Le Quotidien d'Oran Vers l'accélération de la fin du régime libyen La chute de Mouammar Kadhafi et l'effondrement de ce qui reste de son régime dans la capitale et l'ouest de la Libye sont proches. Il est aisé d'avancer le pronostic au regard de l'évolution de la situation sur le terrain. Il est en effet patent que l'armée et les milices du dictateur libyen n'ont plus l'allant offensif qui leur avait permis, dans les premiers temps de l'insurrection, de contenir puis de pourchasser les insurgés jusqu'à les confiner dans les seules villes de Misrata et Benghazi. Depuis deux semaines, cette armée et ces milices sont à leur tour pourchassées et délogées lentement mais irrémédiablement des villes et localités dont elles ont pris le contrôle. Ce retournement de situation est à mettre au compte du meilleur encadrement dont s'est dotée peu à peu l'insurrection et que supervisent des «conseillers» fournis par des Etats membres de la coalition internationale. Il a été rendu irréversible par l'amoindrissement des capacités de feu de l'armée et des milices pro-Kadhafi, la désorganisation de leur logistique et la destruction de leurs moyens de communication sous les effets des bombardements aériens qu'effectue sans cesse depuis des semaines l'aviation de la coalition. Certes, les insurgés sont loin d'être en situation d'arriver rapidement à Tripoli. Mais c'est justement dans la capitale que pourrait se jouer le scénario de l'accélération de la chute de Kadhafi et de son régime. C'est-à-dire que c'est de là que leur viendrait le coup ultime et fatal pour la résistance qu'ils opposent encore. Une accélération qui devient possible après que le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno Campo, eut demandé aux juges de cette institution la délivrance de mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité contre Kadhafi, son fils Seif Al-Islam et le chef des renseignements libyens, Abdallah Senoussi. D'autres proches du dictateur et personnalités du régime sont passibles du même traitement, mais il est probable que le procureur de la CPI n'a pas voulu les inscrire dans la liste avec l'espoir qu'ils voient dans leur omission une invite à abandonner la cause de leur chef. Le message semble avoir été reçu cinq sur cinq par l'un des plus proches de Kadhafi, en l'occurrence son ministre du Pétrole, qui vient de débarquer mystérieusement en Tunisie. Sa présence dans le pays voisin est peut-être due à sa volonté personnelle de quitter le bateau qui coule et de se dédouaner de l'entêtement criminel de Kadhafi. Mais elle peut aussi laisser penser que cette personnalité est mandatée par d'autres à l'effet de trouver un terrain d'entente avec les puissances coalisées quant à leur contribution à la chute accélérée du «zaïm» et à la définition de ce que sera l'après-Kadhafi en Libye. Pour aussi confiantes qu'elles se montrent publiquement à l'égard de la direction de l'insurrection, les puissances coalisées marquent en fait de grandes réserves, car peu rassurées par la présence en son sein de figures au passé trouble et aux projets politiques inquiétants pour leurs intérêts et leur influence en Libye. Ces puissances, et la France en particulier, ne seraient pas hostiles à ce que la chute du dictateur et de son régime ne soit pas due uniquement aux insurgés, en qui elles ont une confiance toute relative. Elles sont prêtes en conséquence à compter dans le camp des vainqueurs avec qui négocier l'après-Kadhafi en Libye, les proches actuels de celui-ci qui prendraient l'initiative de lui asséner le coup de boutoir définitif qui le mettrait à bas.