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Sidi Bouzid, mon amour
Publié dans Le Temps le 21 - 12 - 2011

De notre envoyée: Malek LAKHDHAR - Il était une fois, la Révolution tunisienne de la Dignité. Un an déjà, dirions-nous. Depuis l'immolation de Mohamed Bouazizi, beaucoup de sang a coulé et une série de drames et de chamboulements historiques ont fait suite à son geste désespéré. L'effet boule de neige a contaminé plusieurs pays arabes et les dictateurs ont tremblé pour leurs royaumes.
L'ordre des choses est ébranlé laissant place à de nouveaux paysages sociaux-politiques, de nouvelles idéologies et courants. Le Monde arabo-musulman en est «charcuté». De nouvelles démocraties en devenir sont en cours de réalisation. Et pour la célébrer, un festival a été organisé et s'est étalé sur trois jours ponctué de diverses activités culturelles et sportives.
On fête la Révolution !
Les festivités ont commencé depuis le vendredi soir pour se poursuivre jusqu'au dimanche tard dans la soirée. Des caravanes étaient organisées spontanément par le commun du peuple et d'autres par la Société civile, à l'instar de la Ligue Tunisienne de la Tolérance, l'Assemblée Supérieur des Libertés et bien d'autres associations. Une dizaine de bus étaient partis de plusieurs villes pour rejoindre les intrépides habitants de la ville de Sidi Bouzid. Ces derniers leur ont réservé un accueil digne des Tunisiens. Accueillis comme des rois, les convives étaient en parfaite symbiose et en état d'euphorie total avec leurs semblables.
Le temps était à la solidarité, à l'amour d'autrui, aux sourires, aux poèmes et aux chants patriotiques scandés fièrement et à haute voix.
Les jeunes de Sidi Bouzid ont organisé volontairement sans aucune aide extérieure, un grand barbecue en plein air pour leurs convives. On les priait de d'installer, sourires aux lèvres et bonne humeur à en revendre, malgré les séquelles que l'on pouvait lire sur les visages. Tout était organisé à la perfection. Esprit d'équipe et organisation assez solide et solidaire qui étonnèrent les présents.
On mangeait aux rythmes des chants patriotes et aux danses des jeunes organisateurs se tenant par les mains. Une de ces ambiances qui vous donne la chair de poule et rappelle combien on aime ce pays ! On s'amusait à inviter les gens venus des autres villes à venir contempler ensemble les tags, les dessins faits du temps de la Révolution. On leur expliquait les codes, déchiffrait les messages latents. On nous raconta les moments les plus durs où la peur n'avait plus lieu d'être.
Quand l'art est au service de la Révolution
Dans chaque coin de la ville de Sidi Bouzid, on pouvait tomber sur de vrais artistes, jeunes et moins jeunes, lesquels armés de leur pinceaux et les palettes de couleurs, figeaient le temps de la Révolution grâce à leur main d'artistes.
Agités par ce sentiment encore fervent et vif et munis de certains outils, ils prirent pour toile de fond, les murailles de la ville pur dessiner spontanément des œuvres collectives ou solitaires des tags, des tableaux ou des messages assez expressifs d'une jeunesse en herbe, d'une jeunesse martyrisée et marginalisée de par le passé. De petits dessins faits par des écoliers étaient collés accrochés aux arbres. Avec cette candeur et innocence des enfants, ces effigies transperçaient l'âme et montraient ce dont rêve n'importe quel enfant : un monde meilleur.
Une statue représentant le carrosse de Mohamed Bouazizi attirait les regards intrigués des gens. Quelques organisateurs encerclaient l'objet d'art et veillaient à son entretien. On se pressait autour pou se prendre en photo devant la charrette devenue symbole de dignité pour tous les Tunisiens. Cette dernière étaient entourées d'une dizaine de chaises renversées, emblèmes des sièges politiques renversés grâce ç un marchand ambulant. Ne demandant l'auteur de la statue, on nous informa que le sculpteur est un Tunisien et qu'il a offert son œuvre aux habitants de Sidi Bouzid mais tenait à rester anonyme.
Ils étaient à la fois tout sourire et sérieux. Ils se laissaient immortaliser par les divers objectifs et appareils photos. Rien ne les intimidait. Ils étaient fiers et affichaient au monde leur bravoure, leur patriotisme, leurs rêves d'un pays émancipé et équitable.
De même, des estrades pour musiciens, animateurs ou de dj étaient partout et animaient le centre ville de Sidi Bouzid. Il y en avait pour tous les gouts, du violon, du Rap, du Mezoued, du piano. La ville était en fête et out le monde dansait.
En parallèle, sur le thème de «La Révolution du 17 décembre, les assises de la démocratie et de la révolution », une conférence a eu lieu attirant la présence internationale de plusieurs associations et auditeurs étrangers.
Pour la troisième journée, le dimanche 18 décembre, on la consacra aux activités sportives, parce que l'on sait que le sport demeure le meilleur moyen de défoulement le plus saint à des jeunes encore frustrés et démunis. Un tournoi de football a été, d'ailleurs, lancé par le Commissariat régional de la jeunesse et des sports de Sidi Bouzid et qui a attiré une foule énorme des amoureux de cette spécialité.
Actes symboliques
A notre arrivée, la fête battait son plein. La ville était agitée au rythme des festivités. Le nouveau président, était déjà venu rendre hommage aux héros de la Révolution leur rappelant que c'est grâce à eux qu'il est là aujourd'hui et que la Révolution est leur dû.
La grande et seule artère de Sid Bouzid était pleine à craquer. Des banderoles affichant des messages patriotiques étaient partout. Chaque mètre, nous exposait son lot de surprises et d'activités. Les jeunes étaient sur les toits des endroits emblématiques de la Révolution.
Le gouvernorat, la municipalité, le commissariat et plusieurs autres bâtiments dont quelques uns ont été incendiés étaient tous occupés par les jeunes de Sidi Bouzid, comme pour dire : «on est là, on guette les dictateurs, on ne va plus se taire, c'est notre ville, notre pays, la terre de nos ancêtres et on en est les seuls maîtres !».
On affichait partout les photos de Mohamed Bouazizi. De grands portraits étaient sur les murs des bâtiments symboliques. Un portrait géant était collé sur la devanture de la municipalité. Il était tenu fièrement par les jeunes de la ville. Par souci de sécurité, l'armée était partout pour assurer le bon déroulement de la journée. La veille du 17 décembre, on lâcha quelques balles en l'air pour annoncer le début de la célébration de la Révolution
Puis, on nous annonça qu'un énorme portrait de l'ancien dictateur allait être affiché devant tout le monde et brûlé par ce même feu par lequel s'est immolé Mohamed Bouazizi. Une sorte de vendetta emblématique sur le cours de l'Histoire. Le spectacle a attiré la foule venue en nombre. Et le portrait de Ben Ali était à la merci des flammes sous les regards à la fois haineux et heureux d'un peuple assez assujetti par l'occupant du portrait.
On dansa, on chanta autour de l'image en feu et on tenta d'assouvir sa rancune non rassasiée face à un dictateur en fuite…
Témoignages poignants
Ils étaient là, souriants et hospitaliers. Ils venaient spontanément à nous. Une occasion en or pour évacuer leur vécu, papoter et faire passer leurs messages. Paroles de héros :
Karim (lycéen, 17 ans et membre dans le comité de l'organisation), avec un petit sourire timide et des mains tremblantes, il s'adressa à nous : «C'est grâce à nous, jeunes de Sidi bouzid et ceux des autres villes de l'intérieur que l'on est tous là aujourd'hui en train de fêter l'avènement de la démocratie. J'ai eu peur OUI quand il fallait faire face aux policiers, aux tirs et à la violence inhumaine. Quand notre quartier (Cité Ennour) était encerclé, j'ai oublié la peur et je sorti tous les jours en ne sachant même pas si je rentrerais plus tard revoir mes parents. L'amour de mon pays était bien supérieur à celui de ma petite personne ! Aujourd'hui, je rêve d'un avenir meilleur, pourvu que les politiques comprennent que l'on est dignes et qu'n ne baissera jamais les bras».
Ahmed (26 ans, ouvrier)
« Aujourd'hui on fête les maux d'hier. On commémore la mort désespérée de Bouazizi, qui, à travers son acte a émancipé le pays et a fait fuir les corrompus. Cette date devra marquer l'Histoire de la Tunisie et remplacer celle du 7 novembre ! Nous porterons fièrement et à jamais cette date dans nos cœurs et dans la mémoire collective. On s'est révolté pour la dignité et le droit au travail et nous continuerons la lutte jusqu'à ce que l'on voie de vrais projets exécutés dans les régions oubliées depuis l'indépendance !»
Zied (24 ans, maîtrisard en informatique et chômeur et membre de l'organisation) : «En est en fête car nous avons été les pionniers de la Révolution.
En réaction à l'immolation de Mohamed Bouazizi, nous avons été les premières cibles des policiers de Ben Ali. Sauf que l'acte de Bouazizi a éveillé en nous un courage que l'on ne se soupçonnait pas ! Aujourd'hui, un an plus tard, nous réclamons d'être traité dignement et d'avoir notre droit à une vie décente. Il faudra décentraliser les privilèges et partager le pouvoir économique entre toutes les villes pour qu'il ya ait réellement une démocratie. Le droit au travail est l'une des premières assises d'un pays démocrate.
Maintenant, on va voir si les anciens détractés par le régime de Ben Ali seront à la hauteur de leurs promesses…Ils devront savoir que c'est grâce à tout le peuple tunisien qu'ils détiennent maintenant le pouvoir, on attend d'être respectés, sinon, on ne se taira pas ! ».
Politiciens, vous êtes avisés…
La nuit tombe, mais la ville est toujours en fête. Une soirée poétique réchauffe le cœur et le corps malgré le froid glacial qu'il faisait. On invita les convives à rester passer la nuit. On leur offrit de quoi lutter contre le froid de canards du mois de décembre. Plusieurs étaient d'ailleurs restés sur place pour savourer pleinement le goût de la victoire et partager cet amour pour la patrie.


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