• Taux de réussite «truqués»; un régime LMD qui fausse tout… C'est cela le «sens de l'excellence» dans le Régime Ben Ali - La majorité des diplômés de notre université, restés jusqu‘aujourd'hui sans emploi, fait partie de la génération que le régime de Ben Ali a indirectement corrompue et flouait: durant plusieurs sessions, en effet, le taux de réussite-très flatteur- au baccalauréat ne reflétait guère le niveau réel des candidats. Le « bonus » des 25% comptabilisé dans la moyenne de l'étudiant donnait un bon coup de pouce à ce dernier à tel point, raconte-t-on parmi les professeurs du secondaire, que dans le cas de certains bons bacheliers, cette moyenne excédait les 20 sur 20 maximales. Il faut remarquer par ailleurs que ces élèves étaient, depuis le primaire déjà, surévalués. Tout le système faisait donc en sorte que les résultats obtenus cachaient bien des défaillances chez nos jeunes scolarisés notamment dans les établissements publics. Au Supérieur, le maquillage se poursuivait de diverses manières : les nombreux petits instituts créés depuis la fin des années 1980 « truquaient » de la manière la plus réglementaire les résultats semestriels et annuels de leurs étudiants. Cela donna très souvent des taux de réussite ahurissants qui ne descendaient presque jamais en dessous de 80 %. Bradage criminel Les directeurs de ces établissements et certains chefs de départements incitaient les enseignants (dont beaucoup s'exécutaient quasi systématiquement) à noter généreusement les copies. Les épreuves donnaient lieu à moins de difficultés que d'ordinaire et les correcteurs montraient une indulgence inhabituelle face aux maladresses et aux mauvaises réponses. La surveillance aux examens devenait plutôt lâche et dans certains instituts « supérieurs » on la confiait à des fonctionnaires de l'administration, voire à des ouvriers de l'établissement. Aux délibérations, on se mit à accorder le rachat avec un peu trop de bienveillance. Certains professeurs défendaient ardemment des candidats qui ne faisaient pas partie de leurs classes. L'enseignant qui surveillait ou notait convenablement était taxé d'intransigeant, on le déchargeait parfois des séances de surveillance ou alors on le désignait pour des matières où le risque de copiage était nul ou extrêmement faible. Il arrivait aussi qu'on lui remît un volume réduit de feuilles à corriger. LMD Le régime LMD aggrava un peu plus la situation et offrit aux étudiants davantage de chances de réussite. L'application stricte de ce système fait que dans le décompte des notes, il arrive qu'on n'en retienne que les meilleures, et à tout le moins que les moins basses. De plus, la multiplication des options et des enseignements non fondamentaux, où les étudiants pouvaient obtenir d'excellentes notes, a permis à certains candidats de passer au niveau supérieur sans nécessairement obtenir la moyenne dans les matières de base de leur filière : par exemple, un étudiant du département de français a beau avoir largement moins de 10 /20 en littérature, en langue et en civilisation françaises ; ses notes d'anglais, d'arabe, de culture de l'entreprise et de droits de l'homme peuvent le repêcher aisément. Tout ceci, sans compter la suppression dans les départements de langue des épreuves orales. Déjà, les étudiants accusaient des lacunes parfois insurmontables en pratiquant la langue qu'ils étudiaient et voilà que le régime LMD impose l'abandon de cette évaluation primordiale. Certes, l'examen oral donnait lieu, autrefois, à certains abus inadmissibles; mais de là à le supprimer dans les filières qui s'en passent difficilement, ce fut une aberration encore plus condamnable. D'ailleurs, les examinateurs du CAPES et les inspecteurs du secondaire sauront mieux que nous vous décrire l'oral lamentable de la plupart des candidats à la profession d'enseignant de langue. Cessons de vendre les chimères Nous devons également rappeler qu'il fut un temps où le taux de réussite aux examens nationaux était lié aux résultats des élections présidentielles ! Oui, il fallait à Ben Ali remercier ses « électeurs » d'une quelconque façon ; pourquoi pas par des résultats hors du commun en neuvième, au bac et à l'université. Il avait aussi besoin d'édulcorer le niveau de l'enseignement sous son règne. Le bac, la licence et la maîtrise furent dès lors des certificats plus accessibles que jamais. Mais, paradoxalement ces diplômes ne furent jamais aussi déconsidérés que sous Ben Ali. Le discrédit atteignit même le doctorat ces dernières années. On dit même que sa « coiffeuse » d'épouse en préparait un avant de prendre la fuite ! Nous avons tous maintenant l'obligation de relativiser les choses en parlant des dizaines de milliers de diplômés du Supérieur restés au chômage. Mais en même temps, la communauté nationale doit assumer sa responsabilité en leur cherchant des emplois à la mesure de leurs certificats. D'un autre côté, nous devons retenir une énième leçon sur la nécessité d'une parfaite adéquation entre la formation et l'emploi, autrement dit entre l'école et le marché de l'emploi. Il ne faut plus vendre d'illusions aux générations futures. Et pour réhabiliter les diplômes sous nos cieux, commençons par une refonte totale de notre enseignement.