaire ou pluricellulaire. Les nouveaux antibiotiques signalés inhibent l'action du ribosome de la bactérie pathogène, ce qui entraîne sa mort. En médecine, les découvertes couronnées, cette année, concernent la maîtrise du vieillissement des cellules vivantes, avec ses applications alléchantes dans le vaste domaine des ''soins '' médicaux et cosmétiques.
Perfectionnement ou renouvellement D'ailleurs, en dehors des considérations intéressant le prix Noble et le choix des lauréats et des travaux primés, plusieurs esprits éclairés et scientifiques indépendants du système et de ses contraintes intérieures, ont commencé, ces derniers temps, à critiquer ouvertement '' le vieillissement théorique'' de la science moderne et la place croissante accordée au plan utilitaire et appliquée qui en est la conséquence. Pour eux, l'activité scientifique a viré à l'innovation, en se concentrant davantage sur le perfectionnement et ''l'amélioration'' des acquis réalisés en matière théorique et technologique. La science moderne ne se nourrit plus d'idées nouvelles, de sorte qu'elle ne se renouvelle plus à travers la conception audacieuse de nouvelles idées et de nouvelles théories explicatives générales, se contentant d'exploiter les idées et les théories admises. Ainsi, les découvertes primées, cette année, en physique, entre autres, sont fondées sur des idées et des théories vieilles de près de 150 ans, remontant à la fin du 19ème siècle, grande période du renouvellement des idées scientifiques, après celles des fondements et de l'édification. D'après les commentateurs cités, le perfectionnement, si justifié et utile soit -il, peut entraver le renouvellement et l'enrichissement des idées, quand il est axé sur un seul modèle, considéré comme étant le meilleur et le juste. En photographie et en imagerie, la caméra numérique constitue un perfectionnement par rapport à la pellicule, mais l'utilisation de la pellicule a permis, un jour, à l'homme de faire, de façon fortuite, la découverte des rayons X, et de la radioactivité, c'est-à-dire que l'homme aurait pu, facilement, passer à côté de ces découvertes fondamentales, sans l'emploi d'un moyen moins perfectionné. Beaucoup de philosophes expliquent l'intelligence de l'homme par l'imperfection de ses instincts qui le pousse à compenser cette faiblesse naturelle, en concevant intuitivement des adaptations propres.