• Consacrer une partie des ressources du pétrole et du phosphate à l'investissement dans le Sud et à Gafsa • Instaurer une discrimination positive au profit des régions frontalières Le développement régional intéresse tous les acteurs et partenaires sociaux. Sami Aouadi, membre de la Fédération de l'Enseignement supérieur relevant de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), porte un regard très critique sur la situation prévalant dans le pays. Lors de la dernière conférence sur le développement, il avait rappelé que l'UGTT a réalisé depuis 2006, plusieurs études quantitatives et qualitatives sur le développement dans les régions du Kef, Gafsa, Kasserine, Sidi Bouzid…Deux autres études sont en cours d'élaboration concernent Siliana et Jendouba. Les régions intérieures ont joué un rôle capital dans la révolution du 14 janvier. L'intérêt porté au développement dans les régions déshéritées s'est accentué après la Révolution. Durant les cinquante dernières années, le développement s'est concentré particulièrement sur les régions côtières du pays. Les investissements publics dans les régions intérieures se sont limités au strict minimum, à savoir les écoles, lycées, quelques hôpitaux, et certaines infrastructures de base comme les routes et les sentiers agricoles. Les collectivités locales sont demeurées dépourvues de ressources nécessaires pouvant répondre aux besoins de leurs administrés. L'infrastructure routière et ferroviaire est peu développée pour désenclaver ces régions, ce qui ne saurait encourager les investisseurs à s'y implanter. Ainsi le chômage y a atteint des proportions très élevées. Ces insuffisances qui font l'unanimité, n'ont pas incité le Gouvernement Jebali à opter pour un budget autre que celui préparé par le Gouvernement Béji Caïd Essebsi, arguant de l'étroitesse du temps nécessaire pour préparer un autre budget. La loi de finances complémentaire est annoncée pour le mois de mars prochain. Un embarras de plus qui explique la recrudescence des mouvements de mécontentement dans les régions intérieures. Dans une politique de développement alternative, Sami Aouadi estime qu'il faut impérativement satisfaire aux besoins des régions frontalières qui jouent un rôle capital dans la protection des frontières du pays. Une discrimination positive doit être faite en leur faveur. Les ressources provenant du phosphate ou du pétrole profitent non seulement au Sud du pays et à Gafsa, mais à tout le pays. Il faudra, donc penser à un mécanisme pour que les ressources du tourisme profitent, elles aussi, à tout le pays. Le principe d'équité et de justice doit prévaloir dans la répartition des ressources budgétaires de l'Etat. Le responsable de l'UGTT considère que le développement alternatif doit reposer sur la démocratie locale et régionale. Les besoins des régions doivent être définis par les habitants de ces régions. Ils ne doivent pas être arrêtés de façon unilatérale par le pouvoir central. Il faut associer les organisations non gouvernementales s'occupant des questions de développement dans le travail de diagnostic et d'identification des stratégies régionales. Le découpage administratif actuel doit être revu, pour créer de grandes régions, englobant plusieurs gouvernorats à la fois. Le rôle de l'Etat doit être révisé. En plus de sa fonction régalienne, l'Etat doit s'impliquer dans les investissements productifs dans ces régions. Les unités de production paralysées après la Révolution doivent être redynamisées par une intervention des pouvoirs publics. L'échelle des priorités du secteur public doit être révisée au profit des régions les plus défavorisées. La politique de formation professionnelle doit bénéficier aux ressources humaines des régions intérieures tout en facilitant l'intégration professionnelle des apprenants. Les avantages fiscaux accordés par le code d'investissement actuel ont montré leurs limites dans le développement des régions déshéritées. Une révision s'impose. Vue le manque d'infrastructures, les avantages à accorder à l'investissement dans ces régions doivent être conséquents et suffisamment attractifs. Les nouveaux critères de répartition des ressources budgétaires entre les régions, doivent selon Sami Aouadi, procéder du principe même de solidarité entre les régions, le droit de chaque citoyen où il se trouve à la satisfaction de ses besoins en équipements culturels, éducatifs et sanitaires…Ces régions doivent bénéficier de leur part dans la richesse nationale. Une idée est avancée : consacrer une proportion des ressources du phosphate et du pétrole pour financer les investissements dans les régions du Sud et à Gafsa. Un indice de développement humain minimum (IDH minimum) doit être fixé. Aucune région ne doit l'atteindre.