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Bi-diplomation pour des ingénieurs qui «TIC»
Partenariat tuniso-français à travers Sup'Com El Ghazala et Télécom SudParis
Publié dans Le Temps le 17 - 12 - 2011

Tunis-Paris Raouf KHALSI - On entend murmurer et chuchoter un peu partout que les Tunisiens craignent d'être un peu « oubliés » par la France. Craintes exagérées parce que la France reste notre premier partenaire en tout ; elle ne se désengagera jamais, malgré son implication en Libye, et, de toutes les manières, on n'oubliera pas qu'il y a 13 mille étudiants tunisiens en France et que le plus grand nombre de nos émigrés vit justement en France. De surcroît, jamais le consulat de France en Tunisie n'a encore accordé autant de visas que cette année sur la France. Il est normal qu'après les flottements des premiers jours de renversement de régime les Tunisiens ressentent un certain dépit.
Normal aussi que le dérapage verbal de MAM ait généré des rancoeurs. Il n'en demeure pas moins que ce qui paraît être de la distance n'est en fait que du recul stratégique pour nous laisser mettre tranquillement nos institutions en place. C'est la face émergée de l'iceberg. La face politique en somme. Car en filigrane, l'interpénétration tuniso-française est toujours aussi solide, et sur le plan économique, les délocalisations sur la Tunisie s'inscrivent toujours au chapitre des préférences, sinon des priorités. Il y a mieux : la face cachée de ce partenariat, sur le plan de la diplomation. L'exemple du partenariat Sup'Com El Ghazala – Télécom SudParis et la double diplomation d'ingénieur (diplôme tunisien et diplôme français) est un monde à découvrir et cela vaut bien plus que les rituels ballets diplomatiques.
Nous avons été invités à explorer Sup'Com El Ghazala. Puis, l'avion nous a transportés à Télécom SudParis. Un pont jeté pour la pérennité.
Jugez-en
Deux en un
Imaginez un ingénieur avec une double casaque : l'une tunisienne ; l'autre française. Ou inversement. En termes plus simples, il s'agit de quelque chose d'inédit : les élèves réussissent deux diplômes d'ingénieur, celui de Télécom SudParis et celui de Sup'Com (à la Technopole d'El Ghazala).
En fait, c'était un modèle de partenariat percutant, futuriste et, encore une fois, inédit. Une première, en somme. Car c'est l'aboutissement de deux grandes écoles d'ingénieurs des technologies de l'information et de la communication. Le mécanisme est lui-même cohérent et fluide : les élèves passent trois semestres à Sup'Com dans le technopole d'El Ghazala, et deux semestres à Télécom SudParis, et en plus, un autre semestre en stage rémunéré en entreprise.
Ce cursus bidiplômant entre Tunis et Paris, est accrédité par la commission des titres d'ingénieurs (CTI). Et c'est la première fois, justement, qu'une telle filière est validée par la CTI.
Il faut rappeler que Sup'Com est la première grande école d'ingénieurs dans les technologies de l'information et de la communication en Tunisie. Elle est, par ailleurs, associée de l'Institut Télécom, le groupe français des grandes écoles de télécoms auquel appartient Télécom SudParis. Celle-ci emprunte plusieurs voies d'approfondissement et entretient ce même type de partenariat ou d'association avec plusieurs autres écoles similaires à la nôtre, de par le monde : 77 dont le Canada, l'Egypte, le Maroc, l'Allemagne etc… Et c'est là toute la quintessence de ce cursus bidiplômant : l'ouverture à l'international, en cette ère où, paradoxalement, la mondialisation révèle le revers de sa propre médaille : la contraction des Etats sur eux-mêmes et le grand retour des nationalismes. Peut-on, d'ailleurs, briser les barrières avec la seule formation d'ingénieur High Tech si ces derniers ne maîtrisent pas les dimensions interculturelles, les sciences humaines et pour ne pas basculer du côté de Françoise qui dit : « la culture c'est ce qui reste quand on a tout oublié », ce cursus s'inspire plutôt de Montaigne : « des têtes bien faites, plutôt que des têtes bien pleines ».
La sacerdoce de Pierre Rolin
(Directeur de Télécom SudParis)
Pierre Rolin a été nommé, au mois de septembre 2005, Directeur de Télécom INT, aujourd'hui, baptisé Télécom SudParis. Il est titulaire d'un doctorat d'Etat en informatique. Il parle en bon père de famille car gérer un campus d'une telle dimension avec 814 étudiants toutes formations dont 44% sont étrangers, 106 enseignants chercheurs dont 78 titulaires d'un PHD avec un taux d'encadrement d'un enseignant pour 9 étudiants ; un incubateur bilocalisé en plus des axes de partenariat avec 77 universités étrangères, eh bien, tout cela exige beaucoup de savoir-faire et une dimension plurielle.
Pierre Rolin ne cache pas, d'ailleurs, sa satisfaction de voir qu'il y a actuellement 5448 diplômés en activité et qui gardent cette fibre affective, voire le cordon ombilical les liant à Télécom SudParis.
« Dès 2006, dit-il, la volonté de l'Etat français et de l'Etat tunisien était de relever un challenge. Il s'agit de progresser ensemble ou plutôt d'explorer les principaux axes de progression que je résumerais en trois points :
· Professionnalisation des relation avec l'entreprise
· Apporter à Sup'Com une dimension internationale, car il n'y a plus de marché national, chez nous en France, comme chez vous en Tunisie, d'ailleurs.
· Améliorer la compréhension des ingénieurs et approfondir leurs connaissances culturelles et structurelles, depuis la rédaction d'un C.V jusqu'à la maîtrise de soi lors d'un entretien, jusqu'à aussi une manière de proclamer d'un label précis dans la vie professionnelle.
Cela dit, je vous rassure : la grande majorité des ingénieurs tunisiens réussissent à travailler en France. Ça va, généralement, de 5 à 10 ans. Après, ils retournent en Tunisie, soit dans leurs propres entreprises qui délocalisent, soit dans des postes importants ».
A une question du « Temps » concernant la fuite des cerveaux de la Tunisie vers la France et celle des Français vers d'autres cieux et si, finalement, cet altruisme français ne ressemblait pas à l'hôpital qui se fout de la charité, Pierre Rolin a cette réplique sèche :
« Oui, on a besoin de 40.000 ingénieurs chaque année en France et on n'en produit que 3.000.
Je ne crois pas en ce « concept » de fuite des cerveaux dès lors qu'il y a tout ce flux de délocalisation et l'interactivité entre l'université et le marché de l'emploi : interactivité qui doit être redynamisée, je pense qu'il faut en finir avec cette frilosité. Non, Sup'Com, n'est pas l'hôpital qui se fout de la charité, car sa vocation c'est l'ouverture à l'international.
On oublie la capacité d'intégration des étudiants. Et, d'ailleurs, des étudiants français, malgré les événements, ont choisi la filière Tunis et pas un autre pays pour compléter leur cursus (Cf. encadré et l'exemple de Clotilde). Il y a aussi une convivialité naturelle entre étudiants qui s'installe dans le campus. Et nous sommes déjà dans l'international avec cette sorte de melting pot. L'aboutissement en est la double diplômation par les échanges ».
Pourquoi, précisément, la Tunisie, demandons-nous à Pierre Rolin ?
« C'est simple, répond-il : Nous connaissons la compétence du corps professoral tunisien. Sup'Com (Tunis) est une école de référence dans le domaine et je m'en enorgueillis de le dire et de le répéter ».

Les soucis de Mounir Frikha
(Directeur de Sup'Com – Technopole El Ghazala)
La visite au campus de Télécom SudParis a eu lieu, presque tout au long de la journée du mardi.
Un espace évoquant vaguement les campus du style américain où l'on pratique le sport, la musique ou toute autre activité.
Et quoiqu'il ait plus des cordes, ce jour-là, Sandrine Bourguer, responsable de la communication et qui nous pilotait déjà depuis la veille au départ de Tunis, redoublait en assiduité pour ne rien nous faire rater.
Remontons, justement, à la veille, à la Technopole El Ghazala, et plus précisément, à Sup'Com où nous fumes reçus par le Directeur de Sup'Com, Mounir Frikha.
« Nous commençons à avoir pignon sur rue, affirme Mounir Frikha. Cette année, 143 étudiants ont choisi directement Sup'Com. La bourse d'Etat est attribuée en 3ème année et on se base sur la moyenne. Nos partenaires nous communiquent leurs offres de stage et nous agissons en fonction. l'avantage ici, c'est que nous sommes entourés d'entreprises et que 43 responsables industriels travaillent de concert avec Sup'Com. Cela fait que les entreprises sont implantées ici, et c'est là, un très grand avantage de proximité ».
« Le Temps » pose la question suivante : Les cinq étudiants boursiers que vous vous envoyez à Télécom SudParis, il n'est pas dit qu'ils retournent en Tunisie, une fois leur double diplôme en poche.
Réponse flegmatique de Mounir Frikha : « Oui, mais il n'est pas dit qu'ils restent en France ! ».
Un collègue demande au Directeur de Sup'Com s'il fait un suivi du cursus de l'emploi de ses diplômés.
« Bien sûr que oui. Nous savons que le premier salaire proposé aux étudiants premier emploi se situe entre 1000 et 1200 dinars. Mais, nous sommes toujours là pour les assister et, au fond, nous les exhortons à lancer leurs propres projets, c'est-à-dire, que nous développons en eux un sens de l'entrepreneuriat ou ce que l'on appelle l'inconscience objective. Il faut seulement être patient et aider ces jeunes ».
Oui, mais, comment les aider à se mettre à leur propre compte, quand la banque de l'emploi et les banques, en général, leur demandent des garanties qu'ils n'ont pas ?
« C'est là effectivement le nœud gordien. Il faudra bien assouplir les procédures et les banques, malgré la conjoncture difficile - et pas uniquement en Tunisie – gagneraient à se débarrasser d'une certaine frilosité face à l'ambition des jeunes ».
En Tunisie, répliquons-nous, il y a un grand fossé entre l'Université et le marché de l'emploi. Cela est, peut-être, dû à la banalisation des diplômes qui aboutit à ce qu'on appelle la stérilisation pure et simple des diplômes : « je vous l'accorde. Il faut être vigilant quant à la qualité. Cela dit, si on n'a pas eu de Tunisiens dans cette promotion, c'est peut-être aussi parce que nos étudiants ne sont pas suffisamment sensibilisés quant à la double diplômation du fait aussi d'un manque de médiatisation et de communication problématique que vous évoquiez tout à l'heure ».
Nous avons eu, par ailleurs, à écouter, à Tunis, un exposé exhaustif et très technique de Mohamed Siala, Directeur des Etudes et au cours duquel, il a mis l'accent sur les différentes étapes du cursus ainsi que les proportions des matières enseignées. C'était à Tunis. En France, après l'exposé de Pierre Rolin, Claude Villard, Directeur de la formation, a synthétisé les fondamentaux du cursus. Il a, aussi, exposé une répartition des matières enseignées, la forme du camembert. A savoir, 66% réservés aux sciences et technologies. 15% à l'économie, à la sociologie, aux humanités et au culturel ; 12% à l'anglais (2ème langue) après le français mais suivi de l'arabe littéraire écrit et parlé, c'est l'exigence à Télécom SudParis; 7% aux autres langues.
Au-delà des axes pointus, de la technicité et de la spécialisation, nous avons bien vu dans ce voyage de deux jours entre Sup'Com El Ghazala et Télécom SudParis que le socle fondateur de cette double diplômation reste cette imperceptible inter-culturalité, le brassage des cultures et des nationalités et l'aumône fait à ce que Socrate appellerait « les citoyens du monde ». Cette association est unique du genre entre la Tunisie et la France.
Les événements de janvier ont quelque peu perturbé le processus puisque les étudiants étrangers ont été rapatriés chez eux pour un certain moment, mais ce que disait Pierre Rolin est fondamental : la solidité et la fiabilité du corps professoral tunisien. En d'autres termes, c'est comme s'il disait à nos jeunes : « ayez étudiants tunisiens » confiance en vos professeurs.
Oui, mais de leur côté, nos professeurs et l'université, en général, doivent apprendre à communiquer, à transcender les clivages et à se rapprocher plus de leurs disciples.
A bâtons rompus avec les étudiants étrangers de Sup'Com

Clotilde (française)
A 15 ans elle a son bac. Deux années de prépa elle fait Télécom SudParis puis elle choisit Sup'Com Tunis alors qu'elle aurait pu choisir des capitales plus huppées.
Ses professeurs en Tunisie comme en France jugent qu'elle est brillante. Elle est à Tunis, dit-elle, parce qu'elle s'y était rendue avec sa mère et qu'elle aime la Tunisie.

Abderrahmane (Marocain)
Bac au Maroc. Puis concours pour Paris. J'avais à choisir entre Paris et Tunis, j'ai choisi Tunis pour me réchauffer (il est natif de Marrakech cela se comprend) et il affirme qu'il n'est pas boursier alors que sa famille a beaucoup d'engagements financiers.

Marwane (franco-tunisien)
J'ai étudié à Télécom SudParis. Puis pour la suite du cursus j'ai vu qu'il y a Tunis et j'ai choisi Tunis. Et c'est un choix objectif et pas uniquement affectif.


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